AFPDes personnes déplacées fuyant Wad Madani, dans l'Etat d'al-Jazira, arrivent à Gedaref, le 19 décembre 2023 au Soudan
« Les Forces de soutien rapide (FSR) ont tout pillé: voitures, camions et tracteurs », se lamente un habitant d’un village de l’Etat d’al-Jazira sous couvert d’anonymat par crainte de représailles émanant des paramilitaires en pleine percée vers le sud au Soudan en guerre.
Les villageois d’Al-Jazira retiennent leur souffle à chaque fois qu’ils entendent le vrombissement du moteur d’une voiture ou d’une moto tant ils craignent que soient nichés à leur bord les redoutés paramilitaires des FSR.
« Samedi, sept individus armés de mitrailleuses et portant l’uniforme des FSR ont frappé à ma porte », affirme Abdine à l’AFP qui ne souhaite pas révéler son nom de famille pour des raisons de sécurité.
Ils lui ont posé des questions sur la voiture stationnée dans son garage avant de « s’en emparer leurs armes pointées vers nous », se désole cet habitant de Hasaheisa, une ville située à 50 kilomètres au nord du chef-lieu d’Al-Jazira, Wad Madani.
La guerre sanglante qui oppose depuis huit mois l’armée soudanaise aux paramilitaires des FSR à Khartoum, avaient poussé un demi-million de personnes à trouver refuge plus au sud, dans cet Etat agricole jusqu’à récemment épargné par les violences.
Mais depuis peu, les paramilitaires, qui contrôlent la majorité de la capitale, ont avancé le long de l’autoroute qui relie la capitale à Wad Madani prenant village après village et terrorisant leurs habitants.
Le 15 décembre, ils ont attaqué Wad Madani, forçant plus de 300.000 personnes à fuir de nouveau, à l’intérieur de l’Etat d’Al-Jazira mais aussi vers les Etats voisins de Sennar et de Gedaref, d’après l’ONU.
Depuis, les paramilitaires continuent leur implacable descente vers le sud.
Samedi, ils étaient aperçus « à 15 kilomètres au nord de Sennar », 140 kilomètres au sud de Wad Madani ont rapporté des témoins à l’AFP.
– Marchés pillés et tirs à l’aveuglette –
« Des avions de l’armée ont bombardé des rassemblements des Forces de soutien rapide au nord de la ville, provoquant la panique parmi les habitants », ont rapporté d’autres témoins.
Depuis le début surprise du conflit le 15 avril, l’armée dirigée par le général Abdel Fattah al-Burhane joue principalement de son atout aérien : elle est la seule à avoir des avions de combat.
Les FSR du général Mohamed Hamdan Daglo, en revanche, privilégient des troupes mobiles juchées sur des pick-up.
Partout où ils passent, monte la crainte parmi les femmes et les jeunes filles de subir « des violences sexuelles, une menace récurrente » au Soudan, affirme l’ONG Save the Children.
Sur le marché de Hasaheisa, les portes des échoppes sont ouvertes et les marchandises qui n’intéressaient pas les pillards sont répandues au sol, a constaté un journaliste de l’AFP.
« Les FSR sont elles venues nous combattre nous, les citoyens ou bien combattre l’armée? », s’interroge auprès de l’AFP, Omar Hussein, 42 ans, alors que les boutiques et les véhicules appartenant à sa famille ont été pillés ou ravagés.
Sur un autre marché, celui de Tamboul, à mi-chemin entre Khartoum et Wad Madani, les paramilitaires ont fondu sur le marché en tirant à l’aveuglette, ont rapporté des témoins.
LNT avec AFP