Un garde-côtes libyen surveille des migrants secourus en Méditerranée au large des côtes de Zawiyah, le 27 juin 2017, alors qu'ils tentaient de gagner l'Europe © AFP Taha JAWASHI
Le « pic » de la crise humanitaire des réfugiés « est derrière nous » et la priorité doit désormais aller à l’intégration, « défi » pour les politiques nationales et internationales, estime jeudi l’OCDE dans son rapport annuel sur les migrations.
Les flux « sans précédent » observés fin 2015-début 2016 « ont diminué » depuis un an : il y a eu 72.000 débarquements de migrants venus d’Afrique sur les côtes européennes depuis le début de l’année, soit « douze fois moins que dans la deuxième moité de 2015 », souligne Stefano Scarpetta, directeur pour l’emploi, le travail et les affaires sociales à l’OCDE.
Mais « beaucoup de ceux arrivés en Europe pour fuir des pays en conflit resteront vraisemblablement un certain temps », et c’est pourquoi « il est désormais temps de se concentrer sur la manière d’aider ces gens à s’installer dans leurs nouveaux pays d’accueil » et à « s’intégrer sur le marché du travail », ajoute-t-il.
En 2016, les pays de l’OCDE ont enregistré plus de 1,6 million de demandes d’asile, comme en 2015, et sur ce total « environ 1,5 million » ont obtenu l’asile, souligne le rapport.
Pour la quatrième année consécutive, l’Allemagne a été le pays le plus sollicité (675.000 premières demandes d’asile) – même si, du fait des délais de traitement, « la majorité des demandeurs étaient déjà arrivés en 2015 ». Suivent les Etats-Unis (260.000), l’Italie (120.000), la France et la Turquie (un peu moins de 80.000). Hors Allemagne, le nombre de demandes « a en fait chuté de 25% » dans les pays de l’OCDE entre 2015 et 2016.
Près de la moitié des demandes provenaient de trois pays (Syrie, Afghanistan et Irak), avec de fortes spécificités nationales : Gambiens et Nigérians en Italie, Soudanais en France, Iraniens en Grande-Bretagne…
Dans le sillage de la crise économique, l »importance soudaine » de ces flux « a alimenté les inquiétudes des populations », souvent demandeuses de politiques « plus sélectives et restrictives », voire « d’une fermeture totale des frontières », note M. Scarpetta.
Ainsi, « la plupart des pays ont renforcé leurs programmes de réinstallation » (consistant à amener directement les réfugiés depuis leur pays ou un pays tiers) mais les conditions sont devenues « moins favorables dans de nombreux pays » pour les bénéficiaires d’une protection humanitaire, selon le rapport.
– « Prise de conscience » –
Cela s’est cependant accompagné d’une « prise de conscience accrue de la nécessité de faciliter l’installation des réfugiés » avec « une plus grande mobilisation de différents acteurs » en faveur de l’intégration – pouvoirs publics, ONG, employeurs et syndicats… mais aussi « la société civile au sens large ».
De fait, « des changements importants sont en train d’être réalisés de façon à mieux intégrer les réfugiés », note le responsable, qui juge « emblématiques » le programme lancé en Suède et la loi sur l’intégration en Allemagne – même si dans certains pays, les politiques publiques « ont encore un certain retard ».
Coût économique, impact sur les relations internationales… « il s’agit désormais de faire des politiques d’intégration une priorité non seulement au niveau national mais aussi international », ajoute-t-il.
C’est un « défi » car « par le passé, l’intégration a pu laisser souvent à désirer » : ainsi les immigrés connaissent un taux de chômage supérieur de près de 5 points à celui des personnes nées dans le pays.
« Nous sommes à la croisée des chemins », estime M Scarpetta, d’autant que les migrations ont atteint l’an dernier un plus haut depuis 2007, année d’avant la crise économique : près de 5 millions de personnes sont alors entrées de façon permanente dans les pays de l’OCDE.
Ces chiffres incluent les réfugiés, mais les migrations familiales et la libre circulation « restent prépondérantes » : 1,5 million de permis d’études et 1,6 million de titres familiaux ont été délivrés en 2015, dernière année pour laquelle l’OCDE a des chiffres définitifs.
« En général, les pays ont continué de faciliter l’admission des travailleurs qualifiés » (Italie, France, Estonie…), précise le rapport, qui fait état d’une hausse de « plus de 10% » des migrations intra-entreprises et « de 3% » du détachement de travailleurs à l’intérieur de l’UE.
LNT avec Afp