Le Premier ministre britannique Boris Johnson et le négociateur de l'UE Michel Barnier le 17 octobre 2019 à Bruxelles © AFP/Archives Kenzo TRIBOUILLARD
L’Union européenne et le Royaume-Uni se lancent lundi dans la bataille de l’après-Brexit en affichant les lignes rouges de leur future relation, qui reste à bâtir, au prix de négociations ardues et déjà tendues.
Passé la joie ou les regrets du divorce après 47 ans de mariage houleux, les deux parties doivent se mettre d’accord sur la nouvelle architecture de cette relation, en particulier commerciale, noyau dur des discussions.
Comme il est de mise au début d’une négociation, les deux camps ont affiché des positions très fermes.
Le Premier ministre britannique Boris Johnson doit avertir que son pays refusera un accord qui lui imposerait de continuer de respecter certaines règles de l’Union, selon des extraits d’un discours attendu lundi sur sa vision du Royaume-Uni, après le divorce.
« Il n’y a pas besoin d’un accord de libre-échange qui implique d’accepter les règles de l’UE en termes de concurrence, de subventions, de protection sociale, d’environnement ou autre », doit-il déclarer.
Le négociateur de l’UE, Michel Barnier, a lui posé dimanche deux conditions à la conclusion d’un traité commercial: « un accord sur les règles de jeu communes », afin que Londres ne devienne pas un concurrent déloyal; et un règlement de la question ultra-sensible de la pêche.
– Discussions marathon –
Ajoutant à la difficulté de ce front contre front, ces négociations devront se tenir à un rythme marathon puisque Boris Johnson refuse de prolonger la période de transition, pendant laquelle les Britanniques continueront d’appliquer les règles européennes.
Or, c’est pendant cette période, qui s’achève le 31 décembre, que doivent se tenir les pourparlers.
Michel Barnier dévoilera lundi à 11H00 GMT les termes de son mandat de négociation, fixant les priorités et les lignes rouges de l’UE.
Le bloc craint plus que tout de voir émerger une économie dérégulée à sa porte.
Le négociateur européen connaît déjà les embûches du dossier puisqu’il a négocié le traité du Brexit sur les modalités de divorce, pendant plus de deux ans.
Son mandat de négociation ne devant être approuvé que fin février par les Etats membres, les négociations ne s’ouvriront officiellement que début mars.
Dans ce très court laps de temps, tous les sujets entre Bruxelles et le Royaume-Uni, devenu un pays tiers, ne sauraient être traités et Bruxelles s’est fixé des priorités.
Les négociations porteront principalement sur le partenariat économique, en particulier l’accord de libre-échange, les questions de sécurité et le dispositif juridique prévu pour régler les litiges.
Pour les Européens, l’accès au marché unique du continent, fort de ses quelque 440 millions de consommateurs, sera conditionné par le respect des normes sanitaires, environnementales, sociales et fiscales, sans oublier celles sur les aides d’Etat aux entreprises.
Ce marché est crucial pour Londres puisque l’UE reste son premier partenaire commercial.
Les Européens veulent mener les négociations en parallèle sur tous les sujets afin de limiter le risque de divisions, duquel les Britanniques pourraient tirer profit.
– La pêche, vitale pour plusieurs Etats –
La pêche, sur laquelle les deux parties ont promis de s’entendre avant le 1er juillet, sera l’un des sujets ultra-sensibles de la négociation.
Les pêcheurs de plusieurs Etats membres, comme la France et le Danemark, sont dépendants des eaux britanniques. Ces dernières représentent 30% du chiffre d’affaires des pêcheurs français.
De son côté, Boris Johnson a souligné que « reprendre le contrôle » de ces eaux poissonneuses était de première importance et promis « une nouvelle politique de pêche nationale fantastique ».
La pêche pourrait constituer une monnaie d’échange dans ces discussions, par exemple pour l’accès au continent des services financiers britanniques, cruciaux pour la City de Londres.
La France sera « extrêmement vigilante » sur cette question, a prévenu Paris.
Un premier bilan sera dressé fin juin, ce qui devrait permettre d’évaluer le risque d’un « no deal », un spectre qui va continuer à planer, avec ses conséquences désastreuses, sur les discussions.
LNT avec Afp