Le Premier ministre espagnol Pedro Sanchez répond à la presse, après avoir voté à Madrid pour les élections législatives, le 28 avril 2019 © AFP JAVIER SORIANO
Les Espagnols ont commencé à voter dimanche dans des législatives tendues où le chef du gouvernement socialiste, en tête des sondages, met en garde contre la résurgence de l’extrême droite plus de 40 ans après la mort du dictateur Francisco Franco.
Le Premier ministre socialiste sortant Pedro Sanchez est donné gagnant dans les sondages mais sans la majorité absolue, ce qui obligera tous les partis à chercher à former des coalitions, avec un parlement plus fragmenté que jamais et polarisé par la tentative de sécession de la Catalogne en 2017.
Le parti ultranationaliste Vox est la surprise annoncée de ces troisièmes législatives en trois ans et demi. Marginal il y a à peine six mois, il a créé un séisme politique en recueillant près de 11% des suffrages lors d’élections dans la région méridionale d’Andalousie.
Vox pourrait faire une entrée en force à la chambre des députés, avec plus de 10% des voix et une trentaine de sièges sur 350 selon les sondages, dans un pays où l’extrême droite était absente du paysage depuis la mort de Franco en 1975. Les Espagnols renouvellent aussi dimanche une grande partie du Sénat.
Les bureaux de vote ont ouvert à 09H00 (07H00 GMT) et fermeront à 20H00 (18H00 GMT) avant l’annonce des résultats dans la soirée.
Pedro Sanchez, arrivé au pouvoir en juin à la faveur d’une motion de censure contre le conservateur Mariano Rajoy (Parti Populaire, PP), a mis en garde contre une vague d’extrême droite en Espagne comme en Finlande où le parti des Vrais Finlandais est arrivé deuxième du scrutin mi-avril.
Selon les enquêtes d’opinion, les scores du PP, des libéraux de Ciudadanos et de Vox ne leur permettraient toutefois pas de constituer une majorité, comme celle qui leur a permis de chasser les socialistes du pouvoir dans leur fief d’Andalousie en début d’année.
Mais « il y a un risque réel, certain » que Vox fasse beaucoup mieux que ne le disent les sondages et qu’une majorité de droite puisse se former avec l’appui de l’extrême droite, a lancé M. Sanchez vendredi.
Le patron du PP, Pablo Casado, qui a mené une campagne très agressive contre M. Sanchez en le traitant de « cheval de Troie » des nationalistes catalans et basques, a d’ailleurs ouvert pour la première fois la porte vendredi à une participation de Vox à un éventuel gouvernement de droite.
Ce parti au discours anti-féministe et anti-immigration, fondé par d’anciens membres du PP, a prospéré en particulier en prônant la manière forte contre les séparatistes en Catalogne dont il veut interdire les partis.
Dimanche, « nous allons choisir entre l’anti-Espagne ou l’Espagne vivante », a martelé vendredi le leader de Vox Santiago Abascal, soutenu par Marine Le Pen en France ou par Matteo Salvini de la Ligue en Italie.
Se méfiant des médias traditionnels, Vox a fait campagne massivement sur les réseaux sociaux, s’inspirant de la stratégie du président philippin Rodrigo Duterte, de l’américain Donald Trump ou du brésilien Jair Bolsonaro.
– Intenses tractations –
Avec un paysage politique toujours plus fragmenté, l’Espagne se destine en tout état de cause à d’intenses tractations pour pouvoir former un gouvernement.
Pedro Sanchez ne devrait obtenir que 120-130 sièges selon les sondages, loin de la majorité absolue de 176.
Il sera donc contraint de nouer des alliances avec la gauche radicale de Podemos, en difficulté, et des partis régionalistes dont, a priori, les indépendantistes catalans qui avaient soutenu son arrivée au pouvoir en juin.
Mais le socialiste préférerait éviter d’avoir de nouveau besoin de ces derniers: la droite n’a cessé de l’accuser d’avoir pactisé avec les « ennemis de l’Espagne » et ce sont ces mêmes séparatistes qui l’ont contraint à convoquer ces élections anticipées en refusant de voter son budget.
« L’Espagne vote dimanche divisée et dans une grande incertitude », titre dimanche El Pais, le plus grand journal d’Espagne, proche des socialistes. A droite, le journal ABC affirme dans un éditorial que « les Espagnols doivent choisi enre un candidat prêt à pactiser avec les séparatistes et ceux qui veulent défendre l’unité de la nation ».
LNT avec AFP