Maghreb Steel sera-t-elle sauvée pour la seconde fois ?
A cette question, une réponse positive semble se dessiner. En effet, de nouveau face à ses dettes, à la fin du moratoire de 3 ans accordé par les banques pour le remboursement d’une dette colossale de 6 milliards de dirhams, la société s’est retrouvée comme prise dans un étau qui l’a mise dans une situation intenable …
Il faut sauver le « soldat » Maghreb Steel
Maghreb Steel, « notre aciérie nationale », mise en restructuration en 2014, vit de sérieux problèmes alors même que le management désigné à cet effet a relancé sonactivité comme en témoigne le ratio Ebitda ou résultat d’exploitation, lequel n’a cessé de s’améliorer ces trois dernières années.
La cause réside dans le fait que le protocole d’accord, d’une durée de trois ans, signé entre l’actionnaire fondateur, la famille Sekkat et ses bailleurs de fonds, les banques, est arrivé à son terme cette année.
Et donc, le temps est venu que tout ce beau monde se remette autour de la table pour recapitaliser la société et libérer son activité du poids de la lourde dette de 6 milliards de dirhams qui pèse sur l’entreprise et remet en cause sa pérennité.
Dans l’incapacité de réaliser cette recapitalisation, la société s’est trouvée devant les exigences des banques qui ont menacé d’arrêter le financement de son fonds de roulement.
Face à un tel blocage, le management n’a eu cesse d’essayer de trouver un accord avec les banques, mais en vain !
Le Directeur général de Maghreb Steel, M. Amar Drissi, n’a eu cesse de mettre en œuvre toutes les solutions possibles et imaginables pour sauver l’entreprise, lui a qui l’on doit le premier sauvetage de l’aciérie, mené avec succès depuis trois ans.
La première solution envisagée a été de trouver un partenaire industriel étranger en mandatant une banque d’affaires.
Un opérateur international présentait une option de choix car Maghreb Steel est déjà mondialisée et a besoin, à ce titre, d’une alliance avec un acteur stratégique, auquel elle pourrait s’adosser.
Cet acteur, outre le financement, aurait pu lui apporter de l’innovation, de la Recherche & Développement, de l’ouverture sur des marchés, etc.
Les candidats de plusieurs nationalités, y compris chinoise et sud-coréenne n’ont pas manqué, mais le lourd endettement de la société constituait un très gros handicap !
Une éventuelle négociation dans ce sens devait intervenir entre le repreneur, les banques et l’actionnaire historique, pour qu’in fine, Maghreb Steel revienne à un endettement soutenable.
Résultat des courses aujourd’hui, on apprend qu’une solution nationale a été trouvée et qu’elle
consisterait en un rapprochement de capital entre Sonasid et Maghreb Steel.
L’une et l’autre ont été récemment redressées et font des aciers différents, la première dans le rond à béton, la seconde dans l’acier plat.
Bien sûr, les actionnaires du futur ensemble ne sont pas encore connus même si les banques créancières de Maghreb Steel en sont des « propriétaires économiques » tant qu’elles n’auront pas recouvré leurs créances.
Un nouvel ensemble sidérurgique, national, marocain, va naître et se développer certainement en Afrique.
Maghreb Steel, abandonnée par ses actionnaires fondateurs et dont la santé financière a atteint un stade de délitement avancé, va être sauvée.
L’histoire d’une remise à flot
Car la situation des capitaux propres de Maghreb Steel s’est détériorée de la façon suivante :
Maghreb Steel avait un capital social de 2,6 milliards de dirhams, lequel, sous le poids des pertes enregistrées au niveau de son activité, est tombé à moins de son quart en 2014. Cela avait mis la société sous l’obligation légale, mais sans incidence économique, de se recapitaliser dans un délai de deux ans.
Pour corriger cette situation et compte tenu des pertes structurelles énormes cumulées par la société, un artifice comptable a été utilisé pour réduire le capital du montant des pertes et ainsi ne pas avoir à l’augmenter.
Résultat, le capital de Maghreb Steel, après incorporation des pertes, se monte aujourd’hui à de 500 millions de dirhams.
C’est dans ce contexte qu’un protocole d’accord a été signé en 2014, entre les actionnaires et les banques.
Il stipulait de mettre entre parenthèses le problème de l’endettement et de l’insuffisance de capitaux propres, pour une durée de trois ans, afin de s’assurer que Maghreb Steel était susceptible de se redresser au niveau opérationnel.
Et pour répondre à cet objectif, un nouveau management avait été nommé pour ce mandat.
Il faut rappeler que ce protocole était intervenu parce que les actionnaires fondateurs ne pouvaient pas re-capitaliser Maghreb Steel, alors même qu’ils avaient engagé un très lourd investissement, assorti d’un financement bancaire de 6 milliards de dirhams.
D’où la stratégie adoptée de séparer les problèmes du « haut du bilan social » de la relance de l’activité opérationnelle.
Aujourd’hui, trois ans après, alors que le protocole en question est arrivé à son échéance, aucun plan de redressement de la structure financière n’a pu été envisagé pour Maghreb Steel avec ses actionnaires.
Le management, dans rôle de gestionnaire, se retrouve dans la situation où l’opérationnel est impacté par les insuffisances de capitaux propres et le poids de la dette.
Et tant que la question du haut du bilan ne sera pas réglée, elle impactera les efforts du management au niveau de l’activité.
Concrètement, Maghreb Steel, en cette fin du protocole de 3 ans, signé entre les banques et ses actionnaires, s’est retrouvée face à des banquiers qui n’acceptent plus de financer le fonds de roulement, (BFR) de l’aciérie alors que son exploitation est exposée à une augmentation du prix de la matière première.
Ils ont exigé le remboursement des dettes antérieures et mettent ainsi en péril la continuité de l’aciérie qui est dans l’incapacité du supporter les lourdes charges financières qui en découlent.
Pourtant en trois ans, l’activité s’est redressée, le management a mis en place une nouvelle gestion opérationnelle qui s’est traduite par des résultats acquis au bout de deux années seulement et que traduit un EBITDA positif.
Et donc, Maghreb Steel, en dehors de son mauvais haut de bilan, a effectivement une réelle viabilité opérationnelle.
Cet indicateur des plus convaincants, l’Ebitda, est passé de – 216 millions de dirhams en 2015 à + 200 millions de dirhams en 2017.
Maghreb Steel, est redevenue l’aciérie du pays. Elle finance en amont et en aval des clients et fournisseurs, pour un milliard de dirhams, soit un vrai écosystème de l’acier plat.
Son développement entre dans le cadre de la stratégie industrielle du pays. Il s’agit d’un secteur qui évolue conformément au Plan de Développement Industriel mis en place par le ministre Moulay Hafid Elalamy avec la stratégie des écosystèmes.
Maghreb Steel jouant le rôle d’un acteur stratégique, sa pérennité est cruciale, et son rapprochement avec Sonasid est une solution qui renforce l’industrie sidérurgique nationale et l’ensemble de l’écosystème
Afifa Dassouli