Le président vénézuélien Nicolas Maduro, le 18 décembre 2020 à Caracas © Présidence vénézuélienne/AFP/Archives Jhonander Gamarra
Le parti du président vénézuélien Nicolas Maduro s’installe mardi aux commandes du Parlement, unique institution jusqu’alors aux mains de l’opposition qui avait boycotté le scrutin législatif de décembre, estimant que les garanties de transparence n’étaient pas réunies.
Malgré une abstention record et le rejet des résultats par une majeure partie de la communauté internationale, le Parti socialiste unifié du Venezuela (PSUV) au pouvoir et ses alliés occuperont 256 des 277 sièges du Parlement unicaméral.
La diplomatie américaine avait qualifié le scrutin législatif de « farce politique », l’Union européenne ne l’a pas jugé « crédible », et de nombreux pays sud-américains ont critiqué le manque de « transparence » et l’absence « d’observateurs internationaux ». Seule la Russie, avec Cuba, a fait l’éloge d’élections « transparentes ».
Reconnu par plus de cinquante pays comme président par intérim du Venezuela, le chef de l’opposition Juan Guaido a promis de résister et d’assurer la continuité des travaux des parlementaires élus en 2015.
Les membres de l’opposition ont approuvé le 26 décembre la « continuité » de l’ancienne Assemblée nationale qui fonctionnera à travers une « commission déléguée jusqu’à ce qu’aient lieu des élections présidentielle et parlementaires libres ».
« La continuité constitutionnelle du Parlement n’est pas un caprice, c’est un devoir (…) puisqu’il n’y a pas eu d’élection », a affirmé M. Guaido dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux.
Cependant, « cette continuité administrative n’a pas de fondements légaux constitutionnels », souligne le politologue Jesus Castillo-Molleda. Le directeur de l’institut de sondage Datanalisis, Luis Vicente Leon, se demande si cette continuité « permettra ou non le maintien d’un soutien international » à l’opposition et à Juan Guaido.
– Jeu de pressions –
Le président américain sortant Donald Trump a été le principal allié de M. Guaido. Sous son administration, la Maison Blanche a imposé de lourdes sanctions financières au Venezuela et à sa compagnie pétrolière d’Etat PDVSA pour tenter d’évincer Nicolas Maduro du pouvoir.
Pour le leader socialiste, qualifié de « dictateur » par l’administration américaine, « la politique de Donald Trump sur le Venezuela a échoué lamentablement ». Il a déjà lancé plusieurs appels au dialogue à l’adresse du futur pensionnaire de la Maison Blanche, le démocrate Joe Biden.
« Une partie importante de l’opposition a adopté la vision extrémiste imposée par Washington durant la période Trump (…) Cette ère touche à sa fin et nous allons voir comment va réagir cette partie de l’opposition », a déclaré M. Maduro dans une interview télévisée.
Dans un pays étouffé par une inflation galopante (+4.000% sur un an), paralysé dans d’interminables files d’attente pour faire le plein d’essence, fatigué du manque d’approvisionnement en eau et en gaz, et excédé par les brutales coupures de courant,Juan Guaido semble avoir perdu le soutien populaire dont il a bénéficié lorsqu’il s’était autoproclamé président en janvier 2019.
A travers une consultation symbolique organisée après les élections boycottées de décembre, il n’a pas réussi à ranimer une opposition déçue de son incapacité à renverser le régime Maduro qui jouit du soutien indéfectible de l’armée.
Le scrutin symbolique, organisé durant une semaine sur internet et en présentiel, n’a guère mobilisé, même si l’opposition assure que plus de 6 millions de Vénézuéliens y ont participé.
Pour le directeur du Centre d’études politiques de l’Université catholique Andrés Bello, la dualité présidentielle ne devrait « pas se poursuivre longtemps, du moins selon les modalités de 2019 », lorsque l’opposition détenait constitutionnellement le Parlement.
D’autant, estime le chercheur, que M. Maduro « va utiliser » les mesures de restrictions liées à la pandémie de Covid-19 pour étouffer toute manifestation, comme il l’a fait en 2020.
Des menaces d’arrestation planent désormais au-dessus de M. Guaido, qui ne sera plus mardi président du Parlement. Dans un récent entretien à l’AFP, il avait réfuté toute idée d’exil malgré les menaces.
Dans ce jeu de pressions internes et internationales, Nicolas Maduro a promis une main ferme: « Mon pouls ne tremblera pas », a-t-il affirmé.
LNT avec Afp