Libre Tribune : La location de courte durée, un secteur enfin clarifié par les décrets 2025 ?
Le cabinet Roche Mameri et Associés, réseau Exygene Group, composé de quatre cabinets en France et au Maroc, est spécialisé dans les services financiers aux entreprises. M. Karim MAMERI, associé expert-comptable, et Hakim ESSADIQ, associé responsable du réseau Maroc, ont récemment publié une étude sur le cadre légiférant la location de courte durée après les modifications survenues en 2025.

Face à l’essor des plateformes numériques et à la croissance continue des hébergements touristiques classiques et alternatifs, particulièrement dans les villes touristiques, la LCD fait désormais, en théorie, l’objet d’un encadrement juridique et fiscal renforcé. Les réformes introduites par les décrets de 2024 et 2025 viennent compléter la loi N° 61-00 relative aux établissements touristiques et la loi N° 80-14 encadrant les hébergements alternatifs non classés. Notre étude entend présenter une synthèse claire, complète et à jour de ce cadre réglementaire.
Catégories de location de courte durée
Le dispositif légal distingue désormais deux (2) types d’hébergements touristiques.
Ces différents types d’hébergement répondent à des obligations distinctes en matière d’autorisations, de normes et de fiscalité.
Etablissements touristiques classés : renvoi à la loi n° 61-00
Les hôtels, maisons d’hôtes classées, Riads classés, résidences touristiques, motels, villages de vacances, auberges, campings et autres structures similaires… relèvent historiquement de la loi 61-00, notamment en matière fiscale et de la loi N° 80-14.
Obligations principales
Hébergements alternatifs non-classés : renvoi à loi n° 80-14 et décrets complémentaires
Les logements meublés en LCD sans classement touristique : appartements, studios, villas, Riads non classés, logements gérés en direct, à travers des conciergeries ou plateformes sont soumis à la loi N° 80-14 et à ses décrets d’application de 2023 à 2025.
Obligations 2025
Fiscalité de la location de courte durée
Impôt sur le revenu pour les personnes physiques
La LCD constitue une activité commerciale et est imposée comme telle.
Les revenus issus de la LCD par une personne physique sont soumis au barème progressif de de l’article 73 du CGI. Dans les cas limitatifs de l’exercice de la LCD, exercée par des personnes physiques à titre individuel dans le cadre de l’auto-entrepreneur, prévu à l’article 42 bis du CGI, sont soumis à l’IR selon le taux de 1% du chiffre d’affaires encaissé dont le montant ne dépasse pas deux cent mille (200.000) dirhams pour les prestataires de services.
Toute location non déclarée expose, depuis 2025, à une application renforcée des pénalités prévues par le législateur et inscrites au Code Général des Impôt.
Impôt sur les sociétés pour les personnes morales
Les exploitations opérées par une personne morale sont soumises au taux d’IS prévu à l’article 19 du CGI.
Une distinction essentielle en matière de TVA
Le bénéfice du taux réduit est donc strictement réservé aux hébergements touristiques et restaurateurs classés.
Fiscalité locale
Encadrée par la loi N°07-20 modificative de la loi N°47-06 :
Obligations sociales
Les employés affectés à la gestion de la LCD doivent être déclarés à la CNSS soient en tant que :
Avantages, risques et enjeux
La LCD peut offrir un rendement potentiel plus élevé que la LLD mais expose à une réglementation de plus en plus exigeante de son application.
Avantages
Risques
Perspectives de réformes
Les professionnels appellent à un statut inspiré du modèle français de la Location Meublée Non Professionnelle (LMNP) afin d’encourager la déclaration intégrale des revenus tout en offrant un cadre fiscal incitatif par le biais de l’élargissement de l’assiette.
Un tel modèle favoriserait :
Conclusion
Portée par un cadre réglementaire enfin clarifié, la location de courte durée au Maroc entame une véritable phase de structuration. La consolidation législative de 2025 marque une étape décisive : le secteur se dirige vers davantage de transparence, de professionnalisme et un encadrement mieux maîtrisé. L’objectif est clair : harmoniser les pratiques, renforcer le respect des obligations légales et garantir une croissance durable au service d’une offre touristique modernisée donc plus compétitive.
Sur le terrain, cependant, la mise en conformité des hébergements « alternatifs » avance difficilement. A Marrakech, de nombreux propriétaires ayant tenté la régularisation de leur situation auprès de leur commune d’appartenance se sont heurtés à l’impossibilité de faire enregistrer leur bien en hébergement de courte durée. Ce « vide administratif » est lié à la non-transmission, à ce jour, du canevas déterminant la catégorie à attribuer à ce type d’hébergements, par l’office du tourisme, pour l’obtention de la déclaration d’existence ou d’activité. En conséquence, les hébergeurs ne peuvent ni déclarer ni payer les taxes de séjour ni déposer les fiches et registres de nuitées auprès des autorités de sécurité. Pour tenter de débloquer cette situation dans les meilleurs délais, il est désormais conseillé de déposer des lettres de réclamation officielles auprès des bureaux d’ordre des Wilayas, dans l’espoir d’accélérer les procédures de régularisation.
