L’endettement structurel depuis la crise de 2008, n’a cessé d’augmenter au niveau mondial comme en atteste une évaluation de l’Institut of International Finance, IIF, pour atteindre 230 000 milliards d’euros en 2019 !
Ce constat concerne autant les pays les plus riches qui sont en tête de liste comme les pays occidentaux et surtout les États-Unis, que la Chine, ainsi que tous les autres pays.
L’endettement a été érigé en solution à la crise économique en 2008, encouragé par la politique dite de «Quantitative Easing» des banques centrales, telles la BCE et la FED.
Encore en vigueur aujourd’hui, il consiste à racheter les dettes publiques pour permettre aux États d’en émettre de nouvelles et de continuer à s’endetter pour financer la crise.
C’est ainsi que tous les ratios de limitation de la dette publique ne sont plus applicables, notamment ceux européens des Accords de Maastricht qui imposaient une limite d’endettement à 60% du PIB comme plafond.
Depuis la crise financière de 2008, le taux d’endettement de nombre de pays dans le monde, à commencer par les riches, a atteint, voire dépassé les 100% du PIB.
Et avec la crise pandémique du Covid-19, et l’arrêt de l’activité économique qu’elle a engendré, l’endettement a continué à s’imposer comme la seule et unique solution de tous les pays pour transcender cette situation inédite parce que mondiale et inextricable.
Le FMI, qui imposait aux pays en voie de développement une surveillance stricte d’un de leur fondamentaux, le déficit budgétaire, a été contraint, face à cette réalité, non seulement de reconnaître l’endettement comme la solution du moment, mais également a promis de les accompagner par des garanties.
Le Maroc, considéré comme un bon élève du FMI n’est pas sorti du lot.
En effet, la crise sanitaire du Covid-19 a doublement affecté l’économie marocaine !
D’une part, l’effet du choc exogène lié à la récession de l’économie mondiale a affecté les secteurs et activités orientés vers l’extérieur, comme les exportations des métiers mondiaux du Maroc, les recettes touristiques, les transferts des MRE et les investissements directs étrangers.
Et, d’autre part, un choc interne s’est produit avec l’arrêt temporaire des activités orientées vers le marché intérieur, entrainant une récession de l’économie marocaine que notre pays n’avait plus connue depuis la fin des années quatre-vingt-dix.
Face à une telle crise, l’État, à travers le ministère des Finances, s’est attelé à la préservation des fondamentaux de l’économie et la consolidation du budget public.
Il s’agissait de mobiliser les ressources nécessaires et en prioriser l’utilisation, en faveur de la relance de l’économie nationale et du citoyen marocain.
Le rôle de l’État est devenu alors plus que jamais d’une grande importance, alors que l’on sait que ses moyens budgétaires, qui sont connus pour être limités, le sont encore plus aujourd’hui du fait de l’impact de la crise économique sur les recettes fiscales de son budget.
Les recettes fiscales en ont pâti grandement notamment celles au titre de la TVA qui ont connu un recul consécutif au ralentissement de la consommation finale et à la baisse des importations.
Le produit de l’IS, même s’il est indexé sur les résultats de l’année passée, a également été impacté du fait du recours de nombre de sociétés à la suspension du paiement des acomptes en liaison avec la dégradation de leurs résultats par rapport à l’exercice précédent.
Il en a été de même des recettes au titre de l’IR et des droits d’enregistrement et de timbre qui ont également pâti de la dégradation de l’emploi, de la régression des transactions immobilières et de l’activité d’une manière générale
Mais la responsabilité de l’État a porté aussi et surtout sur le maintien des réserves en devises de notre pays, qui se sont rapidement détériorées à la suite de l’arrêt du secteur du tourisme et les dommages causés aux secteurs exportateurs, la baisse des transferts des marocains résidents à l’étrangers (MRE) et des investissements directs étrangers (IDE).
D’où la décision de dépassement du seuil de la dette extérieure défini dans le cadre de la Loi de Finances de 2020, qui va permettre au Trésor de sortir de nouveau, dès ce mois de juillet, sur le marché international en devises pour renflouer la réserve de change.
Ceci, en sus du récent tirage de la Ligne de Précaution et de Liquidité du FMI, d’un montant de 3 milliards de dollars directement versée à Bank Al-Maghrib qui gère la réserve en question.
Cette facilité est remboursable en huit trimestrialités dans cinq ans, avec une période de grâce de 3 ans, à un taux moyen d’utilisation de la LPL qui ressort à près de 1,5% par an.
A ce sujet, il est intéressant de rappeler que, conformément aux statuts du FMI, les crédits de cette institution peuvent être utilisés selon deux options.
Dans la première option, le crédit finance exclusivement la balance des paiements et le renforcement des réserves de change.
Dans la 2è option, le FMI tolère également l’utilisation de la contrevaleur en monnaie locale de ces crédits pour financer le déficit budgétaire, étant donné la relation de causalité qui existe entre les deux déficits, interne et externe.
Toutefois, dans les deux options, le recours aux crédits du FMI présuppose l’existence d’un problème de balance des paiements ou de réserves.
Cependant, contrairement aux années quatre-vingt où les possibilités de financement du Trésor étaient limitées, aujourd’hui, celui-ci peut se financer à travers plusieurs canaux, notamment le marché des bons du Trésor, le marché financier international et les financements extérieurs bilatéraux et multilatéraux liés à des réformes ou projets d’infrastructure.
Mais aussi, après le récent tirage sur la LPL, le Maroc a le droit de demander immédiatement le renouvellement de cette ligne ainsi que de négocier l’obtention de la facilité modulable qui a l’avantage d’être plus flexible…
In fine, pour permettre à notre économie de rebondir et de saisir toutes les opportunités dès l’apparition des premiers signes de la reprise économique, l’utilisation de la dette publique s’est imposée comme l’unique solution de financement de cet objectif.
Et donc, l’engagement du Maroc de ramener la dette publique à moyen terme à 60% du PIB est mis entre parenthèse, comme c’est le cas pour tous les pays du monde…
Afifa Dassouli