Une affiche électorale contre la réforme de la retraite suisse, le 24 septembre 2017 dans une rue de Genève © AFP Fabrice COFFRINI
Les Suisses ont rejeté la réforme de la retraite voulue par leur gouvernement et prévoyant un an de travail en plus pour les femmes et des cotisations plus élevées, selon les résultats définitifs d’une votation organisée dimanche.
En conséquence de ce vote, organisé conformément au système de démocratie directe en vigueur en Suisse, les cotisations retraites ne devraient pas augmenter, et les femmes ne seront pas obligées de travailler jusqu’à 65 ans pour toucher une retraite à taux plein.
Selon le système actuel en vigueur en Suisse, l’âge légal de la retraite pour les hommes est de 65 ans et pour les femmes de 64 ans. Le différentiel entre les deux s’explique par le fait qu’en Suisse les femmes sont généralement moins bien payées que les hommes et qu’en conséquence elles peuvent partir en retraite à taux plein un an avant les hommes.
Le résultat du vote de dimanche qui s’annonçait très serré, est un revers pour le gouvernement, et notamment le ministre de la santé, Alain Berset (socialiste), qui a élaboré cette réforme depuis plusieurs années.
Au final, le projet de réforme a été rejeté à 52,7% des votants, et son financement via un relèvement de la TVA par la majorité des cantons suisses.
Aucun canton de Suisse alémanique, à l’exception de ceux de Bâle-Ville et de Zurich, n’a dit « oui » à la réforme, la première depuis 20 ans, et qui avait pour but de pérenniser le financement des retraites d’une population vieillissante.
La Suisse romande a soutenu en majorité la réforme et son financement, à l’exception des cantons de Genève et de Vaud.
Les Suisses ont en revanche plébiscité le vote sur la question de la sécurité alimentaire, qui faisait également partie des sujets à l’ordre du jour des votations de dimanche.
Il s’agissait concrètement d’inscrire la sécurité alimentaire dans la constitution suisse, à la demande du monde agricole, qui voulait sécuriser ainsi sa filière.
Tous les cantons ont accepté le nouvel article constitutionnel.
Concernant la réforme de la retraite, elle était surtout soutenue par les socialistes et les centristes.
En revanche, elle était combattue par les libéraux et la droite, ainsi que par la gauche, mais pas pour les mêmes raisons.
Les premiers estimaient qu’elle coûtait trop cher aux finances publiques avec la hausse de l’assurance de base et les seconds qu’elle était injuste pour les femmes, obligées de travailler un an de plus.
Si les femmes suisses ont dit non à l’augmentation de l’âge de leur retraite, c’est qu’elles refusent de faire ce sacrifice sans compensation, a réagi dimanche Tamara Funiciello, présidente de la JSS (jeunesse socialiste suisse).
En outre, la politicienne estime qu’à « l’ère de la numérisation, il ne fait pas sens d’augmenter le temps de travail de la moitié de la population » et il serait plus « logique de baisser l’âge de la retraite ».
Pour sa part, l’Association suisse des institutions de prévoyance (ASIP) estime que la Suisse n’échappera pas à une réforme de son système de retraite, et qu’il faut tout de suite remettre un nouveau projet sur les rails.
« Le +non+ de dimanche ne doit pas être vu comme un +non+ de principe à une réforme de la prévoyance vieillesse », a souligné l’ASIP dans un communiqué. « Il faut à tout prix une réforme, qui doit résoudre les problèmes les plus urgents », notamment celui des des retraites complémentaires appelées à baisser.
Le relèvement de l’âge de la retraite pour les femmes, avait aussi été critiqué par la « gauche » de la gauche.
Ainsi, dans une réaction, le Parti suisse du Travail (gauche) s’est déclaré « ravi » par ce refus de la population.
« L’augmentation de l’âge de la retraite des femmes », ainsi que « la hausse des cotisations retraites » et la baisse des retraites complémentaires « auraient été un prix trop important, qui aurait dû être payé par les travailleuses et travailleurs en Suisse ».
Le parti milite pour une retraite minimum de 4.000 CHF par mois d’ici 10 ans, avec la fusion des retraites de base et complémentaire.
De son côté, l’organisation économique USAM (Union suisse des arts et métiers) s’est également félicitée de ce « non », mais pas pour les mêmes raisons. « En disant non à la réforme », le peuple suisse « a rejeté une fois de plus les utopies de la gauche en matière d’assurances sociales », a indiqué l’USAM, en réclamant pour les retraites de base et complémentaire « deux trains de réforme allégés en vue d’assurer l’équilibre financier à moyen terme ».
Selon l’USAM, il « sera inévitable, à plus ou moins long terme, de relever progressivement l’âge de la retraite ».
LNT avec AFP