Le projet de loi portant réforme du statut de Bank Al-Maghrib vient d’être adopté par la Chambre des Représentants. Il ne reste plus que l’approbation par la Chambre des Conseillers pour donner existence légale à ce texte.
Voilà une bonne nouvelle sachant que depuis la mise en application de la loi 76-03 portant statut de Bank AI-Maghrib (BAM) en février 2006, l’environnement juridique et institutionnel de BAM a connu une évolution importante, caractérisée notamment par la mise en place d’une nouvelle Constitution du Royaume en 2011 et la dernière réforme de la loi relative aux établissements de crédit, c’est-à-dire la loi bancaire.
Mais aussi, avec la crise de 2009, les missions des banques centrales ont subi une transformation profonde en matière de stabilité financière.
De fait, ces développements exigeaient la mise à niveau de cette loi au niveau des meilleurs standards internationaux par une refonte du statut de BAM.
En effet, cette loi porte d’abord sur le renforcement de l’indépendance de la Banque centrale, l’élargissement de ses missions pour le renforcement de la stabilité financière.
Mais aussi et surtout depuis la réforme de la cotation du dirham, elle devait clarifier les attributs de BAM en matière de politique de taux de change et en conséquence la gestion des réserves de change.
Toutefois, le renforcement de l’indépendance de la banque centrale reste le point le plus important de la grande réforme apportée par le projet de loi en question.
Celui-ci prévoit d’attribuer à la banque centrale une autonomie totale en lui conférant le pouvoir de définir l’objectif de stabilité des prix ou cible d’inflation, qui devient son objectif principal, et de conduire la politique monétaire en toute indépendance.
De même que le nouveau texte propose une nouvelle disposition de grande importance qui permet la concertation régulière encre le ministre chargé des finances et le Wali en vue d’assurer la cohérence de la politique macro-prudentielle ainsi que celle de la politique monétaire, avec les autres instruments de la politique macro-économique.
Ce qui lui donne un rôle que le Wali de Bank Al-Maghrib, Abdellatif Jouahri, exerçait déjà sans texte, celui de contribuer au choix des arguments de la politique économique du Maroc.
En contrepartie, la nouveauté du renforcement de l’indépendance de BAM autorise l’audition du Wali sur les missions de la banque par les commissions permanentes chargées des finances du Parlement
La seconde déclinaison du renforcement de l’indépendance de BAM porte sur ses nouvelles missions en matière de stabilité financière des banques.
Désormais donc, BAM contribuera à la prévention du risque systémique en adaptant ses instruments d’intervention à cette mission. C’est ainsi que la nouvelle loi prévoit des dispositions permettant à la Banque centrale d’être représentée au sein du Comité de Coordination et de Surveillance des risques systémiques, créé par la nouvelle loi bancaire, de proposer au Gouvernement toute mesure visant à maintenir la stabilité financière, de prendre des participations dans des établissements de crédit dans un contexte de gestion du risques systémiques et de résolution des crises bancaires et de prendre toutes autres mesures dans les circonstances exceptionnelles.
L’autre grande nouveauté contenue dans cette loi confirme le rôle essentiel de BAM dans la politique de change du Royaume.
Cela consiste en la mise en œuvre de la politique de taux de change dans le cadre du régime de change. Elle sera également autorisée à utiliser les réserves de change dans un objectif de défense ou de préservation de la valeur du dirham en cas de régime de change flexible.
Là aussi, le texte ne vient que « légaliser » a posteriori un état de fait depuis la réforme de la cotation du Dirham en janvier dernier.
De plus, pour une meilleure gestion de la réserve de change de notre pays, BAM peut selon le nouveau texte, déléguer la gestion d’une partie des réserves de change à des mandataires dans des conditions fixées par l’Institut d’émission.
La nouvelle loi prévoit également le renforcement de la gouvernance de la Banque Centrale gage de ses nouvelles responsabilités.
Ainsi, il lui est interdit de solliciter ou d’accepter toutes instructions émanant du Gouvernement.
De nouveaux critères de nomination du Wali de Bank Al-Maghrib et du Directeur général sont précisés par la loi.
L’élargissement des incompatibilités, relatives aux fonctions des six membres du Conseil désignés par le chef du Gouvernement aux responsabilités dans des entreprises publiques ou privées s’imposera de façon systématique sur la base des codes d’éthique et déontologique.
Et l’institution, selon la nouvelle loi, aura de nouveaux organes d’administration et de direction, en l’occurrence, le comité monétaire et financier, le comité de stabilité financière et le comité d’audit.
Dans ce cadre, le comité monétaire et financier et le comité de stabilité financière auront pour rôle d’assister le Wali dans les domaines directement liés aux missions fondamentales de la banque.
Quant au comité d’audit, qui doit être composé au moins 2 membres du Conseil, il a pour mission dc donner un avis sur les questions relatives à l’information comptable, l’audit interne et externe, le contrôle interne et à la maîtrise des risques.
Enfin, l’immense place qu’a occupée M. Jouahri a imposé naturellement un élargissement des attributions du Wali de BAM dans ce texte de loi.
Ainsi, la nouvelle loi portant sur l’élargissement du statut d’indépendance de BAM va donner à la banque sa vraie place dans l’application de toutes les réformes qu’a connu le système financier, l’introduction de la flexibilité du dirham et surtout en tant qu’institution de banque centrale le même rôle en matière de politique économique de toutes ses consœurs de par le monde …
Afifa Dassouli