« Conjoncture sombre et incertaine », tels sont les termes choisis par le FMI pour qualifier les perspectives de croissance mondiale. Six mois de guerre en Ukraine et toujours pas de semblant de sortie de crise en vue dans ce dossier. Canicules généralisées, feux de forêts et des millions d’hectares cumulés ravagés par les flammes et des victimes humaines à déplorer. Relèvement des taux directeurs des banques centrales face à une inflation et des dettes publiques qui explosent. Crise politique en Italie où l’extrême droite est aux portes du pouvoir.
Rien ne présage que la situation s’améliore à l’international dans les mois à venir alors que le monde peine à juguler les conséquences économiques et sociales de la pandémie de la Covid-19. Ce climat chargé en négativité et en inquiétudes, avec des populations partout dans le monde qui souffrent de ces crises multiformes, est le terreau privilégié des populismes de tout bord et des adeptes de la poudre de perlimpinpin.
Parce que lister les problèmes, pointer du doigt les responsables, haranguer les foules, exploiter les vulnérabilités des plus démunis, en somme mettre de l’huile sur le feu, est désormais à la portée de tous les commentateurs de la vie publique.
Le Maroc ne déroge pas à la règle, loin s’en faut. Notre pays, bien qu’adoré de tous ces concitoyens, n’est ni membre de l’Europe, ni du G8 ou d’aucun autre G d’ailleurs. Pays en voie de développement, il dispose de moyens limités et subit de plein fouet les effets externes de son ouverture économique et commerciale au reste du monde.
Alors, bien sûr, ce n’est pas parce que la situation est catastrophique partout ailleurs que les Marocains doivent accepter avec résignation leur sort, face par exemple à l’augmentation vertigineuse et intenable du prix des hydrocarbures à la pompe.
Mais, pour autant, il apparait clairement qu’un certain manque de responsabilité et d’effort collectif nous fasse défaut. Les attaques musclées, coordonnées et anonymisées contre le gouvernement, pourtant démocratiquement élu et très récemment, sont certainement légitimes sur le fond, mais elles sont fortement entachées par la forme qui les décrédibilise. Quelle alternative propose-t-on réellement à nos compatriotes ? Où sont ce parti politique et ces hommes et femmes providentiels qui pourraient sauver le pays et qu’on empêche ? Pourquoi ne sommes-nous pas capables d’avoir un débat démocratique constructif sur la base des acquis que nous avons et qui ont pourtant été durement atteints ? Avons-nous à ce point la mémoire courte pour ne pas se rappeler des Printemps arabes, du 20 février, de la Constitution de 2011, du Hirak du Nord et de 10 années aux mains d’un parti qui a éclairé tout le pays d’une lanterne ?
En politique, comme dans de nombreux domaines, la nuance est importante, personne n’est blanc ou noir, et il faut se méfier de tous ceux qui se parent de toutes les vertus. Exploiter la souffrance économique de nos concitoyens en prétendant qu’elle n’est pas adressée par les dirigeants actuels est de la démagogie et de l’irresponsabilité. Cela masque les vrais problèmes, cela empêche de pointer les vraies responsabilités et cela alimente la vindicte publique de manière stérile en attendant qu’autre chose ne focalise son attention.
A l’approche de la Fête du Trône, mais aussi à la veille des célébrations nationales du mois d’août, ce seront encore une fois, certainement les discours royaux qui viendront rappeler aux uns et aux autres leur responsabilité face aux orientations de fond auxquelles notre pays aspire.
Zouhair Yata