Réunion en visioconférence du président chinois Xi Jinping, du président du conseil européen Charles Michel, de la présidente de la Commission Ursula von der Leyen et de la chancelière allemande Angela Merkel, le 14 septembre 2020 © POOL/AFP YVES HERMAN
Avancer dans les négociations sur les investissements et le commerce malgré des tensions croissantes, notamment sur Hong Kong ou Huawei: une vidéoconférence aux forts enjeux économiques et politiques a commencé lundi entre les chefs de l’UE, la chancelière allemande et le président chinois.
Ce devait être un grand moment des six mois de la présidence allemande de l’UE: un sommet à Leipzig (est) avec les dirigeants des 27 pays de l’UE et leur homologue chinois.
Mais en raison de la pandémie, la rencontre, désormais virtuelle, se tient en format réduit: le chef du Conseil européen (qui représente les 27 de l’UE) Charles Michel, la présidente de la Commission européenne Ursula von der Leyen, la chancelière allemande Angela Merkel et le président chinois Xi Jinping.
Au menu des discussions, qui ont débuté peu après 14H00 (12H00 GMT) selon un porte-parole: l’épineux accord sino-européen sur les investissements, dont la conclusion d’ici la fin de l’année est jugée « possible » par Pékin.
Les Européens souhaitent que leurs entreprises bénéficient en Chine des mêmes conditions que celles offertes aux firmes chinoises dans l’UE.
La tâche s’annonce délicate: « On espère s’entendre lundi sur une feuille de route pour aplanir nos différends », mais « même si l’objectif politique est d’accélérer les négociations et de conclure d’ici fin 2020, on acceptera un accord seulement s’il vaut le coup », insiste un responsable européen sous couvert d’anonymat.
Pékin a déjà quelque peu refroidi l’ambiance en interdisant samedi toute importation de porc allemand en Chine –le plus grand marché de l’Allemagne hors UE– en raison d’un cas de peste porcine dans le Brandebourg (est), un coup dur pour Mme Merkel.
– « Rival stratégique » –
Autre dossier sur la table, le climat: alors que l’UE se donne un objectif de neutralité carbone pour 2050, les Européens veulent pousser Pékin à muscler ses ambitions en visant une neutralité carbone en 2060, un pic d’émissions de CO2 dès 2025 et en cessant la construction de centrales à charbon.
Cette réunion intervient alors que les relations ne cessent de se détériorer entre Chine et Etats-Unis sur fond de guerre commerciale et diplomatique croissante.
Prise entre ces deux feux, « l’UE se montre inflexible sur ses propres intérêts et ses valeurs, mais tient à coopérer avec la Chine. Il est essentiel que l’UE ne devienne pas un champ de bataille de ces tensions, qu’elle soit un élément stabilisateur », martèle le responsable européen qui a requis l’anonymat.
Bruxelles joue les équilibristes, considérant Pékin à la fois comme partenaire incontournable et comme « rival stratégique »: « Il est crucial de parler à la Chine, tout en maintenant valeurs et intérêts de l’UE. L’heure est venue d’actions concrètes pour résoudre (nos) déséquilibres », a twitté Charles Michel lundi.
Des eurodéputés restent particulièrement vigilants: « l’UE ne peut pas être un partenaire au sens traditionnel avec un pays dont les dirigeants méprisent leurs obligations internationales (…) Une rivalité systématique est devenue le paradigme prépondérant de notre relation », a averti l’eurodéputé polonais Radosław Sikorski dans un communiqué du PPE (droite).
Si les Etats-Unis mettent la pression sur les Européens pour qu’ils excluent le géant chinois Huawei des futurs réseaux 5G, les 27 restent cependant divisés sur la question.
Bruxelles devrait par ailleurs exprimer lundi à Xi ses préoccupations sur Hong Kong, où l’application d’une nouvelle loi sécuritaire constitue selon les Européens une attaque contre les libertés de ce territoire semi-autonome. Les 27 ont déjà décidé de limiter les exportations d’équipements utilisables pour la surveillance et la répression à Hong Kong.
La question de Taïwan –île gouvernée de façon indépendante mais dont Pékin revendique la souveraineté– devrait également s’imposer, après les menaces chinoises ayant suivi la récente visite d’un responsable politique tchèque à Taipei.
Le sort des Ouïghours, minorité musulmane de l’ouest de la Chine victime d’internements massifs, pourrait être évoqué. « Ce sommet est un test historique. (Les chefs de l’UE) vont-ils enfin porter une voix européenne forte sur la déportation des Ouïghours? Ou nous couvrir de honte en traitant ce crime contre l’humanité comme note de bas de page? », a tweeté lundi l’eurodéputé français Raphaël Glucksmann (des socialistes et sociaux-démocrates).
LNT avec Afp