WhatsApp Image 2025-05-07 at 11.01.07
Yassine Guerraoui, Directeur de la communication de Foundever Maroc

Tribune libre : Le BPO, moteur discret de la souveraineté économique du Maroc

Economie

Tribune libre : Le BPO, moteur discret de la souveraineté économique du Maroc

Par LNT
WhatsApp Image 2025-05-07 at 11.01.07
Yassine Guerraoui, Directeur de la communication de Foundever Maroc

Par Yassine Guerraoui, Directeur de la communication de Foundever Maroc

 

Alors que le Maroc s’emploie à renforcer sa compétitivité dans un monde régi par la technologie, la data et la réactivité opérationnelle, un levier discret mais stratégique mérite d’être réévalué à sa juste mesure, celui du BPO, ou Business Process Outsourcing. À l’heure où le Royaume bâtit une économie fondée sur le savoir et la valeur ajoutée, les activités d’externalisation apparaissent comme un maillon essentiel d’un modèle économique plus autonome, plus résilient et plus inséré dans les flux mondiaux.

Une industrie d’exportation à part entière

Avec plus de 100 000 emplois directs et des milliers d’emplois indirects, le BPO ne relève plus d’un simple segment d’appoint. C’est une industrie à part entière, dont la contribution dépasse largement le cadre des services téléphoniques ou du support client. Aujourd’hui, le secteur génère des revenus en devises, alimente la balance commerciale en prestations à haute valeur ajoutée, et positionne le Maroc comme un acteur de l’économie tertiaire internationale avec qui il faut compter.

Cette évolution s’inscrit dans une dynamique régionale. Face à la volatilité des chaînes d’approvisionnement industrielles et aux impératifs de souveraineté numérique, de nombreuses entreprises européennes se tournent vers des partenaires de proximité, culturellement et géographiquement compatibles, pour externaliser des fonctions stratégiques. Le Maroc, fort de son multilinguisme, de sa stabilité macroéconomique et de sa jeunesse qualifiée, s’affirme dans ce contexte comme une plateforme d’externalisation fiable, performante et évolutive.

Souveraineté numérique : un enjeu qui dépasse la technique

Le BPO participe aussi, de manière structurelle, à la consolidation de la souveraineté numérique du Royaume. Il permet la montée en compétence des talents dans des domaines sensibles – cybersécurité, gestion de la donnée, intelligence artificielle appliquée – tout en renforçant la capacité du pays à maîtriser les flux d’information stratégiques.

Ce n’est pas un hasard si le secteur attire des clients de plus en plus exigeants, issus de l’assurance, de la finance ou du e-commerce. Cette confiance témoigne d’un niveau de maturité et de conformité qui crédibilise le Maroc sur le marché global des services numériques. À terme, cette maîtrise technologique renforcera l’autonomie décisionnelle du pays face aux dépendances extérieures, notamment dans les domaines critiques de l’économie digitale.

Un levier d’emploi et de mobilité sociale

L’un des apports les plus tangibles du BPO réside dans sa capacité à offrir aux jeunes une porte d’entrée rapide vers l’emploi. Le secteur embauche massivement, forme, et responsabilise ses collaborateurs dès les premiers mois d’activité.

Il permet à une génération souvent confrontée à l’incertitude de bâtir des parcours solides, en valorisant des compétences transversales (relation client, rigueur opérationnelle, adaptabilité, outils numériques, soft skills) immédiatement mobilisables dans d’autres secteurs. Au-delà de l’emploi, c’est donc un levier de mobilité sociale, de structuration des parcours et d’autonomisation individuelle.

Mais pour que ce potentiel se réalise pleinement, encore faut-il continuer à faire évoluer le regard porté sur ces métiers. Trop souvent cantonné à des fonctions d’exécution, le BPO est en réalité une école de professionnalisation, un accélérateur de maturité professionnelle et un terrain de monté en maturité pour les jeunes diplômés.

Vers un modèle de compétence plus qu’un modèle de coût

Le BPO marocain vit une mutation rapide, d’un modèle historiquement tiré par les coûts, il évolue vers un modèle tiré par la compétence. Centres de contacts, centres d’expertise, hubs de pilotage multilingues, analystes data, responsables IA appliquée : les profils recrutés et les fonctions assurées n’ont plus rien à voir avec les représentations des débuts.

Cette transformation appelle un accompagnement stratégique. Il s’agit non seulement de renforcer la formation initiale et continue, mais aussi d’inscrire cette industrie dans les priorités industrielles nationales. L’intégration du BPO dans les feuilles de route sectorielles – numérique, emploi, export – est en soi un signal fort.

Une industrie à valoriser, un rôle à assumer

L’heure n’est plus à la  sous-évaluation du BPO. Dans un monde fracturé, polarisé entre innovation technologique et repli protectionniste, il offre une voie médiane : celle d’une économie ouverte mais ancrée, insérée mais souveraine.

Pour le Maroc, cette industrie constitue une réponse à la fois économique, sociale et géopolitique. Encore faut-il lui accorder la place qu’elle mérite dans les stratégies de développement. Car c’est en valorisant ce qui fonctionne, en structurant les écosystèmes existants, et en faisant confiance aux compétences locales que le pays  renforcera sa souveraineté économique et sociale.

 

Consultez librement toutes nos parutions hebdomadaires, nos hors-série et toutes les communications financières