Manifestation anti-Maduro à Caracas, le 22 juin 2017 © AFP JUAN BARRETO
L’armée vénézuélienne était en alerte mercredi au lendemain d’une attaque inhabituelle par un hélicoptère de police, qui aurait lancé des grenades sur la Cour suprême, dans ce pays agité par des manifestations ayant fait 76 morts en bientôt trois mois.
Le président socialiste Nicolas Maduro, dont les manifestants réclament le départ presque chaque jour depuis début avril, a dénoncé une « attaque terroriste » visant à fomenter un coup d’Etat, dans le cadre d’une campagne contre lui de la droite soutenue selon lui par les Etats-Unis.
Des vidéos et photos diffusées sur les réseaux sociaux mardi soir montrent un hélicoptère de la police scientifique en train de survoler Caracas. On entend au loin des détonations, sans voir clairement s’il lance effectivement des grenades – quatre selon M. Maduro – sur la Cour suprême.
Le pilote de l’hélicoptère, qui aurait été volé, a été identifié par le gouvernement comme Oscar Pérez, 36 ans.
Dans une vidéo, cet homme, qui se présente comme un enquêteur de la police scientifique mais aussi acteur de cinéma, lance un appel au chef de l’Etat: « Président Maduro, nous exigeons que tu démissionnes immédiatement (…) et que des élections générales soient convoquées ».
« Nous sommes une coalition entre fonctionnaires militaires, policiers et civils (…) contre ce gouvernement transitoire et criminel », affirme-t-il, le visage découvert et accompagné de quatre hommes masqués et vêtus de noir, deux d’entre eux portant des armes.
« Nous vous demandons de nous accompagner dans ce combat et de sortir dans la rue (…) Notre mission est de vivre au service du peuple », dit encore l’homme aux yeux clairs, qui avait joué en 2015 dans le film d’action « Mort suspendue » et était toujours recherché mercredi.
– Forte présence policière –
En réaction, le chef de l’Etat socialiste a annoncé avoir « activé toutes les Forces armées pour défendre l’ordre ». Mercredi, les alentours du palais présidentiel de Miraflores étaient gardés par une forte présence policière ainsi que par des blindés de l’armée.
Selon un communiqué de la présidence, quatre grenades « d’origine colombienne et de fabrication israélienne » ont été lancées sur le bâtiment de la Cour suprême et 15 coups de feu tirés contre le ministère de l’Intérieur. Le chef de l’État n’a pas fait état de victime ni de dégâts.
Selon M. Maduro, Oscar Pérez avait été le pilote de son ex-ministre de l’Intérieur et de la Justice, Miguel Rodriguez Torres, un général à la retraite qui a pris ses distances avec le gouvernement.
Le président a accusé ce général d’être lié à des préparatifs supposés de coup d’État à son encontre. Des accusations balayées mardi par l’intéressé, qui les a qualifiées de « sottises ».
Confronté à une vague de manifestations hostiles, dans un contexte de violente crise économique, Nicolas Maduro avait averti mardi que si le Venezuela « plongeait dans le chaos et la violence, nous irions au combat ».
« Ce qui n’aura pas pu se faire par les votes, nous le ferons avec les armes », a-t-il déclaré.
Il a en outre demandé à son homologue américain Donald Trump d' »arrêter la folie » de l’opposition qu’il soupçonne de s’être alliée avec Washington pour fomenter un coup d’Etat.
– L’opposition prudente –
La gravité de la situation au Venezuela a poussé mardi la France à réagir, via son ministère des Affaires étrangères qui « appelle à la cessation immédiate des actions violentes ».
« Nous continuons, avec nos partenaires européens, à donner la priorité à la mise en place rapide d’une médiation régionale crédible et constructive, qui ait la confiance du gouvernement et de l’opposition », a indiqué le ministère.
Mardi, les autorités vénézuéliennes avaient appelé la coalition d’opposition de la Table pour l’Unité démocratique (MUD), majoritaire au Parlement, et l’Eglise catholique à « condamner résolument ces événements et à se démarquer de la violence ».
Mais la MUD restait prudente mercredi.
« Nous allons analyser tout ce qui s’est passé », a déclaré à la presse Julio Borges, président du Parlement.
« Des gens disent que c’est un piège, d’autres disent que (cette attaque)est vraie », a-t-il dit. « Quoi que ce soit, c’est très grave. Tout cela indique la même chose: la situation est insoutenable au Venezuela ».
LNT avec Afp