Theresa May est retournée vendredi devant les 27 dirigeants de l’UE à Bruxelles, après leur refus la veille de toute nouvelle concession sur l’accord de Brexit, accroissant le risque d’un divorce sans accord.
« Les signaux » émis jeudi par Theresa May « ne sont pas spécialement rassurants » sur la capacité de Londres de pouvoir honorer les engagements conclus, a déclaré vendredi le Premier ministre belge Charles Michel, à son arrivée au deuxième jour du sommet européen de Bruxelles.
« La pression n’est pas chez nous, la pression est du côté de la Grande-Bretagne », a renchéri le président roumain, Klaus Iohannis.
Rescapée d’un vote de défiance de son parti, Mme May est venue à Bruxelles pour obtenir de nouvelles assurances de ses pairs afin de renforcer les chances d’un vote de l’accord de divorce. Mais les Européens ont refusé de renégocier quoi que ce soit et se sont même montrés quelque peu excédés par les demandes trop vagues de la Première ministre.
« Elle a tellement exaspéré ses collègues qu’elle est sortie avec moins que ce qu’elle aurait pu avoir », a confié à l’AFP une source européenne proche des négociations.
Le Premier ministre luxembourgeois, Xavier Bettel, a tenté de calmer les esprits vendredi, prenant la défense de Mme May.
« Theresa May a fait son travail et elle l’a bien fait », a-t-il dit, ajoutant qu’elle « a obtenu le meilleur accord possible » fin novembre.
Face au blocage de la situation au Royaume-Uni, M. Bettel a même suggéré la tenue d’une nouvelle consultation. « Un second référendum serait une opportunité mais ce n’est pas à moi de décider », a-t-il dit alors que Mme May y est totalement opposée.
Jeudi, les 27, qui s’étaient tous dits « prêts à aider » Mme May, ont adopté un texte destiné à apaiser les inquiétudes du parlement britannique. Mais il est sans valeur juridique. Et ils ont répété que l’accord de divorce ne « peut pas être renégocié ».
Le Premier ministre irlandais Leo Varadkar s’est dit vendredi « très satisfait de ces conclusions ». Les nouvelles garanties que Londres avait demandées concernaient le « backstop », cette solution imaginée dans l’accord de divorce pour éviter le retour d’une frontière physique entre l’Irlande et la province britannique d’Irlande du Nord, qui mettrait en péril les accords de paix sur l’île.
Ce « filet de sécurité » prévoit la création d’un « territoire douanier unique » englobant l’UE et le Royaume-Uni après la transition post-Brexit. Il n’aurait vocation à s’appliquer qu’en cas d’échec des négociations à venir sur les futures relations commerciales ambitieuses que souhaitent établir Londres et les 27.
– Prévoir « toutes les hypothèses » –
Le problème, pour les « Brexiters », est qu’une telle solution risquerait de maintenir leur pays de manière indéfinie au sein d’une union douanière avec l’UE, empêchant Londres de retrouver sa liberté commerciale.
Pour rassurer les élus britanniques, les 27 ont simplement réaffirmé que le fameux « backstop » n’avait vocation à s’appliquer que « temporairement ». Et ils se sont dits « fermement déterminés à travailler rapidement » d’ici au 31 décembre 2020, c’est-à-dire avant la fin de la période de transition qui doit suivre le départ britannique, pour éviter la mise en place de ce filet de sécurité.
« Si le filet de sécurité devait néanmoins être déclenché (…) l’Union ferait tout ce qui est en son pouvoir pour négocier et conclure rapidement un accord ultérieur qui (le) remplacerait », ont-ils encore ajouté.
Mais les Européens ont renoncé à ajouter un passage un temps envisagé, où ils auraient évoqué la possibilité « de nouvelles assurances » pouvant être offertes ultérieurement, une formulation qui déplaisait notamment à l’Irlande et à la France.
« Il s’agit maintenant de s’assurer qu’il y aura un vote au Parlement britannique et que le résultat sera positif. Si ce n’est pas le cas, je suppose que nous aurons à nouveau une discussion commune en janvier », a déclaré vendredi le chancelier autrichien Sebastian Kurz.
Une source européenne a cependant déclaré que l’UE n’avait « pas l’intention » de tenir un sommet Brexit en janvier. Le vote britannique doit intervenir avant le 21 janvier.
Vendredi, le Premier ministre belge a souligné que les 27 se préparaient désormais à toute éventualité: « Nous allons veiller à préparer toutes les hypothèses », dont celle d’un « no deal ».
L’absence d’accord suscite les plus vives inquiétudes dans de nombreux secteurs économiques, s’ajoutant au scénario cauchemardesque d’une paralysie du trafic aérien et d’embouteillages à n’en plus finir entre le Royaume-Uni et le Continent.
Mercredi prochain, la Commission européenne doit publier « toutes les informations généralement utiles qui concernent la préparation d’un Brexit sans accord », a annoncé M. Juncker dans la nuit de jeudi à vendredi.
LNT avec AFP