A Tanger, dans le cadre de MEDays 2018, les débats sur les questions-problématiques du monde se poursuivent comme prévu. Mais il est quand même important de constater que de tous les débats tenus jusqu’à présent, la politique américaine est, implicitement, omniprésente dans les échanges. Que ce soit du côté marocain, africain ou encore chinois, Donald Trump et sa vision pour le monde inquiètent, mais imposent surtout de nouveaux paradigmes dans l’espoir de minimiser les conséquences d’une Maison Blanche qui défie la communauté internationale, notamment ses valeurs universelles.
Selon de nombreuses personnes, ici à Tanger, on assiste aujourd’hui, à cause de Trump, à une grave régression dans les rapports mondiaux, d’où la nécessité de revisiter ses certitudes et son propre modèle de développement. « Même la question climatique qui peut-être plus que tout autre rassemble une communauté d’intérêts ou d’idéaux n’a pas réussi encore à aboutir sur un modèle de gestion collective efficace, malgré l’accord de Paris. Aucune des aspirations libérales n’a pris de forme tangible, le monde est un terrain d’action plus incertain que jamais », souligne Brahim Fassai Fihri dans son discours d’ouverture. Et de poursuivre dans le même sens que « le système international reposant sur les États, le respect de leur souveraineté et la valeur de leur signature est tout entier secoué par une renégociation unilatérale actuellement en cours. Les coups de force du Président Trump, tant au niveau politique avec le retrait de l’accord iranien, de l’accord de Paris ou l’ouverture de l’ambassade à Jérusalem, qu’au niveau économique, avec la réévaluation des tarifs douaniers principalement avec la Chine, mettent à mal le système international préalablement construit ». Est-ce le chant du cygne d’un monde « ordo-occidental » se débattant pour conserver sa suprématie ou un nouveau réajustement qui risque de chambouler durablement les « vieux principes westphaliens ? », s’interroge le président d’Amadeus, pour qui les prochaines années nous révéleront la portée de cette disruption, qui contient en elle le danger de rendre encore plus difficiles les solutions aux conflits régionaux où s’entrechoquent les intérêts. La Syrie en est l’exemple phare. Les frontières physiques aussi bien que mentales se durcissent.
Dans un autre atelier consacré à l’Afrique-Chine, les participants n’ont pas manqué, entre autres, de rappeler à quel point l’Afrique compte aujourd’hui pour la Chine, une économie qui ne cesse d’ailleurs de plaider pour l’ouverture des marchés, la baisse des taxes douanières, les ALE, l’atténuation du protectionnisme des Etats, à un moment où les Etats Unis ferment leurs frontières, et reviennent sur l’ouverture de leurs marchés pour davantage de protectionnisme. Dans un contexte pareil, en Afrique, la Chine est perçue aujourd’hui plus que jamais comme un partenaire stratégique.
Aujourd’hui aussi, l’un a besoin de l’autre, dit-on ici. La Chine a besoin des ressources naturelles africaines et du côté de l’Afrique, le financement est une priorité. Reste à savoir les Etats africains seront capables de payer dans les délais les dettes chinoises. Ceci est un autre débat, mais ce qui intéresse beaucoup plus la Chine en ces moments de guerre commerciale avec les Etats Unis, reste la diversification des partenaires, et réussir sa grande implantation dans différents pays du monde. L’Afrique reste dans cette optique un bon exemple de cette vision chinoise du monde, dite nouvelle ‘‘route de la soie’’.
Hassan Zaatit