Le Royaume-Uni va abandonner des droits de douane imposés sur des produits américains dans le cadre du litige opposant Airbus et Boeing, se désolidarisant de l’UE dans ce dossier avec l’espoir d’obtenir un accord commercial post-Brexit avec Washington.
Cette décision, annoncée mercredi, s’appliquera à partir du 1er janvier, une fois le pays sorti du marché unique européen et de l’union douanière.
Elle doit permettre « de faire retomber les tensions pour que les Etats-Unis et le Royaume-Uni avancent vers la prochaine phase de leur relation commerciale », explique le ministère du Commerce international dans un communiqué.
Il s’agit également de « trouver une solution à ce conflit commercial » autour des avionneurs, précise le ministère.
Londres a toutefois précisé qu’il se réserve le droit d’imposer à nouveau des droits de douane si besoin, ce qui n’est pas du goût de Washington, qui assure que le Royaume-Uni n’a « aucune autorité pour imposer des droits de douane ».
Dans une réponse cinglante, le gouvernement américain souligne qu’en quittant l’Union européenne, Londres ne peut se prévaloir du droit, accordé récemment à Bruxelles par l’OMC, d’imposer des tarifs douaniers aux produits américains dans le cadre de ce litige.
Le porte-parole officiel du Premier ministre britannique Boris Johnson a pourtant déclaré, plus tôt mercredi, que le ministère du Commerce international avait « confirmé que nous pourrions légalement imposer ces tarifs en dehors de l’UE ».
– Fromage et whisky –
L’avionneur européen Airbus et son concurrent américain Boeing, et à travers eux l’Union européenne et les Etats-Unis, s’affrontent depuis octobre 2004 devant l’OMC sur les aides publiques versées aux deux groupes, jugées illégales de part et d’autre.
Les Etats-Unis infligent depuis 2019 des droits de douane punitifs sur des importations européennes comme le vin, le fromage et l’huile d’olive ou le whisky écossais, ainsi que des taxes de 15% sur les avions Airbus. Washington y avait été autorisé par l’OMC, jusqu’à 7,5 milliards de dollars.
En représailles, l’UE applique depuis cette année des droits de douane supplémentaires sur 4 milliards de dollars d’importations en provenance des Etats-Unis.
En revanche, le Royaume-Uni précise dans son communiqué mercredi qu’il maintiendra les droits de douane en réponse à ceux imposés par les Etats-Unis sur l’aluminium et l’acier, un dossier distinct de celui des avionneurs.
« En tant que nation indépendante du point de vue commercial, nous avons enfin la capacité d’établir ces droits de douane selon nos intérêts », a déclaré Liz Truss, ministre du Commerce international.
Le Royaume-Uni mise énormément sur la conclusion d’accords à travers le monde pour prospérer après le Brexit et une fois achevée la période de transition fin décembre.
– « No deal » –
Le pays espérait négocier au plus vite un accord avec les Etats-Unis, mais il semble difficile qu’il puisse intervenir avant la fin de l’année, compte tenu de la pandémie et de la transition du pouvoir aux Etats-Unis.
Londres a déjà annoncé un vaste accord récemment avec le Japon. Le pays a également convenu d’un accord commercial provisoire avec le Canada, signé mercredi et qui reproduira à partir du 1er janvier sur une base bilatérale l’accord dont le pays bénéficiait en tant qu’Etat membre de l’UE.
Mais les discussions sur la relation post-Brexit avec l’UE, de loin son premier partenaire commercial, sont très incertaines, faisant craindre un « no deal » à trois semaines de la fin de la période de transition.
Le syndicat Unite, le plus important au Royaume-Uni, a d’ailleurs fustigé l’annonce du gouvernement sur l’abandon de droits de douane imposés sur des produits américains, estimant qu’elle « pourrait compromettre les efforts pour obtenir un accord commercial post-Brexit avec l’UE ».
Il pointe en outre le fait que « cela semble avoir été fait sans réciprocité de la part des Etats-Unis, qui imposent des droits de douane punitifs sur les produits britanniques comme le whisky écossais », selon Steve Turner, un responsable de Unite.
LNT avec Afp