M. Ahmed Lahlimi, Haut Commissaire au Plan
L’économie nationale aurait réalisé une croissance de 3,8%, au troisième trimestre 2017, au lieu de +1,3% une année auparavant, tirée, notamment, par l’amélioration de 14,7% de la valeur ajoutée agricole, au lieu d’une baisse de 13,6% au cours de la même période de 2016. La valeur ajoutée des activités hors agriculture aurait affiché, pour sa part, un accroissement de 2,6%, porté par le secteur tertiaire et les mines. Au quatrième trimestre 2017, la croissance des activités non-agricoles se poursuivrait au rythme de +2,7%. Avec une hausse de 13,5% de la valeur ajoutée agricole, l’économie nationale s’améliorerait de 3,9%, au lieu de +1% une année plus tôt.
Poursuite du raffermissement de la demande mondiale adressée au Maroc
Le climat des affaires dans les économies avancées aurait continué à s’améliorer au troisième trimestre 2017. Les économies américaine et nippone auraient profité de la relance de la consommation des ménages, alors qu’en zone euro, l’activité aurait progressé de 2,4%, en rythme annualisé, profitant de la reprise de l’investissement en construction et en équipement et du renforcement de la consommation privée. La même tendance aurait marqué l’activité dans les pays émergents, particulièrement en Chine, où la production industrielle aurait progressé, tirée par l’investissement en construction et en produits manufacturés. En Russie et au Brésil, le recul de l’inflation aurait favorisé la reprise progressive de la consommation des ménages et la sortie de leurs économies de la récession se serait confirmée.
La relance des importations des pays émergents aurait soutenu le commerce mondial de biens qui aurait progressé de 6% au troisième trimestre 2017, au lieu de +1% une année plus tôt. En ligne avec l’évolution du commerce mondial, la demande étrangère adressée au Maroc se serait affermie de 6,2%, en glissement annuel, lors de la même période.
Allègement du déficit commercial
Au niveau national, les exportations de biens se seraient améliorées de 11% au troisième trimestre 2017, après s’être repliées de 1,6% un an plus tôt. La bonne performance des ventes extérieures des produits agricoles et agro-alimentaires (agrumes, pastèques et melons, conserves de légumes) aurait été favorisée par une offre agricole relativement abondante et une demande extérieure plus soutenue. L’orientation favorable de la demande extérieure aurait, également, profité aux secteurs de la confection, de l’aéronautique et de l’automobile. Le secteur phosphatier aurait continué à bénéficier d’une demande soutenue émanant des pays de l’Afrique subsaharienne et de l’Amérique latine. La hausse des expéditions en valeur du phosphate brut aurait atteint près de 13% et ce, malgré le recul des cours sur le marché mondial de 22%, en glissement annuel.
Les importations se seraient tempérées pour le deuxième trimestre consécutif, affichant un accroissement de 2,2% lors de la même période. Ce ralentissement trouve son origine dans le recul des importations hors énergie, en particulier celles des biens de consommation (voitures de tourisme, médicaments), des produits alimentaires (repli de la facture céréalière) et des demi-produits (produits chimiques). La facture énergétique aurait, à l’inverse, continué à grever la balance commerciale, contribuant pour près de 2,3 points à l’augmentation des importations.
La hausse plus conséquente des exportations par rapport aux importations aurait permis un allègement du déficit commercial de 6,4%, en variation annuelle, au troisième trimestre 2017, et une amélioration du taux de couverture de 4,3 points, pour se situer à 53,9%.
Progression de la demande intérieure
Au troisième trimestre 2017, la demande intérieure, notamment celle émanant des ménages, aurait poursuivi son redressement amorcé en 2016. La consommation domestique aurait bénéficié d’une détente des prix à la consommation. Elle aurait profité, en grande partie, aux produits locaux ; les importations de biens de consommation ayant régressé d’environ 11%, en glissement annuel. Dans l’ensemble, les dépenses de consommation des ménages, en volume, se seraient accrues de 4,5%, en variation annuelle, au lieu de +3,5% une année plus tôt, contribuant pour environ +2,7 points à la croissance globale du PIB, au lieu de +2 points un an plus tôt.
Cette progression de la consommation aurait été alimentée, entre autres, par un accroissement de 4,5% des crédits à la consommation et un redressement de 6,5% des recettes des MRE, au troisième trimestre. En revanche, la demande des administrations publiques serait restée modérée (+0,9%), sous l’effet d’une baisse des dépenses de fonctionnement (-0,4%, à fin août 2017).
La croissance de l’investissement aurait décéléré par rapport à l’année précédente, pour se situer à environ 2,8%, en variation annuelle, au lieu de +10,9% une année auparavant, contribuant, ainsi, pour près de +0,8 point à la croissance du PIB. Cette évolution serait, particulièrement, attribuable au ralentissement de l‘investissement en produits industriels. L’investissement public en infrastructures de base aurait, à l’inverse, légèrement accéléré par rapport au début de l’année, tandis que l’investissement en construction, en ralentissement depuis la mi-2008, aurait été marqué par l’hésitation et l’attentisme des investisseurs, suite à la faiblesse de la demande adressée, notamment, à l’immobilier résidentiel.
Poursuite de l’amélioration des activités agricoles
La valeur ajoutée agricole aurait crû de 14,7%, au troisième trimestre 2017, en variation annuelle, portée par une sensible augmentation de la production végétale, après une baisse de 12,8% en 2016. Les productions des cultures maraîchères et fruitières auraient évolué au rythme de leur croissance tendancielle (+4,1%), alors que celles des céréales et des légumineuses auraient presque triplé par rapport à 2016, tirées par des rendements au dessus de la moyenne quinquennale dans les régions du Gharb, du Saïs et du Tadla. Ce raffermissement de l’offre, qui aurait ramené l’activité agricole au-delà de son niveau tendanciel de moyen terme, se serait accompagné d’une amélioration de la balance commerciale agricole, consécutive à une baisse de 14,1% des quantités importées de céréales et une hausse de plus que le double des exportations d’agrumes. Il aurait, en outre, favorisé une diminution des prix agricoles, notamment ceux des céréales, des agrumes et des fruits frais (-2,9%, -25% et -13%, respectivement, en variations annuelles). Seuls les prix des légumes frais se seraient inscrits à contre courant, affichant une hausse de 1,8%, au cours de la même période.
Légère progression du rythme de croissance des activités hors agriculture
La valeur ajoutée hors agriculture se serait accrue de 2,6%, au troisième trimestre 2017, au lieu de +2,3% une année auparavant. Contribuant pour près de 1,2 point à la croissance globale du PIB, les branches tertiaires auraient continué de soutenir l’activité économique, grâce notamment à la bonne orientation du commerce, du transport et des activités touristiques. La valeur ajoutée de ces dernières se serait accrue de 5,2%, en variation annuelle, au lieu de +7,7% une année auparavant. Cette évolution aurait été portée par une hausse de 9,6% des recettes voyages et de +6,4% des nuitées touristiques. Les arrivées touristiques auraient, pour leur part, augmenté de 5,4%.
La valeur ajoutée du secteur secondaire se serait améliorée de 2,8% au troisième trimestre 2017, soutenue notamment par la poursuite du dynamisme des activités d’extraction. La valeur ajoutée minière aurait affiché une croissance de 16,1% en variation annuelle. Les facteurs favorables qui avaient soutenu le redressement de la production du phosphate au cours du deuxième trimestre 2017, en l’occurrence l’augmentation de la capacité productive des industries locales de transformation, le rétablissement de la demande européenne et le renforcement des exportations des engrais phosphatés destinés aux pays de l’Afrique subsaharienne, notamment le Nigeria, l’Ethiopie et le Kenya, auraient continué de doper l’activité d’extraction du phosphate au troisième trimestre. Toutefois, l’inflexion à la baisse des cours internationaux des prix agricoles et la reprise des exportations chinoises de fertilisants, auraient, quelque peu, pesé sur les performances de la branche phosphatière. C’est ainsi que la production du phosphate brut aurait crû de 19,7% au troisième trimestre 2017, en variation annuelle, au lieu de 34% un trimestre auparavant.
Les industries manufacturières auraient poursuivi leur redressement, amorcé à fin 2016, affichant une croissance de 2,2%, au troisième trimestre 2017, au lieu de +0,4% la même période une année auparavant. Cette évolution aurait été soutenue par la consolidation de 4,8% des industries agroalimentaires, au lieu de +0,6% une année auparavant, contribuant pour 1,7 point à la croissance globale du secteur. Les industries chimiques et parachimiques auraient poursuivi leur dynamisme amorcé au début de l’année, marquant un accroissement de 6,4%, en glissement annuel. Pour sa part, la croissance des industries « textile et cuir » aurait légèrement accéléré, pour se situer à 5,3%, au lieu d’une baisse de 2,1%, une année plus tôt. En revanche, la valeur ajoutée des IMME aurait continué de tirer l’industrie vers le bas, avec une baisse de 3,5%, pâtissant, notamment, de la contraction de la production des industries métalliques, alors que la branche des « autres industries », serait restée atone (-0,8%) subissant le relâchement des industries des matériaux de construction, en particulier du ciment.
Le secteur de la construction aurait maintenu sa tendance baissière pour le troisième trimestre successif, affichant une baisse de 1% de sa valeur ajoutée, au troisième trimestre 2017, au lieu d’une hausse de 1,2%, l’année précédente. Cette évolution aurait été confirmée par la baisse de l’utilisation des facteurs de production, notamment le ciment, dont les ventes auraient poursuivi leur repli, après avoir reculé de 13,7% au deuxième trimestre. Par ailleurs, les anticipations des professionnels de la construction, dans le cadre de la dernière enquête de conjoncture du HCP, auraient confirmé la poursuite du recul des carnets de commandes des entrepreneurs du bâtiment, en ligne avec la baisse des prix des actifs immobiliers et le recul des transactions immobilières.
Globalement et compte tenu des estimations sectorielles et des indicateurs collectés jusqu’à fin septembre 2017, la croissance économique nationale se serait établie à 3,8%, au troisième trimestre, au lieu de +1,3%, l’année précédente.
Modération des prix à la consommation
Au troisième trimestre 2017, les prix à la consommation auraient poursuivi leur ralentissement pour le quatrième trimestre successif, affichant une hausse de 0,1%, en glissement annuel, au lieu de +0,3% un trimestre plus tôt. Cette décélération aurait été la conséquence de la baisse de 1,3% des prix des produits alimentaires, due notamment au fléchissement des prix des produits frais, alors que ceux des produits non-alimentaires auraient progressé de 1,1%, au lieu de +1,2% au trimestre précédent. L’inflation sous-jacente qui exclut les tarifs publics et les produits frais aurait, également, décéléré, pour se situer à +0,8%, après +1%, au deuxième trimestre 2017, sous l’effet de la poursuite du recul des prix des produits hors frais qui aurait compensé, en partie, l’augmentation des prix des services, en particulier ceux des loyers et des services ambulatoires.
Accentuation du besoin de liquidité des banques
Au troisième trimestre 2017, la croissance de la masse monétaire aurait ralenti, par rapport à l’année 2016, se situant à 4,7% en glissement annuel, au lieu de 5,5%, une année auparavant. Pour sa part, le besoin de liquidité des banques aurait continué de se creuser sous l’effet du repli de 11,7% des réserves internationales nettes de la Banque Centrale, à fin août. A l’origine de cette évolution, les achats massifs des devises sur le marché de change par les banques commerciales, à la veille de la migration vers la flexibilité du régime de change.
Les créances sur l’économie auraient poursuivi leur sentier de croissance ascendant, tirées particulièrement par la hausse des crédits accordés à l’équipement des entreprises et à l’habitat aux ménages. Dans ce contexte, les taux d’intérêt interbancaires auraient progressé, s’écartant légèrement du niveau du taux directeur. La même tendance aurait marqué l’évolution des taux des adjudications des bons du Trésor. Le taux moyen interbancaire aurait, ainsi, crû de 8 points, en variation annuelle et les taux des adjudications des bons du Trésor à un et à cinq ans auraient augmenté de 4 et 14 points, respectivement.
Léger ralentissement de la croissance des indices boursiers
Le marché des actions aurait légèrement réduit ses gains annuels au cours du troisième trimestre 2017. Les indices MASI et MADEX auraient progressé de 20,9% et 20,2%, respectivement, en glissements annuels, après des hausses de 26,4% et 26,6%, un trimestre plus tôt. Les cours des valeurs auraient subi des ajustements à la baisse, attribuables à des résultats comptables des sociétés cotées en bourse moindres que prévus par les investisseurs. Dans le même sillage, le rythme de croissance de la capitalisation boursière aurait légèrement ralenti, passant de 26,9%, au deuxième trimestre 2017, à 21,3%, au troisième trimestre. Ces évolutions auraient été tirées, notamment, par la croissance des cours des secteurs de la chimie, de l’agroalimentaire, des mines et du matériel et logiciels informatiques. Parallèlement, le marché des actions aurait enregistré une sensible progression des échanges et le volume des transactions aurait augmenté de 35%, en variation annuelle.
Poursuite de l’amélioration de l’activité économique au quatrième trimestre 2017
La croissance économique nationale devrait se poursuivre à un rythme toujours soutenu au quatrième trimestre 2017, sous l’effet d’un accroissement de 13,5% de la valeur ajoutée agricole. Par ailleurs, l’amélioration du climat des affaires aussi bien dans les économies émergentes qu’en zone euro devrait se poursuivre au quatrième trimestre 2017. La hausse des prix rognerait quelque peu le pouvoir d’achat des ménages européens, qui maintiendraient leur consommation mais réduiraient quelque peu leur épargne. Le commerce mondial continuerait d’être bien orienté, soutenu par la vigueur des importations des pays émergents. Dans ce contexte, la demande mondiale adressée au Maroc devrait progresser à un rythme proche de 5,2%, en glissement annuel.
La valeur ajoutée industrielle réaliserait un accroissement de 1,7%, au quatrième trimestre 2017, en variation annuelle, et les activités minières afficheraient une hausse de 15,1%, portée par le raffermissement de la production des minerais non métalliques. La valeur ajoutée électrique croîtrait, pour sa part, de 3,4%, grâce à la poursuite du redressement des activités des centrales thermiques à base de carburants. Quant au secteur tertiaire, sa valeur ajoutée croîtrait de 2,9%, contribuant pour environ +1,4 point à la croissance globale du PIB.
Dans l’ensemble, la valeur ajoutée hors agriculture devrait s’améliorer de 2,7%, au quatrième trimestre 2017, en variation annuelle, favorisant, ainsi, une hausse du PIB global de 3,9%, au cours de la même période, au lieu de +1% une année auparavant.
Nous rappelons que compte tenu des estimations du troisième et du quatrième trimestres 2017, nous ne serions pas appelés à changer, avant décembre 2017, les prévisions annoncées dans le cadre du budget économique exploratoire de juin 2017.
LNT avec Cdp du HCP