On dit souvent que la fiction rejoint la réalité et les explosions de bippers et de talkies au sud Liban en préparation à l’intervention israélienne contre le Hezbollah semblaient effectivement sorties d’un scénario de film hollywoodien.
Pourtant, c’était en réalité les prémisses d’une nouvelle phase dans la guerre continue et totale que mène Israël. Plus de 500 Libanais ont été tués et le bilan ne va cesser de s’alourdir, les familles déplacées, les orphelins et les parents endeuillés. Pourquoi ? Parce que pour Israël, comme les Palestiniens, supposé être tous des suppôts du Hamas, les Libanais sont tous ceux du Hezbollah. Et donc, cela justifie de les tuer en quantité sans avoir à séparer le grain de l’ivraie, en faisant fi de toutes les règles de la guerre, des conventions internationales, de la retenue même qu’une démocratie est sensée s’imposer.
Attention, il est primordial en revanche de faire preuve de retenue lorsqu’on ose critiquer ouvertement la politique mortifère de l’État israélien, de bien choisir ses mots pour ne pas ouvrir la boite de Pandore de l’antisémitisme. Mais que risque-t-on de plus que ce qui se passe depuis près d’un an ? Chaque israélien victime des attaques du 7 octobre dernier a été vengé plus de 33 fois par Netanyahu, en ne prenant en compte que le bilan à fin août de plus de 40 000 morts du côté Palestinien. Est-ce que le Hamas a disparu pour autant ? Par analogie, une fois que le Liban aussi sera détruit, le Hezbollah sera-t-il de l’histoire ancienne ? Rien n’est moins sûr.
En revanche, ce qui semble évident, c’est que la paix n’est pas près de pointer son nez. Qui la souhaite d’ailleurs ? L’ONU(lle), où tous les pays sont actuellement réunis en grande pompe avec petits fours pour discuter encore et toujours ? L’Arabie saoudite qui voit en l’opération israélienne au Liban un revers de plus pour son grand rival l’Iran, grand marionnettiste derrière le Hezbollah et le Hamas ? Où est passé l’Iran d’ailleurs, véhémente et belliqueuse envers Israël et qu’on croyait prête à croiser le fer ?
Peut-être que la paix viendra de la Turquie d’Erdogan, membre de l’OTAN dont 60% des conflits armés mondiaux sont à sa frontière et dont la profondeur des relations avec Israël est bien documentée ? L’Égypte enfin qui a sécurisé récemment une aide colossale de l’Union européenne pour s’éviter une faillite budgétaire ?
Toutes les grandes puissances régionales focalisent leur cynisme géopolitique sur des micros-territoires comme la bande Gaza ou le sud Liban, au détriment de populations civiles dont la haine de l’adversaire ne fait que s’exacerber dans ce contexte. Qui peut imaginer aujourd’hui que les Palestiniens qui ont tous connu un deuil cette année dans leur entourage proche aient envie de faire la paix avec Israël ? De même, comment imaginer qu’en Israël la donne peut changer quand après avoir détruit Gaza, la colonisation de la Cisjordanie a repris de plus belle et que les exactions des colons passent inaperçues ?
Et, malgré l’immobilisme des voisins arabes limitrophes de la région, le soutien inconditionnel des pays occidentaux à Israël, Oncle Sam en tête, qui se fantasment dans une guerre de religions digne des croisades des Templiers en Terre Sainte, certains trouvent quand même le moyen de reprocher au Maroc de ne pas être assez véhément vis-à-vis d’Israël. Faut-il le rappeler, alors que le Maroc est un des rares pays musulmans à compter une communauté de citoyens juifs nationaux, que son héritage judéo-musulman est inscrit dans sa Constitution, n’a cessé d’appeler à un cessez-le-feu, s’est mobilisé pour envoyer de l’aide humanitaire aux Palestiniens et œuvre diplomatiquement dans différents forums pour soutenir une solution de paix.
Pour autant, le Maroc en échange n’a pas bénéficié d’un quelconque soutien de la part du mouvement palestinien dans sa cause nationale au Sahara. Les dirigeants du Hamas adressent à Tebboune des félicitations pour sa réélection mais n’ont jamais appelé à manifester pour notre cause comme nous le faisons pour les soutenir. En réalité, selon l’adage « les amis de mes ennemis sont mes ennemis », la connivence assumée entre Alger et Téhéran est bien derrière tous les reproches faits au Maroc sur ses positions pourtant très claires sur le sujet de la Palestine.
Pourquoi Rabat devrait se positionner plus avant que Le Caire, Washington, Paris, Londres, Ryad, Ankara, ou même Moscou et Pékin dans le règlement de ce conflit où tous y trouvent leur compte ? Quelle responsabilité avons-nous dans cette conflictualité et que pouvons-nous faire de plus ? La position du Maroc est-elle plus décisive pour régler le problème que n’importe laquelle de ces capitales ?
En attendant, Netanyahu se délecte certainement des divisions entre les opinions publiques et les États, qu’ils soient arabes, musulmans ou occidentaux. Tant qu’il peut user de leur « Licence to Kill », tout le reste n’est que bénéfice.
Zouhair Yata
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