Maisons détruites et rue inondée à Juana Matos, sur l'île de Porto Rico, le 21 septembre 2017 après le passage de l'ouragan Maria © AFP HECTOR RETAMAL
L’ampleur des dégâts commençait seulement à émerger vendredi à Porto Rico, « anéanti » par le passage de l’ouragan Maria qui a fait au moins 21 morts dans les Caraïbes, et laisse l’île entièrement sans électricité et face au danger d’inondations potentiellement « catastrophiques ».
Plus au sud, la Dominique, frappée de plein fouet mardi et qui paye le plus lourd tribut humain avec au moins 15 morts, a commencé à sortir de son isolement avec l’arrivée d’un premier bateau d’aide française.
L’ouragan, désormais classé en catégorie 3 (sur une échelle de 5), est passé jeudi soir à environ 130 kilomètres au nord de la République dominicaine, en direction des îles britanniques Turques-et-Caïques, et a fait au moins trois morts en Haïti.
Mais c’est peut-être à Porto Rico que la situation est la plus grave. Alors qu’on annonce encore des pluies diluviennes qui aggraveront les inondations, ce territoire américain de 3,4 millions d’habitants se retrouve sans électricité peut-être pour plusieurs mois, selon des responsables, et avec un réseau de télécommunications quasiment entièrement détruit.
« Porto Rico est absolument anéanti » et « dans un état très, très, très délicat », a lancé jeudi le président américain Donald Trump, qui la veille avait décrété l’état de catastrophe naturelle, libérant des fonds fédéraux pour l’aide d’urgence et la reconstruction à Porto Rico.
– Pluies diluviennes –
Selon le Centre américain des ouragans (NHC), les pluies pourraient atteindre 50 à 75 cm d’ici samedi, voire 90 cm par endroits, et les autorités avaient appelé dès jeudi matin les habitants à monter vers les hauteurs, par crainte d’inondations « catastrophiques ».
Autour de San Juan, plusieurs dizaines de familles ont dû fuir pendant la nuit la montée des eaux.
Une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux par une résidente du quartier de Toa Baja montrait les flots atteignant le deuxième étage de sa maison. « Nous sommes pris au piège, Dieu ne nous aide pas, nous ne pouvons rien faire », déplorait cette femme. « Nous ne pouvons pas grimper (sur le toit) à cause du vent, regardez les vagues d’eau », lançait-elle.
Dans le quartier touristique d’Ocean Park, à San Juan, Iris Rivera, 53 ans, raconte avoir passé « la pire nuit de [sa] vie » lorsque Maria a frappé l’île mercredi, avec une force oscillant entre 4 et 5 (la plus élevée). Mais comme ses voisins, elle s’est déjà remise au travail. « Tout le monde aide à nettoyer, à faire la circulation, soutien son voisin », explique-t-elle.
La zone est totalement inondée et les habitants, à bord de bateaux ou même de kayaks, sillonnent les rues pour s’assurer que leurs voisins ou proches sont en sécurité.
Alors que les secouristes se concentraient sur les zones les plus touchées par l’ouragan, Juani Martinez, elle, passait le balai dans une des rues de son quartier où l’eau avait fini par se retirer. « De nombreuses bouteilles se sont cassées et c’est dangereux pour les gens qui passent par ici. Je voulais aider », a confié cette femme d’une cinquantaine d’années.
Ricardo Rossello, le gouverneur de ce petit territoire américain réputé pour ses plages de sable fin et ses eaux turquoises, a toutefois demandé aux habitants de rester chez eux et de laisser les équipes de secours faire leur travail.
« Dans l’immédiat, les gens n’ont rien à faire en dehors de leur maison ou des abris. Quasiment toutes les routes sont coupées », a-t-il assuré, mettant en garde la population contre l’arrivée de nouvelles pluies diluviennes. « Le pire est devant nous », a-t-il prévenu.
Maria est « la tempête la plus dévastatrice » depuis près d’un siècle, selon les autorités de l’île. En 1928, l’ouragan Okeechobee avait fait 300 morts.
« Le San Juan que nous connaissions hier a disparu », a témoigné la maire de la capitale, Carmen Yulin Cruz, prévenant que l’île pourrait être privée d’électricité « pendant quatre à six mois ».
– La Dominique ‘pratiquement ravagée’ –
A la Dominique, touchée mardi par l’ouragan alors qu’il était encore de force 5, et où le Centre des situations d’urgence des Caraïbes (CDEMA), au vu de clichés aériens, estime les dommages à « 70-80% des constructions », une première aide a enfin pu arriver jeudi.
Un navire de guerre français, envoyé depuis la Martinique, est arrivé avec des secours, des hélicoptères et du matériel et 40 tonnes d’eau. Jusque-là, l’île, ou Maria a fait « au moins quinze morts » selon son Premier ministre, était restée isolée.
Des images aériennes témoignaient de l’étendue des dégâts: toits métalliques arrachés, forêts exsangues. Dans les rues, des voitures encastrées les unes dans les autres, des habits, bidons, planches de bois et autres débris recouverts de boue montraient la violence de l’ouragan sur son passage, ont constaté des photographes de l’AFP.
« C’était vraiment terrible et dur, on ne pouvait pas sortir, même si on voulait sortir on ne pouvait pas », a raconté Déborah, martiniquaise qui s’est retrouvée coincée en Dominique après être venue rendre visite à sa mère. Leur maison est totalement détruite et elles ont trouvé refuge chez des voisins.
LNT avec AFP