Le président chinois Xi Jinping, lors d'une visite officielle à Hanoï, le 13 novembre 2017 © POOL/AFP/Archives LUONG THAI LINH
La Chine a annoncé l’envoi vendredi en Corée du Nord d’un « représentant spécial », dans la foulée d’une tournée en Asie du président américain Donald Trump, qui avait appelé Pékin à renforcer la pression sur Pyongyang.
Cet émissaire du président Xi Jinping, Song Tao, discutera du dernier congrès quinquennal du Parti communiste chinois (PCC), survenu mi-octobre, ainsi que de « dossiers d’intérêts communs », a simplement indiqué mercredi Geng Shuang, porte-parole du ministère des Affaires étrangères.
L’agence de presse officielle nord-coréenne KCNA a confirmé la venue du représentant chinois.
Une visite exceptionnelle: les relations entre Pékin et Pyongyang restent envenimées par le programme nucléaire et balistique nord-coréen, et Xi Jinping n’a pas rencontré le leader Kim Jong-Un depuis l’arrivée de celui-ci au pouvoir fin 2011.
L’envoi de Song Tao, par ailleurs chef du « bureau de liaison internationale » du PCC, sera le premier voyage d’un haut responsable chinois dans le pays depuis une visite du vice-ministre des Affaires étrangères Liu Zhenmin en octobre 2016.
Cette annonce de Pékin intervient alors que Donald Trump a achevé mardi un voyage de 12 jours à travers l’Asie, durant lequel il a averti que « le temps pressait » face aux ambitions militaires de Pyongyang.
Et aux yeux de Washington, la Chine — principal soutien diplomatique et économique de la Corée du Nord — joue un rôle clef.
Pékin a approuvé plusieurs trains de sanctions internationales adoptés par le Conseil de sécurité de l’ONU, sabrant notamment ses achats de charbon et de minerais nord-coréens.
Mais lors d’un sommet à Pékin la semaine dernière, Donald Trump a exhorté son homologue chinois à accentuer la pression sur son turbulent voisin, qui a procédé début septembre à un nouvel essai nucléaire.
– Sanctions durcies? –
« La Chine peut régler ce problème facilement et rapidement », a affirmé M. Trump devant Xi Jinping. Il a par la suite assuré, dans un tweet, que le président chinois avait accepté de « durcir les sanctions », sans précisions. Depuis, la Chine n’a toutefois annoncé aucune nouvelle mesure.
En revanche, l’envoyé chinois devrait « porter à Pyongyang le consensus sino-américain (sur la nécessaire dénucléarisation de la péninsule) et voir où il peut y avoir des avancées. La Chine muscle activement ses efforts diplomatiques », observe pour l’AFP Wang Dong, professeur à l’Université de Pékin.
Conformément aux batteries de sanctions onusiennes, Pékin avait sommé fin septembre les entreprises nord-coréennes établies en Chine de cesser leur activité d’ici janvier, tout en s’engageant à réduire ses exportations de produits pétroliers raffinés vers son voisin.
Mais les Etats-Unis estiment que le géant asiatique pourrait agir encore plus drastiquement.
A l’inverse, la diplomatie chinoise dit vouloir s’en tenir aux seules restrictions adoptées dans le cadre des Nations unies. Elle dénonce ainsi farouchement les « sanctions unilatérales » prises par Washington — dont plusieurs visent des entités chinoises accusées d’être en affaires avec la Corée du Nord.
– ‘Odeur de poudre’ –
Surtout, la Chine défend « la préservation de la paix et la résolution de la crise par le dialogue et la négociation », a insisté Geng Shuang mercredi.
Pékin plaide, à l’unisson avec Moscou, pour un « double moratoire »: l’arrêt simultané des essais balistiques et nucléaires de Pyongyang et des manoeuvres militaires américano-sud-coréennes. Ce dont les Etats-Unis ne veulent entendre parler.
La tournée de Donald Trump en Asie a été « précédée d’une forte odeur de poudre » entre Washington et Pyongyang, et le représentant spécial chinois s’efforcera de « persuader » le régime de Kim Jong-Un de revenir à la table des négociations, estime l’universitaire Wang Dong.
« La crise arrive à un tournant, où un faux-pas des Etats-Unis ou de Pyongyang peut mener à une confrontation militaire », un scénario-catastrophe pour Pékin qui a la hantise d’un conflit à sa porte, ajoute M. Wang. Pour l’éviter, « la Chine fait tout son possible pour travailler avec les deux parties ».
La tâche s’avère compliquée, alors que se poursuit l’escalade verbale entre l’hôte de la Maison Blanche et le régime stalinien.
Depuis Séoul, M. Trump avait qualifié Kim Jong-Un de « cruel dictateur ». « Son pire crime (…) a été d’oser insulter avec malveillance notre leader suprême », a répliqué mercredi le Rodong Sinmun, journal du parti unique nord-coréen. « Il n’est qu’un hideux criminel condamné à mort par le peuple coréen. »
LNT avec AFP