La façade de la Banque d'Angleterre à Londres le 6 août 2020
L’inflation au Royaume-Uni a accéléré en juin à 9,4% sur un an, atteignant ainsi un nouveau sommet en quarante ans – en pleine crise du coût de la vie – qui risque de pousser la Banque d’Angleterre à durcir sa politique de taux.
L’accélération des prix en juin a été nourrie par les carburants et l’alimentation, précise l’Office national des statistiques (ONS) dans son rapport mensuel publié mercredi, tandis que les prix des logements et des transports comptent aussi parmi les facteurs inflationnistes.
En mai, l’inflation atteignait 9,1% sur un an. La Banque d’Angleterre (BoE) estime qu’elle pourrait monter jusqu’à plus de 11% à la fin de l’année, dopée par l’invasion russe de l’Ukraine, l’envolée des prix du gaz qu’elle a entraînée, et un marché du travail très tendu.
D’autant que la faiblesse actuelle de la livre « menace d’exacerber encore l’inflation dans les mois à venir », avertit Karl Thompson, économiste au centre de réflexion CEBR.
Le gouverneur de la Banque centrale Andrew Bailey a prévenu mardi que l’institut monétaire, pour tenter d’endiguer cette flambée des prix, pourrait accélérer le rythme de ses hausses de taux en les remontant de 50 points de base en août. Ce serait le plus important tour de vis en 27 ans.
Pour Paul Dale, de Capital Economics, la Banque d’Angleterre va probablement monter ses taux d’intérêt au fil des mois de 1,25% actuellement « à 3% même si l’économie est en récession ».
L’économie britannique voit en effet les nuages s’accumuler. Le FMI a prédit en avril que le Royaume-Uni devrait connaître la pire croissance des pays du G7 l’an prochain. La Banque d’Angleterre prévoit une contraction.
Quant à l’inflation, elle est pour l’instant la pire des pays du G7 selon les dernières statistiques disponibles et devrait le rester dans les mois à venir, selon plusieurs organismes de prévisions.
À titre de comparaison, la hausse des prix dans la zone euro se situait à 8,6% sur un an le mois dernier. Elle atteignait 9,1% sur un an en juin aux États-Unis et 2,1% au Japon en mai.
– Les critiques s’accumulent –
« Les pays de par le monde affrontent la hausse des prix et je sais combien c’est difficile pour les gens ici au Royaume-Uni, donc nous travaillons aux côtés de la Banque d’Angleterre pour la faire retomber », a réagi le ministre de l’Économie et des Finances, Nadhim Zahawi, mettant en avant les aides gouvernementales pour les ménages modestes.
La crise du coût de la vie est un thème central de la campagne des candidats conservateurs à la succession de Boris Johnson à Downing Street et sera probablement tout en haut de l’agenda du prochain Premier ministre alors qu’un hiver difficile se profile.
Les critiques s’accumulent au sujet de la stratégie de la banque centrale, venues notamment des candidats conservateurs, au point qu’Andrew Bailey a cru bon mardi de rappeler l’importance de l’indépendance de la banque centrale.
« La valeur d’un régime se jauge dans les périodes difficiles, pas quand tout va bien », a-t-il insisté mardi.
En attendant, l’escalade des prix dans le contexte de pénurie de travailleurs au Royaume-Uni attise revendications salariales et mouvements de grève.
Mardi, les dernières statistiques officielles sur l’emploi faisaient état d’une chute à un rythme record des salaires réels, c’est-à-dire hors inflation.
Près de la moitié des jeunes de 16 à 25 ans n’ont pas toujours mangé à leur faim l’an dernier, relève une étude commanditée par l’association d’aide aux jeunes SDF Centrepoint.
Et l’écart de richesse entre les 10% de ménages les plus fortunés au Royaume-Uni et ceux qui se situent dans la moyenne a atteint un nouveau record, souligne la fondation Resolution, qui lutte contre la pauvreté et les inégalités.
Cet écart signifie non seulement qu’acquérir son logement devient un rêve inatteignable pour beaucoup mais aussi qu’il devient plus difficile pour de plus en plus de Britanniques de supporter les chocs économiques inattendus ou les poussées inflationnistes, souligne la fondation dans une étude.
LNT avec Afp