Le marché boursier serait-il devenu de nouveau, attractif ? A cette question et pour ne pas abuser ceux qui s’en réjouissent se rappelant le bon vieux des gains faciles sur ce marché, il faut des réponses techniques et statistiques.
En effet, en ce début de 2017, on peut faire le constat que les indices boursiers et le MASI en particulier ont affiché un rendement de 10 % pour le seul mois de janvier. Même s’il s’est déprécié à 6% en ce début de février, on peut faire le constat que la bourse continue à performer après une année 2016 flamboyante.
Mais, pour être rassurante toutefois, il faudrait que cette performance s’étale sur l’année. Et ce pour remarquer qu’en 2016, ce n’est qu’à partir de novembre et décembre que le marché financier a explosé sa performance, portant les indices boursiers à plus de 30%.
Mieux encore, si l’on intègre les dividendes comme le fait la Bourse avec le MASI rentabilité, ce taux de rendement boursier passe à 37%.
Une hausse très conséquente
Il s’agit donc d’analyser voire expliquer les raisons d’une hausse aussi spectaculaire. Car, la hauteur de ce pourcentage a semé des doutes sur sa véracité et sa pertinence.
Or, pour lui donner une certaine crédibilité, il suffit de se baser sur les chiffres qui la justifient. L’importance des volumes traités sur le marché financier en deux mois, soit plus de 3 milliards de dirhams, conforte en soi la hausse des cours. Ceux-ci contrastent avec une moyenne de 50 millions jour de l’année 2016.
Mais s’ils traduisent l’engouement pour le marché et le retour des épargnants et des investisseurs, ils ne peuvent expliquer à eux seuls les rendements. Pour ce faire, il faut juger les fondamentaux des valeurs cotées.
La lecture la plus crédible est celle des gestionnaires de fonds qui investissent en fonction de l’intérêt de leurs clients et en fonction de leurs ordres exprimés sous forme de souscriptions.
C’est pourquoi il nous a suffi de faire le tour de la profession pour comprendre pourquoi le rallye qui a caractérisé la Bourse à la fin de 2016, se justifiait.
Tout d’abord, il faut rappeler que, comme le montre le MASI rentabilité, en 2016 non seulement les dividendes ont été élevés, mais ils ont été confortés par la distribution de dividendes exceptionnels. Ceux-ci sont venus améliorer encore plus les rendements de dividende et de ce fait, celui de l’indice en question.
Puis, les rendements boursiers trouvent leurs sources dans la publication des résultats des sociétés cotées à fin juin, lesquels ont été particulièrement bons par rapport à l’année précédente.
En effet, la masse bénéficiaire des sociétés cotées s’est appréciée de 14%, remettant la Bourse en lumière aux yeux des investisseurs et des épargnants.
Sachant que ces résultats n’ont été publiés qu’à la fin de septembre, les réactions d’achats en bourse ne se sont concrétisées qu’au 4ème trimestre de l’année dernière.
Des performances dans tous les secteurs
Nombre d’analyses des sociétés de bourse sont venus appuyer l’exception de ces résultats secteur par secteur.
En ce qui concerne les banques, un constat a été établi, celui que le coût du risque, qui avait plombé les résultats ces dernières années, a nettement diminué alors que la hauteur de provisionnement cumulé, s’affiche à un haut niveau.
Ainsi, les banques dégagent dorénavant une capacité à générer des résultats futurs issus du « gras » qu’elles ont précédemment constitué.
Pour les immobilières, Alliances, passée d’un résultat négatif d’un milliard à l’équilibre, devient un non sujet. Elle ne pèsera plus à la baisse sur la masse bénéficiaire des sociétés cotées.
Idem pour Samir, valorisée dans les portefeuilles actions à zéro après avoir pesé très lourdement sur les résultats précédents.
Quant au groupe Addoha, il a fait de son plan « Génération Cash » une réelle réussite en démontrant ses capacités à régénérer son activité. Pour leur part, les cimenteries sont justes résilientes, même si les ventes de ciment n’ont pas augmenté en 2016, du fait de l’ouverture à l’export et de la fusion de Lafarge Holcim pour une meilleure concentration du marché.
Il s’agit d’un marché de 15 millions de tonnes de ciment vendues annuellement, qu’il vente ou qu’il pleuve, et c’est déjà important de s’y maintenir.
On peut étendre les bonnes nouvelles à d’autres valeurs cotées comme IAM, Delta Holding et d’autres encore.
Mais, « le plus du plus », est venu des dernières sociétés cotées en bourse que sont Total et Marsa, lesquelles ont fortement contribué à la performance du marché.
Elles-mêmes ont réalisé une performance boursière extraordinaire.
La valeur Total, parce qu’elle a fait l’objet d’anticipation sur la libéralisation des marges des pétroliers, corroborée par de bons résultats au premier semestre et la distribution d’un bon dividende 2015, a été très demandée. Cette valeur a notamment contribué à attirer les particuliers sur le marché boursier.
C’est un élément très important parce que pour faire un marché il faut, conjointement aux investisseurs et autres institutionnels, des spéculateurs petits porteurs qui achètent et vendent au jour le jour.
Le come-back des épargnants
Ces bonnes nouvelles se sont ainsi tout simplement concrétisées par des souscriptions aux OPCVM Actions et Diversifiées, longtemps boudées par le grand public.
En effet, les chiffres de la profession ont explosé à la fin de 2016. Les encours moyens des fonds actions et diversifiés qui affichaient au courant de 2016 un volume qui évoluait en dents de scie entre 12 et 15 milliards de dirhams, a fini l’année à 19 milliards de dirhams avec une progression de 11% entre novembre et décembre derniers.
Les encours moyens et fin de période des fonds actions et diversifiés, ont suivi le même trend, montrant encore mieux l’évolution disproportionnée du mois de décembre 2016.
C’est ainsi que d’une quinzaine de milliards tout au long de l’année, ils sont passés à 17 MMDHS en Octobre et novembre pour finir à 19,5 MMDHS en décembre.
Enfin, les souscriptions des fonds actions et diversifiés sont tout simplement passés de 1,1 milliard de dirhams en octobre, à 2,7 milliards de dirhams en décembre 2016.
Par contre, il faut savoir que les institutionnels qui ont tendance à souscrire dans leurs propres fonds dédiés sont intervenus massivement dans les fonds grand public.
Donc, si la confiance en la Bourse est revenue, c’est bien parce que l’on est moins préoccupé par la santé des sociétés cotées.
Actions versus obligations
Par ailleurs, si le PER du marché actions est à 20, donc un peu cher, les investisseurs l’apprécient également par rapport à une remontée des taux qui se profile en ce début de 2017, menaçant les rendements obligataires.
Il semblerait, en effet, que les actifs obligataires sont sur une performance négative depuis le début de l’année, sans présager de ce qui va se passer tout au long de 2017.
Enfin, l’ultime argument explicatif des mouvements massifs d’achats en bourse réside dans le fait que les rendements actions et obligations ont parallèlement bien performé en 2016.
Car les taux d’intérêt ont continué à baisser l’an dernier et donc l’année a été aussi un bon cru pour le marché obligataire avec un rendement moyen qui a atteint 5 ou 6%.
En effet, la baisse du taux directeur d’un quart de point, à 2,25%, en mars, a orchestré une baisse des taux. Ceux qui étaient investis en Bons du Trésor particulièrement ont amélioré leur performance en capital et coupons compris.
Les investisseurs semblent donc avoir voulu capitaliser sur les performances de 2016 et commencer l’année avec une réallocation de leurs actifs. Ils ont transformé les Fonds monétaires en actions et préparé une année 2017 en espérant tout de même que le comportement des résultats des sociétés cotées initié au premier semestre se confirme pour toute l’année. Car les perspectives de 2017 ne sont pas claires !
D’autant que ceux qui reviennent en bourse acceptent de baisser leur prime de risque et donc de moins gagner sur le marché actions.
Et il ne faut pas oublier que l’on est dans un marché fermé où les investisseurs n’ont pas beaucoup d’alternatives ni d’opportunités d’arbitrage.
Ils naviguent entre les produits obligataires et les actions, comparant les taux des premiers au rendement du dividende des secondes, qui varient entre 4% et 6% en 2016.
S’ils peuvent, de surcroît, compter sur une performance boursière, ce n’est pas de refus ! Mais, leur comportement se clarifiera davantage après la publication des résultats annuels des sociétés cotées à fin mars prochain, surtout s’ils confortent leur croissance du premier semestre 2016…
Afifa Dassouli