Bank Al-Maghrib a organisé jeudi 14 septembre à Rabat la 3ème conférence annuelle du réseau de recherche des Banques centrales de la région de l’Afrique du Nord et du Moyen-Orient (MENA) sur le thème « Marchés du Travail et Transformation Structurelle ».
À cette occasion, son Wali Abdellatif Jouahri, a souligné que l’emploi dépend principalement de la dynamique économique. Il a affirmé que pour promouvoir l’emploi, il est essentiel de mettre en place des politiques publiques axées sur l’investissement et la croissance. Ces politiques peuvent également avoir un impact positif en améliorant l’éducation, la formation et le capital humain des jeunes.
En outre, M. Jouahri a souligné que la politique publique doit également inclure des mesures et une réglementation appropriée pour faciliter l’embauche, encourager l’emploi salarié et l’entrepreneuriat, et soutenir les personnes ayant des difficultés à trouver un emploi. Cependant, il a noté que la conception et la mise en œuvre de politiques d’emploi efficaces sont complexes et nécessitent une compréhension approfondie des dynamiques du marché du travail et de ses interactions avec l’économie.
Il a également souligné l’importance de l’emploi pour les Banques centrales, car il influence la consommation, l’investissement et les prix des biens et services. Il a noté que la région MENA fait face à un taux de chômage élevé, en particulier parmi les jeunes, et que les femmes sont sous-représentées sur le marché du travail.
M. Jouahri a souligné que les changements récents, tels que le changement climatique, rendent la compréhension de l’évolution des marchés du travail de plus en plus difficile, ce qui complique la formulation de la politique publique. Il a plaidé en faveur d’investissements dans la collecte de données de haute qualité et de leur accessibilité pour aider les pouvoirs publics à répondre aux besoins en matière d’emploi.
Le ministre de l’Inclusion économique, de la petite entreprise, de l’Emploi et des Compétences, Younes Sekkouri, a souligné l’importance de la volonté politique pour mettre en œuvre des réformes sur le marché de l’emploi. Il a également mentionné les stratégies mises en place pour promouvoir l’emploi, notamment le programme « Awrach », qui a enregistré des résultats positifs en 2022.
Le vice-président régional de la Banque mondiale, Ferid Belhaj, a appelé à ouvrir la voie au secteur privé pour créer davantage d’opportunités d’emploi et à assurer une meilleure formation du capital humain en phase avec les besoins du marché du travail.
Invités pour intervenir à cette occasion, Chang-Tai Hsieh, professeur d’économie Phyllis et Irwin Winkelried à l’Université de Chicago Booth School of Business, ont soulevé la question de la « productivité et de l’inadéquation » sur le marché, en mettant également en avant le problème des « privilèges ». Ils ont pris comme exemple la Chine, où en 1998, 80% de l’économie était constituée d’entreprises étatiques, taux qui a fortement baissé avec un fort développement du secteur privé depuis. En ce qui concerne les privilèges, « l’innovation est ce qui peut les éroder ». Et en ce qui concerne les réformes, ils ont suggéré que celles-ci ne devraient pas être excessivement draconiennes, mais plutôt mises en route à travers d’autres approches, par exemple en se basant sur l’intelligence artificielle. Le Pr Chang-Tai a mis en avant sa conviction que les économies, comme les entreprises, doivent avant tout bien cibler leurs marchés et les activités qu’elles maîtrise le mieux, citant l’exemple d’Apple dont 65% des revenus viennent de l’Iphone, plutôt que de s’étendre vers d’autres secteurs où elles seront médiocres.
La troisième édition de la conférence a été organisée par BAM et le bureau de l’économiste en chef de la Banque mondiale pour la région MENA. Elle a pour objectif de discuter des enjeux et des défis auxquels sont confrontés les marchés du travail, en particulier dans la région MENA, en raison de la pandémie de Covid-19, du changement climatique, de la transformation numérique, des tensions géopolitiques et de la montée du protectionnisme, ainsi que de la qualité du capital humain et du développement du secteur privé. La conférence réunit des économistes de renommée internationale, des responsables nationaux et internationaux, des universitaires et des acteurs du secteur privé. Elle précède les Assemblées annuelles du Fonds monétaire international (FMI) et de la Banque mondiale qui auront lieu en octobre à Marrakech.
Selim Benabdelkhalek