Une capture d'écran de la télévision du Parlement britannique montrant le ministre des Affaires étrangères anglais, Dominic Raab, s'exprimer sur le travail forcé en Chine, le 12 janvier 2012 à Londres © PRU/AFP
Face à la « barbarie » de Pékin envers les Ouïghours, le Royaume-Uni et le Canada ont dévoilé mardi des mesures pour empêcher les marchandises liées au travail forcé présumé de cette minorité musulmane dans la région du Xinjiang d’arriver jusqu’aux consommateurs britanniques.
Selon des experts étrangers, un million d’Ouïghours, principale minorité ethnique du Xinjiang, ont été placés en détention ces dernières années dans des camps de rééducation politique.
Pékin dément et affirme qu’il s’agit de centres de formation professionnelle destinés à éloigner les personnes de la tentation de l’islamisme, du terrorisme et du séparatisme après une série d’attentats attribués à des Ouïghours.
C’est une « barbarie que l’on espérait reléguée au passé qui est pratiquée aujourd’hui », a déclaré le chef de la diplomatie Dominic Raab devant les députés britanniques, évoquant « la détention arbitraire, la rééducation politique, le travail forcé, la torture et la stérilisation forcée » des Ouïghours « à l’échelle industrielle ».
Le Royaume-Uni avait le « devoir moral » de réagir, a poursuivi le ministre, annonçant des mesures visant à interdire les importations et exportations liées au travail forcé des Ouïghours.
« Nous devons agir pour assurer que les entreprises britanniques ne participent pas aux chaînes d’approvisionnement qui mènent jusqu’aux portails des camps d’internement dans le Xinjiang », a-t-il détaillé.
Il s’agit aussi de « veiller à ce que les produits issus des violations des droits humains ne finissent pas dans les rayons des supermarchés où nous faisons nos achats ici », a-t-il ajouté.
Dans un contexte de relations déjà tendues, l’ambassadeur chinois à l’ONU, Zhang Jun, a demandé au Royaume-Uni « de cesser de s’ingérer dans les affaires intérieures de la Chine ».
Après une intervention de Londres sur les Ouïghours lors d’une réunion du Conseil de sécurité sur la lutte antiterroriste, le diplomate chinois a dénoncé une « attaque purement politique » et « sans fondement » du Royaume-Uni.
– Amendes –
« Gravement préoccupé », le Canada a annoncé emboîter le pas au Royaume-Uni, annonçant « interdiction d’importer » au Canada « des biens issus en tout ou en partie du travail forcé ».
Dans le détail au Royaume-Uni, des directives vont être émises en direction des entreprises britanniques, qui encourront des amendes si elles ne peuvent démontrer que leurs approvisionnements ne sont pas liés au travail forcé dans le Xinjiang, immense région du nord-ouest de la Chine constituant un important fournisseur de coton au niveau mondial.
Cette obligation de transparence sera étendue au secteur public, a souligné Dominic Raab, et les entreprises tirant profit du travail forcé seront exclues des marchés publics.
Début janvier, la chaîne britannique de grands magasins Marks & Spencer s’était engagée à ne pas utiliser dans les vêtements qu’elle vend du coton provenant du Xinjiang. Il s’agit de la première grande entreprise britannique à avoir rejoint un « Appel à agir » pour les Ouïghours, lancé par quelque 300 ONG.
Dans l’opposition travailliste comme dans les rangs des conservateurs au pouvoir, des députés ont estimé que les mesures détaillées mardi n’allaient pas suffisamment loin, plaidant pour des sanctions contre des responsables chinois dans le Xinjiang.
L’annonce de ces mesures intervient peu après la conclusion fin décembre d’un accord de principe critiqué par les défenseurs des droits humains sur les investissements entre la Chine et l’Union européenne, dont le Royaume-Uni ne fait plus partie.
Elle devrait tendre davantage les relations entre Londres et Pékin, surtout après les critiques formulées par Londres à l’égard de la répression contre les mouvements pro-démocratie à Hong Kong.
Le gouvernement britannique s’est élevé contre la loi controversée sur la sécurité nationale, la considérant comme une grave violation du traité sino-britannique sur la rétrocession de l’ancienne colonie britannique à la Chine en 1997.
Autre sujet qui fâche, l’exclusion par Londres de l’équipementier chinois Huawei, accusé d’espionnage par Washington, de son réseau 5G. Un projet de loi en ce sens a été présenté en novembre au Parlement.
LNT avec Afp