Le projet de Loi de Finances 2018, (PLF 2018), consacre une véritable révolution en ce sens qu’il répond à nombre d’attentes exprimées chaque année depuis très longtemps en matière de réformes sociales et notamment l’éducation et la santé, mais restées jusque-là sans réponses. La preuve en est que la moitié du budget du PLF en question sera consacrée aux secteurs sociaux.
Le pilier social et humain, fer de lance d’un budget enfin équilibré
Ainsi, l’éducation, la santé et le monde rural sont mis en avant, preuve d’un choix politique d’importance pour mettre fin progressivement aux graves insuffisances budgétaires dont souffraient ces vecteurs de développement économique et principaux porteurs de la résorption des inégalités.
Bien sûr l’Éducation arrive en tête avec un budget de 59,2 MMDHS pour l’enseignement, en augmentation de + 5 MMDHS quand 14,79 MMDHS seront consacrés à la Santé publique pour notamment la création de 4.000 postes budgétaires et 3,54 MMDHS seront affectée au monde rural.
Quant aux versements au profit des régions, ils vont atteindre 7 MMDHS sur la base notamment de l’augmentation des transferts aux budgets régionaux au titre des impôts et taxes de l’IS et de l’IR qui passeront de 3% à 4%.
Cet appui conséquent aux secteurs sociaux avec plus de 50% du budget de 2018 se justifie selon le Ministre de l’’Économie et des Finances, M. Mohamed Boussaid, par la volonté gouvernementale de renforcer le capital humain.
Dans le détail, il s’agit d’améliorer les conditions d’accueil des enfants scolarisés par la construction de 141 nouveaux établissements scolaires et de mettre à niveau les infrastructures et équipements existants.
De plus, ce budget sera consacré à la construction de deux nouveaux campus dans les villes nouvelles de Tamansourt et Tamesna, d’une nouvelle faculté de médecine à Laâyoune et de quatre écoles supérieures, dont une école de commerce à Al Hoceima.
Pour la Santé, l’élargissement du budget de 500 MDHS servira à l’amélioration de l’accès aux soins, à l’extension de la couverture médicale de base et à l’amélioration et l’extension de l’offre de soins hospitalière.
Pour ce faire, un hôpital des spécialités sera construit à Tétouan, de 300 lits (350 MDHS). À Rabat, l’Hôpital Ibn Sina sera conforté de 858 lits pour un montant de 2,9 MMDHS, et celui des spécialités à Ouarzazate, porté à 150 lits pour 110 MDHS.
Ces priorités sociales du PLF 2018 montrent que le gouvernement considère que l’éducation et l’emploi sont étroitement liés et la stratégie globale pour relancer l’emploi doit être corrélée aux solutions apportées à l’éducation, la promotion de l’emploi allant de pair avec un meilleur système d’éducation et d’alphabétisation.
L’entreprise, pilier pour l’emploi et la croissance
Le second apport de taille du projet de Loi de Finances 2018 porte sur la mise en place d’une nouvelle charte de l’investissement pour améliorer la compétitivité des entreprises. Elle consistera, d’abord, en l’amélioration de l’accès aux financements pour les entreprises.
Les grands axes porteront sur la diversification des instruments de financements des investissements par la mise en valeur du capital risque sachant que 6,3 MMDHS ont été investis dans 183 sociétés à fin 2016 par l’industrie marocaine du Capital Investissement.
Mais aussi par la promotion des certificats de sukuks de la finance participative, le lancement par la CCG d’un fonds « Innov Invest » pour le financement des entreprises innovantes, du montant de 500 millions de dirhams.
Et, partant du principe « qui veut, peut », une réflexion sur le cadre institutionnel et organisationnel du Business Angel, (pour le financement de projets naissants) est en cours tandis que le « crowdfunding », (appelé également financement participatif), sur internet, fait l’objet d’un projet de loi soumis au régulateur du marché financier pour avis et adoption éventuelle en 2018.
Et ce, tout en continuant à mettre en avant la garantie des prêts bancaires qui a progressé de 41% en 2016, à14,4 MMDHS de crédits garantis.
Ainsi, le PLF 2018 de M. Boussaid se base sur une vision qui se déploie en une véritable politique économique de croissance dont les acteurs principaux ne sont autres que les PME qu’il s’agit de soutenir et accompagner en continu. Et notamment par les programmes de soutien aux TPME gérés par Maroc PME. En effet, 1 800 nouveaux projets en 2017 pour un budget global de 700 MDHS sont prévus par ledit PLF.
Cette démarche se veut à l’image donc du Plan d’Accélération Industrielle, (2015-2020), qui consiste en la modernisation pour une meilleure compétitivité de 20 000 TPME s’appuyant sur 500 TPME qualifiées de locomotives.
En outre, afin d’offrir plus de souplesse aux entreprises en phase de démarrage, le PLF 2018 prévoit le bénéfice de l’exonération pour 10 salariés, au lieu de 5 prévus actuellement et proroge le délai d’application de ce dispositif aux entreprises créées pendant la période allant du 1er janvier 2018 au 31 décembre 2022, au lieu de la période allant du 1er janvier 2015 au 31 décembre 2019.
Quant à « la cerise sur le gâteau », elle consiste en de nouvelles mesures d’allègements fiscaux, attendues depuis les Assises de la Fiscalité de 2012 !
La plus importante est la mise en place de l’impôt progressif pour les sociétés. Il s’agit d’une véritable révolution fiscale parce que ce grand changement va profiter à toutes les entreprises, les petites et les grandes, aux prospères et à celles qui le sont moins.
C’est le coup de pouce que donne M. Boussaid à tous les acteurs économiques. En effet, le PLF 2018 remplace la proportionnalité de l’IS par la progressivité. Comme le montre le tableau ci-dessous, l’IS est aujourd’hui proportionnel au montant des résultats d’une entreprise.
Il y a actuellement quatre taux de l’IS, un pour chaque tranche de résultat soit :
- Pour un résultat inférieur ou égal à 300 000 Dhs, le taux appliqué est de 10%.
- Il passe à 20% pour la tranche de 300 001 à 1 000 000 Dhs.
- Il atteint 30% quand le résultat d’une société se situe entre 1 MDh et 5 MDh,
- Et à 31% au-delà, selon le principe de la proportionnalité.
La progressivité de l’IS introduite par le PLF 2018 consiste à appliquer un taux d’IS propre à chaque tranche du résultat taxable.
La tranche à 300 000 Dhs est taxée à 10%, celle à un million de dirhams à 20% et au-delà à 31%.
Cela réduit substantiellement l’impôt sur les sociétés comme le montre l’exemple suivant : aujourd’hui, une société qui réalise un bénéfice net fiscal de 400 000 Dh est soumise au taux de 20% et paye un IS de 400 000 x 20% = 80 000 Dh.
Selon les nouvelles dispositions proposées par le PLF 2018, l’IS serait calculé par tranche comme suit : (300 000 x 10%)+( 100 000 x 20%) = 50 000 Dh et réalisera ainsi 30 000 Dhs d’économie d’impôt.
Il est clair donc que le projet de Loi de Finances 2018 satisfait à nombre d’attentes économiques et sociales de notre pays !
Après avoir mis l’accent sur les investissements en infrastructures pour ouvrir le pays à l’investissement, au tourisme et l’économie à l’international, le Maroc vient de prendre un grand virage celui de la mise à niveau de l’éducation de la jeunesse afin d’intégrer les jeunes au marché de l’emploi grâce aux postes générés par une économie marocaine plus dynamique et en croissance. Et ce, tout en continuant à appuyer directement les PME et en instaurant un répit fiscal général pour conforter l’investissement privé ! Espérons donc que ce qui est déjà un coup de maître ne sera pas qu’un coup d’essai !
Afifa Dassouli
Hypothèses chiffrées du projet la loi de finances 2018 :
– Taux de croissance en 2017 : 4,6%
– Valeur ajoutée agricole en 2017 : +16,1%
– Taux de croissance des secteurs non agricoles : +3,2%
– Prévision du taux de croissance : 3,2%
– Déficit budgétaire : 3%
– Prix de la tonne de gaz butane : USD 380
– Production de la campagne céréalière : 70 millions de quintaux
– Recettes budgétaire courantes : 236,81 MMDHS
– Dépenses budgétaires courantes : 215,83 MMDHS
dont 108,5 MMDHS masse salariale et 13,72 MMDHS compensation
– Investissements publics : 195 MMDHS (+ 5 MMDHS par rapport à 2017) dont le montant des Investissements programmés dans le cadre du budget général est de 68,2 MMDHS (+4,6 MMDHS)
– Le PLF prévoit la création de 19.000 emplois
– Education, 20.000 emplois en CDD sont également programmés. 55.000 emplois en CDD sont programmés dans ce secteur sur deux ans, 2018 et 2019.