Le Régime d’assistance médicale (RAMED) a contribué à hauteur de 50% à l’accroissement de la couverture médicale obligatoire au Maroc, la portant, en 2017, à 53% de la population marocaine, contre seulement 33,7% en 2010, a souligné, jeudi à Rabat, le secrétaire général de l’Observatoire national de développement humain (ONDH), El Hassan El Mansouri.
S’exprimant lors d’un atelier national de restitution des résultats de l’évaluation du RAMED, élaborée par l’ONDH, M. El Mansouri a souligné cette progression soutenue s’est accompagnée d’une réduction de presque 50% des inégalités d’accès aux soins entre les Ramedistes et les assurés de l’assurance maladie obligatoire de base (AMO), considérant que cet effet sur les inégalités d’accès aux soins, très marqué en 2012, s’est progressivement atténué entre 2013 et 2015, avec une baisse des taux de consultation des Ramedistes pauvres de 75% à 64,8% et de 70,2% à 60% pour les Ramedistes vulnérables.
Cette perte d’effectivité du RAMED serait, en fait, due à l’augmentation des coûts indirects (transport, hébergement, accompagnement) liés aux situations d’attente vécues par des patients souvent peu informés sur les procédures des filières de soins, et aussi au niveau élevé des paiements directs, a-t-il poursuivi.
« Les résultats de cette évaluation ont démontré que grâce au Ramed, le Maroc a franchi un pas décisif vers la couverture sanitaire universelle », s’est-il réjoui, relevant que l’ONDH a fait le choix important de procéder à l’évaluation globale du RAMED, qui est un instrument pertinent au service de la réduction des inégalités sociales d’accès aux soins.
Cette évaluation a été réalisée selon sur une méthodologie mixte, faisant appel aussi bien à des méthodes quantitatives que qualitatives. Les premières reposent sur l’enquête de panel des ménages de l’ONDH, effectué en 2012, 2013 et 2015 et les données reflétant la situation des comptes financiers des hôpitaux régionaux de Rabat, Fès, Beni Mellal et Sidi Kacem, tandis que les secondes sur les résultats d’une enquête de perception conduite dans les Centres hospitalo-universitaires (CHU) de Fès et de Rabat auprès des bénéficiaires et de leur personnel médical et administratif.
De même, il a souligné que la généralisation du RAMED a eu des effets inattendus sur l’organisation des soins et leur qualité, dont la dégradation touche l’ensemble des patients, qu’ils soient ou non Ramedistes, notant que les hôpitaux, en raison de la baisse de fréquentation de la part des usagers payants, se trouvent confrontés à une diminution de leurs ressources propres au moment même où leur activité augmente en raison de l’afflux de patients Ramedistes.
Le responsable a également noté que l’augmentation de la demande de soins adressée à l’hôpital public exige du personnel hospitalier de fournir davantage de prestations de soins alors que ses ressources n’enregistrent pas d’augmentations significatives, indiquant que l’augmentation de la demande se traduit par des pénuries, matérialisées par un allongement des files et des délais d’attente.
Par ailleurs, M. El Mansouri a fait savoir que le ciblage mis en œuvre par le RAMED constitue une amélioration par rapport au système précédent du certificat d’indigence, précisant que sur la base des résultats de l’enquête panel de ménages de l’ONDH de 2012, les critères d’éligibilité sont reliés aux caractéristiques socio- économiques des ménages.
Cependant, malgré ces mécanismes, seuls 27% des ménages vivant sous le seuil de pauvreté relative étaient effectivement affiliés au RAMED en 2015 et 11,4% des ménages relevant du cinquième quintile en bénéficiaient, ce qui remet en cause le rôle de protection sociale qui lui est dévolu, a-t-il noté.
Dans ce cadre, M. El Mansouri a rappelé que le RAMED est venu pour répondre au problème des barrières financières qui empêchaient les populations pauvres de se soigner, notant que c’est la raison pour laquelle l’ONDH a cherché à évaluer les effets du RAMED sur les inégalités d’accès aux soins.
« Si le RAMED a permis de diminuer les phénomènes de non recours aux soins pour les personnes y ayant accès, son deuxième objectif, à savoir de réduire la charge financière des soins, semble ne pas avoir été atteint, notamment en ce qui concerne les paiements directs des médicaments et des analyses » , a-t-il ajouté, précisant qu’en 2015, les Ramedistes ne sont que 20% à déclarer avoir bénéficié d’une prise en charge de type « tiers payant » lors de leur dernière hospitalisation.
Selon cette évaluation, et en vue d’améliorer la performance du RAMED et assurer sa pérennité, l’ONDH a proposé un ensemble de mesures urgentes, portant sur la stabilisation et la sécurisation des ressources financières dédiées au RAMED, la mise en place d’un organisme gestionnaire répondant aux principes de bonne gouvernance, l’amélioration de l’organisation du système de soins selon une approche intégrée et participative, l’amélioration du système actuel de ciblage du RAMED et la mise en place d’un système d’information et de gestion sanitaire intégré.
Pour sa part, le représentant adjoint de l’UNICEF, Behzad Noubary a souligné que le RAMED, depuis sa généralisation en 2012, a permis au Maroc de presque doubler le taux de couverture médicale national, ce qui représente « une avancée ».
L’UNICEF a le privilège d’œuvrer en collaboration avec l’Union Européenne, et étroitement avec plusieurs acteurs, en vue d’appuyer les efforts du Maroc afin de repenser son système de protection sociale, en conformité avec l’article 31 de la Constitution et les engagements du Maroc relatifs à l’Agenda du développement durable 2030.
Cette évaluation s’articule autour de cinq thématiques, à savoir les enjeux et la pertinence du RAMED, le dispositif de ciblage mis en œuvre dans le cadre du RAMED, les effets du RAMED sur l’hôpital, la gestion financière et la gouvernance d’ensemble du système et les effets du RAMED en termes d’accès aux soins des populations ciblées.
Ont pris part à cette rencontre, le coordinateur résident des Nations Unies au Maroc, le directeur de l’école nationale de santé publique et des représentants des départements ministériels et des institutions nationales, ainsi que des experts nationaux et internationaux.
LNT avec MAP