Les Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance arabo-kurde soutenue par Washington, inspectent le barrage de Tabqa, le 12 mai 2017 © AFP/Archives DELIL SOULEIMAN
Les Forces démocratiques syriennes (FDS), une alliance arabo-kurde soutenue par Washington, sont en première ligne dans l’offensive contre Raqa, bastion du groupe Etat islamique (EI), mais leur implication a provoqué des tensions entre les Etats-Unis et la Turquie.
Les combattants des FDS se sont emparés le 10 mai de la ville stratégique de Tabqa et d’un barrage adjacent, une étape clé dans leur progression vers Raqa, capitale de facto de l’EI en Syrie en guerre.
Ankara considère la principale composante kurde des FDS comme affiliée au Parti des Travailleurs du Kurdistan (PKK), qu’elle classe comme « terroriste ».
– Que sont les FDS? –
Créées en octobre 2015 avec le soutien des Etats-Unis, les FDS étaient dès le départ dominées par les Unités de protection du peuple kurde (YPG), majoritaires face à la composante arabe.
Leur création est intervenue après que l’avancée territoriale des YPG dans des régions majoritairement arabes a suscité les inquiétudes à la fois des Arabes syriens et de la Turquie.
La milice kurde avait remporté une série de batailles contre l’EI avec le soutien de la coalition internationale dirigée par les Etats-Unis, comme la reprise en janvier 2015 de Kobané, ville frontalière avec la Turquie.
Comme dans une tentative pour calmer les inquiétudes de son allié au sein de l’Otan, Washington a créé les FDS « pour faciliter le recrutement de combattants arabes et séparer davantage le soutien américain du PKK », assure le centre de réflexion International Crisis Group dans un rapport publié en avril.
Mais les rangs des FDS, qui compteraient entre 25.000 et 45.000 combattants, restent dominés par les YPG, selon les analystes.
Depuis leur formation, les FDS ont remporté plusieurs victoires contre l’EI et ont annoncé en novembre 2016 le début de l’opération pour reprendre Raqa, sur lequel ils resserrent l’étau.
– Quel soutien américain? –
Avec la formation des FDS, Washington fournit un soutien plus direct aux combattants anti-EI sur le terrain en Syrie.
Mais alors que l’administration américaine affirmait jusque-là n’équiper que les composantes arabes de l’alliance, elle a annoncé début mai qu’elle armerait les milices kurdes YPG en vue de la bataille de Raqa.
Cette annonce inédite a suscité la colère d’Ankara qui a appelé Washington à revenir sur sa décision.
La Turquie est d’autant plus excédée que les YPG sont appelées à jouer le premier rôle dans l’offensive contre Raqa, alors qu’Ankara semble en être tenu à l’écart.
Des responsables américains et des FDS assurent qu’une fois l’EI chassé, Raqa sera administrée par un conseil civil composé d’habitants.
Le sujet sera sans doute abordé mardi à Washington lorsque le président turc Recep Tayyip Erdogan sera reçu par son homologue américain Donald Trump.
– Comment réagit la Turquie? –
L’inquiétude d’Ankara vis-à-vis des YPG la pousse à lancer sa propre opération militaire en Syrie en aôut 2016, baptisée « Bouclier de l’Euphrate ».
L’opération visait à la fois l’EI et les milices kurdes, notamment pour empêcher les YPG de contrôler une bande de territoire continue le long de la frontière turco-syrienne.
Selon des experts, Ankara manque d’options pour empêcher les FDS de continuer à mener la lutte contre l’EI.
« La Turquie a peu d’options, à l’exception d’une escalade », assure Aaron Stein, membre résident du Centre Rafic Hariri pour le Moyen-Orient. « Ils peuvent envahir Tall Abyad (sur la frontière turco-syrienne) ou bombarder les YPG », selon lui.
« Toutes ces options pourraient ralentir l’opération sur Raqa, mais Ankara serait alors vue comme un ralentisseur de la campagne contre l’EI. Personne ne veut être dans cette position. »
LNT avec AFP