
Au Maroc, la croissance économique serait-elle de retour ? Celle-ci, qui puise son essence du PIB agricole et du PIB hors agriculture, pour bien insister sur l’impact de la pluviométrie sur les performances économiques chez nous, semble avoir pris un bon virage cette année !
Alors que l’activité économique connaît une évolution favorable depuis le début de 2017, les craintes persistaient sur un éventuel retournement de tendance, parce que les 4% de croissance prévus en 2016 s’étaient réduits à 1% à la fin de l’année dernière, tandis que d’autres prévisions du genre ne s’étaient pas réalisées dans le passé.
L’espoir renaît
Et le climat des affaires laissait transparaître les inquiétudes d’une crise qui a notablement impacté le comportement des opérateurs économiques du fait de sa durée.
D’économies en économies, l’austérité a plombé les opérateurs de tous les secteurs, arrêté les investissements et instauré une attente caractérisée par le manque de confiance.
Il faut reconnaître qu’il y avait de quoi, sachant que chez nous les investisseurs concentrent souvent leurs mises dans un ou deux secteurs en vogue, comme ce fut le cas du textile il y a plus de deux décennies, avant que nombres d’entreprises de ce secteur ne ferment du fait d’un management déficient, d’un manque d’anticipation et d’une productivité insuffisante.
Fès est l’exemple d’une telle déroute, elle qui était au début des années 80 la seconde ville industrielle du Royaume !
C’est également le cas de l’immobilier, victime il y a deux ans de l’éclatement d’une bulle dont les effets néfastes se font encore sentir aujourd’hui.
La croissance économique pour être durable et bénéficier à tous, doit être diversifiée, provenir de diverses activités et évidemment ne plus être dépendante des aléas climatiques.
C’est ce que le Maroc s’essaie à faire avec sa politique de développement et de transformation industrielle, mais aussi de dynamisation de la croissance.
Et c’est la première fois que l’on constate un dynamisme continu des activités tertiaires et primaires, ainsi que la bonne tenue des activités secondaires dans l’ensemble, comme en attestent les indicateurs conjoncturels publiés par la DEPF, laquelle a le grand mérite de fournir rapidement des chiffres significatifs.
Les indicateurs, verts comme l’herbe printanière
Ainsi après une chute en 2016, la valeur ajoutée agricole a connu un net rebond en 2017 avec une progression notable de la production céréalière de 203% et une bonne tenue des autres filières agricoles.
Mais si l’on devait s’arrêter là, on ne serait pas sorti de l’auberge !
La production de phosphates, autre source de croissance aléatoire du fait de sa dépendance envers la demande internationale, connaît elle aussi une hausse de la production de phosphate de roches de 26,1%.
Cependant, c’est surtout, le secteur du BTP, longtemps sinistré avec une stagnation des ventes de ciment, qui s’illustre aujourd’hui avec une hausse de ces dernières de 42,2% en juillet 2017, atténuant ainsi leur rythme de repli à -4% à la fin du même mois après -9,2% à fin juin 2017.
Du jamais vu, ni connu depuis au moins 5 ans ! D’ailleurs, le secteur immobilier, consommateur de ciment s’il en est, commence à faire transparaître des tensions qui se manifestent par un taux d’accroissement des crédits à l’immobilier à +3,8% à fin juin 2017, contre +2,1% un an auparavant.
Le meilleur à venir ?
De même, le Maroc continue à profiter de sa réputation de havre de paix avec des indicateurs touristiques qui poursuivent leur dynamique haussière.
A fin juin 2017, les arrivées au Maroc avaient connu une hausse de 9,2% et les nuitées de 17,7%, sachant que l’on peut tabler sur de meilleures performances encore en juillet et août d’autant que le trafic aérien des passagers et l’activité portuaire globale ont progressé respectivement de 11,5% et de 10,1%, à fin juin 2017.
Dans un contexte d’inflation maîtrisée d’à peine +0,9% à fin juin 2017, la demande intérieure, argument économique de taille pour pérenniser la croissance, maintient une tendance positive, soutenue par une performance agricole exceptionnelle, l’évolution favorable des crédits à la consommation (+4,4% à fin juin 2017), ainsi que de la création de 58.000 postes d’emplois rémunérés au deuxième trimestre 2017.
Ces créations d’emplois, aussi minimes soient-elles, ne sont-elles pas la preuve concrète d’une renaissance de la croissance économique ?
Inversement, ne savons-nous pas que pour répondre aux attentes massive des jeunes, l’éducation et l’emploi sont les seules réponses ?
L’effort d’investissement, qui était porté essentiellement par l’État, se diversifie comme en témoigne en 2017, la bonne tenue des crédits à l’équipement, en progression de+9,4% à fin juin 2017.
Mais aussi, par les importations des biens d’équipement, les achats des demi-produits qui ont augmenté, respectivement, de 1,8%, 2,8%.
Quant aux flux d’IDE, ils ont explosé à plus de 33,8% à fin juillet 2017, certainement boostés par l’usine Peugeot Citroën de Kenitra.
Les exportations de biens, autre indicateur de création de valeur, se sont accrues de 7,1% à fin juillet 2017, soit +10,1% pour les exportations de l’agriculture et l’agro-alimentaire, +7,9% de phosphates et dérivés, +2% de l’automobile, +10,3% de l’aéronautique et +6,4% de l’électronique.
Oui, mais…
Pourtant, le secteur automobile ne fait pas encore exploser nos exportations d’autant que l’on sait que pour la production de Renault Melloussa en particulier elles ne donnent pas lieu à des rentrées de devises conséquentes du fait d’un taux d’intégration limité, officiellement établi à 40 % mais qui, en réalité, dépasserait à peine les 18 % !
Sur le plan financier à fin juin, le rythme de hausse des crédits bancaires s’établissait à +6,2% contre +2% l’année dernière et une quasi-stagnation les années précédentes, signe d’une re-dynamisation de l’activité économique.
Deux mauvais indicateurs persistent cependant dans ce bilan économique.
Le premier relève des importations, lesquelles ont enregistré un accroissement de 7%, s’expliquant à hauteur de 59,3% par le renchérissement de la facture énergétique.
Un tournant que le Maroc aurait du mal à diriger s’il devait se confirmer.
Heureusement, et pour différentes raisons les cours du pétrole ne crèvent pas le plafond de 50 dollars le baril.
En revanche, le rythme de baisse des réserves internationales nettes s’accentue, à -14,7% contre uniquement -5,8% le mois précédent et +24,7% à fin juin 2016. C’est dire que le solde extérieur du Maroc s’est creusé de 10 points en un mois…
En conséquence, le marché interbancaire a eu besoin de plus de liquidités cet été, poursuivant son creusement au cours du mois de juillet 2017, certes du fait de la hausse de la circulation fiduciaire positive et signe de la dynamisation de l’économie, mais aussi à cause du repli des réserves internationales nettes, poussant le taux interbancaire à 2,32%
Bank Al-Maghrib a injecté pas moins de 62,3 milliards de dirhams en juillet contre 48,7 milliards en juin et 22,3 milliards en mai.
Un niveau record qui témoigne d’une certaine surchauffe …
Afifa Dassouli