L'envoyé spécial de l'ONU pour la Syrie, Staffan de Mistura (C), le 19 mai 2017 à Genève © POOL/AFP Fabrice COFFRINI
Les pourparlers de paix sur la Syrie menés par l’ONU à Genève s’achèvent vendredi sans avancée, une fois de plus, et sur fond de regain de tensions après un bombardement américain la veille sur des forces soutenant le régime près de la frontière jordanienne.
L’émissaire de l’ONU sur la Syrie, Staffan de Mistura, doit boucler cette semaine de discussions par une conférence de presse. Il s’est entretenu dans la matinée avec la délégation de Damas, dirigée par l’ambassadeur aux Nations unies Bachar al-Jaafari, et doit rencontrer dans l’après-midi celle du Haut Comité des Négociations (HCN) qui réunit l’opposition.
Dans la nuit de jeudi à vendredi, huit groupes rebelles ont annoncé suspendre leur participation au HCN pour protester contre le processus de décision pendant les discussions. Mais vendredi matin, le HCN a annoncé que sa délégation était au complet.
Parallèlement, les tensions grandissaient au lendemain du bombardement par la coalition internationale que dirigent les Etats-Unis d’un convoi lié au régime syrien près de la frontière jordanienne six semaines après les premières frappes ordonnées par le gouvernement Trump en Syrie.
La Syrie a condamné cette « agression de la coalition », tandis que le vice-ministre russe des Affaires étrangères, Guennadi Gatilov, cité à Genève par les agences de presse russes, a dénoncé un bombardement « inacceptable ».
S’adressant aux médias à Genève, M. Jaafari a parlé d' »un massacre ».
La Syrie n’a pas dit combien il y avait eu de morts.
Selon l’Observatoire syrien des droits de l’homme, huit personnes « pour la plupart non-syriennes » ont été tuées dans cette frappe.
Un porte-parole du HCN, Yehya al-Aridi, a pour sa part jugé qu’il s’agissait d’une « action robuste contre les forces étrangères qui ont transformé la Syrie en un grand champ de bataille ».
Ce bombardement a visé un convoi de « forces » soutenant le régime de Damas, selon un porte-parole militaire de la coalition antijihadiste, le colonel américain Ryan Dillon. Un autre responsable américain a dit qu’il s’agissait « probablement » de milices chiites, sans être plus précis.
– Groupe d’experts –
En six ans, cette guerre dévastatrice a causé la mort de plus de 320.000 personnes, chassé plus de la moitié des Syriens de leurs foyers et détruit l’économie et les infrastructures de ce pays du Proche-Orient.
Elle a également été émaillée d’atrocités : massacres de civils, usage d’armes chimiques… Dernière horreur en date : les Etats-Unis ont accusé cette semaine le régime syrien du président Bachar al-Assad d’avoir brûlé dans un « crématorium » une partie des milliers de prisonniers assassinés ces dernières années.
Les efforts en vue de mettre fin à la guerre sont désormais déployés sur deux circuits parallèles : le processus politique officiel se déroule au siège de l’ONU à Genève, cependant que d’autres pourparlers axés sur la sécurité ont lieu depuis janvier à Astana, la capitale du Kazakhstan, à l’initiative de la Turquie, soutien des rebelles, et de la Russie et l’Iran, alliés du régime syrien.
Le 4 mai, ces trois pays ont signé un important accord qui prévoit de créer des « zones de désescalade » en Syrie afin de limiter l’effusion de sang.
A Genève, cinq séries de pourparlers indirects – les deux délégations refusant de se parler face à face – ont déjà été organisées depuis 2016 sur les bords du lac Léman par M. De Mistura, sans résultat, les discussions ayant achoppé à chaque fois sur le sort réservé au président syrien dont l’opposition exige le départ.
En février, les parties en présence ont réussi à adopter un ordre du jour comprenant quatre sujets de discussion : la lutte contre le terrorisme, la gouvernance (terme flou pour évoquer une transition politique), une nouvelle Constitution et l’organisation d’élections. Aucun de ces sujets n’a été discuté cette semaine, a assuré M. Jaafari.
Seule avancée tangible obtenue cette semaine : des entretiens de fonctionnaires de l’ONU avec des experts du gouvernement d’une part et de l’opposition d’autre part pour aborder « des questions juridiques et constitutionnelles en lien avec les pourparlers intrasyriens ».
« Il y a eu beaucoup de discussions sur Astana dernièrement, mais c’est en fait ici (à Genève) que se joue le règlement du conflit syrien », a assuré un diplomate occidental.
LNT avec AFP