Le secrétaire d'Etat américain John Kerry (g), les chefs de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif et européenne Federica Mogherini, le 2 avril 2015 à Lausanne © AFP/Archives FABRICE COFFRINI
Alors que la crise nord-coréenne a des relents de Guerre froide, le prix Nobel de la paix pourrait récompenser cette année des efforts contre la prolifération des armes atomiques.
Le prix de la paix, récompense la plus éminente de la saison Nobel, sera décerné vendredi à 11H00 (09H00 GMT), l’occasion pour les experts scandinaves des questions internationales de se prêter au jeu des pronostics.
Un jeu nécessairement hasardeux puisque, des candidats, on ne connaît que le nombre –318 cette année–, leur identité étant tenue secrète pendant au moins 50 ans.
Après le président Juan Manuel Santos, récompensé l’an dernier pour ses efforts visant à ramener la paix en Colombie, un prix à la lutte antinucléaire serait de circonstance, conviennent les commentateurs.
« Le comité Nobel frapperait un grand coup s’il donnait le prix à l’accord sur le nucléaire iranien », estime Asle Sveen, historien du prix Nobel, qui verrait bien récompensés l’ex-secrétaire d’État américain John Kerry et les chefs de la diplomatie iranienne Mohammad Javad Zarif et européenne Federica Mogherini.
L’accord conclu en 2015 avec six grandes puissances (États-Unis, Grande-Bretagne, Chine, France, Russie et Allemagne) soumet l’Iran à un régime de surveillance strict de ses installations nucléaires pour garantir la nature exclusivement pacifique du programme, en échange d’une levée progressive des sanctions économiques.
Mais le président américain Donald Trump menace de le remettre en cause, au risque d’exacerber les tensions.
« Avec la Corée du Nord également en jeu, il est très important de soutenir les initiatives qui prémunissent contre le développement et la prolifération des armes nucléaires », abonde le directeur de l’Institut de recherche pour la paix d’Oslo (Prio), Henrik Urdal.
Car ces dernières semaines ont vu une spirale d’échanges belliqueux entre Donald Trump et le leader nord-coréen Kim Jong-Un après un nouvel essai nucléaire de Pyongyang et plusieurs tirs de missiles.
– ‘L’homme qui répare les femmes’ –
Une alternative pourrait être la Campagne internationale pour l’abolition des armes nucléaires (ICAN), comme le suggère le Conseil norvégien pour la paix.
Coalition mondiale d’ONG, l’ICAN a poussé à l’adoption d’un traité historique d’interdiction de l’arme atomique, signé par 122 pays en juillet — mais d’une portée essentiellement symbolique en l’absence des neuf puissances nucléaires.
Parmi les autres favoris figurent le Haut-Commissariat de l’ONU pour les réfugiés (HCR), éventuellement avec son patron, l’Italien Filippo Grandi, alors que le nombre de déracinés suite aux guerres, violences ou persécutions a atteint a atteint 65,6 millions de personnes dans le monde l’an dernier, un nouveau record.
Le HCR a déjà été nobélisé à deux reprises, en 1954 et 1981.
Professeur à l’université suédoise d’Uppsala, Peter Wallensteen penche pour le médecin congolais Denis Mukwege, surnommé « l’homme qui répare les femmes » pour les soins qu’il apporte aux victimes de violences sexuelles.
Si la liste des candidats n’est pas connue, leurs parrains — parlementaires et ministres de tous les pays, anciens lauréats, certains professeurs d’université… — peuvent choisir de révéler le nom de leur champion.
Les « Casques blancs » syriens et le pape François sont ainsi présumés en lice.
Autres noms évoqués: l’Union américaine pour les libertés civiles (ACLU), le blogueur saoudien emprisonné Raef Badaoui ou des voix indépendantes en Russie (Svetlana Gannouchkina et le journal Novaïa Gazeta) et en Turquie (le quotidien Cumhuriyet et son ex-directeur en exil, Can Dundar).
Au cours de l’année écoulée, la famille Nobel a été endeuillée par deux décès. Celui de sa présidente, Kaci Kullmann Five, morte d’un cancer du sein en février, puis celui du dissident chinois Liu Xiaobo, décédé en juillet après quelques semaines de liberté conditionnelle, sans avoir jamais pu aller chercher le Nobel qui lui avait été attribué en 2010.
Elle a aussi essuyé une grande déception en la personne d’Aung San Suu Kyi, prix Nobel de la paix 1991, critiquée de toutes parts pour son inaction face au traitement de la minorité musulmane rohingya en Birmanie.
LNT avec Afp