L’examen d’un projet de loi de Finances, PLF, est toujours un exercice long, parfois même fastidieux, qui exige compétences, compréhension du système des financements publics, des affectations budgétaires et des dépenses publiques programmées pour toute une année. Et, bien évidemment, le PLF 2020 ne déroge pas à cette règle, sachant qu’il est prévu que l’approbation de ce projet de Loi de Finances pour l’année prochaine par la Chambre des Représentants et celle des Conseillers occupera très largement la session parlementaire d’automne !
The right man…
Comme chacun sait, M. Mohamed Benchaaboun, ci-devant ministre de l’Économie et des Finances, est à la manœuvre devant les Chambres parlementaires pour expliquer, détailler et faire adopter ce PLF qui est, faut-il le rappeler ? celui du gouvernement en son entier…. Doté d’une formation académique des plus prestigieuse, (Télécoms Paris), d’un cursus effectif au sein du secteur privé, d’une expérience de la Haute Administration avec son passage à l’ANRT, il a également à son actif (sic !) d’avoir assumé avec bonheur la présidence exécutive de la Banque Populaire entre 2008 et 2018.
C’est donc un homme bien armé qui porte ce projet de loi de finances et les séances successives, en commission, puis en plénière chez les Représentants, en ont amplement apporté la preuve. Patient, pédagogue, ferme et souvent convaincant par les arguments développés devant les Représentants, le ministre Benchaaboun, qui n’en a pas encore terminé avec le Parlement, a prouvé qu’il connaissait «son texte» et que ce PLF 2020 lui appartenait bel et bien.
Mais, là s’arrêtent sans doute les aspects positifs de ce projet de loi devant le Législatif. En effet, hormis le travail en commission, où la presse est en principe exclue, la plénière consacrée à l’approbation finale du texte, amendé par la commission ad hoc, a largement montré l’immense solitude du Grand Argentier. En effet, comme on a pu le voir grâce à Al Oula, M. Benchaaboun n’a pas bénéficié de la présence à la Chambre basse de ses collègues ministres, hormis MM. Mustapha Ramid et Hassan Abyaba.
Pire encore, hormis l’intervention du nouveau chef du groupe du PJD, M. Mostafa Ibrahimi, la plénière a essentiellement connu les envolées «lyriques» de parlementaires de l’opposition, plus portés par leurs convictions «idéologiques» et populistes de circonstance que par la connaissance des réelles articulations du PLF. Alors, certes, la majorité a voté en première lecture le Projet de Loi de Finances 2020, par discipline, quasi-automatiquement donc.
Seul au front !
Mais on ne dira pas que celui-ci était le texte d’une majorité parlementaire dont le rôle premier est d’appuyer et de soutenir le gouvernement dont il est issu. À la Chambre des Représentants ce jour-là, on a eu le pénible sentiment que M. Benchaaboun n’était pas le ministre de l’Économie et des Finances soutenu par une coalition composée du PJD, du RNI, du MP, de l’USFP et de l’UC, laquelle, bien qu’absente du gouvernement, fait toujours partie de la majorité parlementaire.
Il s’agissait plutôt du porte-parole et porte-voix de l’État, dans une posture pédagogique que l’on peut aisément qualifier de technocratique, et non l’expression d’une démarche politique et partisane (RNI) au service et au profit d’une majorité gouvernementale et parlementaire. Bien évidemment, M. Benchaaboun n’est en rien responsable de cette vacance des Représentants de la majorité et des partis qui les ont adoubés !
Il est plutôt victime d’une situation qui, en fait, s’est installée en 2012, dès l’investiture de M. Abdelilah Benkirane en tant que chef du gouvernement appuyé, déjà, par une coalition faite de bric et de broc, aggravée plus tard par la sortie de l’Istiqlal de M. Chabat et l’entrée du RNI de M. Mezouar (au fait, que sont-ils tous deux devenus ?…). De là, d’aucun pourrait légitimement s’interroger sur la pérennité d’une structure exécutive et parlementaire qui remplit si mal son rôle, puisque les ministres défendent seuls «leur beefsteak», tandis que la grande majorité des parlementaires ne sait trop pourquoi elle siège au Parlement !
Fasse le Ciel (et un peu les hommes) qu’à l’occasion des prochaines élections législatives, les urnes (et les partis politiques) envoient au Parlement des femmes et des hommes majoritairement compétents, toutes tendances politiques confondues, aptes à connaître une loi de finances, mais surtout motivés et empreints de l’importance des responsabilités qu’ils exercent au nom du Peuple !
Fahd YATA