L’Académie du Royaume du Maroc met en place le cycle de conférences « Collège de France au Maroc », en collaboration avec l’Institut français du Maroc. La première conférence sera donnée par le professeure Anne Cheng, membre du Collège de France à Paris, sous le thème « Entre orientalisme et modernité : la Chine, miroir ou autre de l’Europe ? », et ce, mercredi 27 juin, au siège de l’Académie du Royaume du Maroc à Rabat.
Ce cycle fait intervenir des professeurs et chercheurs du Collège de France, d’origines et disciplines différentes ; pour 2018 la question de la modernité constituera le fil conducteur des rencontres du cycle « Collège de France au Maroc ».
« L’objectif est d’examiner avec les professeurs du Collège de France, l’état des processus de modernisation dans les différents champs de la société comme dans les diverses aires culturelles », a déclaré à cette occasion M. Abdeljalil Lahjomri, secrétaire perpétuel de l’Académie du Royaume du Maroc.
Et d’ajouter : « Les sociétés contemporaines ne pourront atteindre le développement économique et technologique sans former l’Homme sur le plan intellectuel, afin qu’il puisse occuper une place efficace et influente dans le monde d’aujourd’hui ».
Animée par la professeure Anne Cheng, membre du Collège de France à Paris, sous le thème : « Entre Orientalisme et modernité : la Chine, miroir ou autre de l’Europe », le secrétaire perpétuel a relevé que l’Académie du Royaume s’est engagée à généraliser le savoir et la connaissance, faisant savoir que la rencontre d’aujourd’hui, qui inaugure un cycle de conférences qui se tiendront au Maroc en partenariat avec le Collège de France, découle de la conviction de l’Académie que le meilleur moyen de favoriser la connaissance à tous est de s’ouvrir sur les institutions scientifiques de renom.
« L’ère des académies renfermées est terminée », ajoutant qu’il relève des devoirs de l’Académie du Royaume de s’ouvrir sur les milieux scientifiques et culturels. Par ailleurs, l’Académie du Royaume organisera une série de conférences scientifiques dans les domaines de l’histoire et des arts, en coopération avec l’Institut du monde arabe à Paris, de même qu’elle tiendra des expositions artistiques et des conférences scientifiques, en coordination avec la Fondation nationale des musées consacrées au sujet « trésors de l’islam en Afrique », a annoncé M. El Hjomri.
Elle prévoit également la mise en scène d’une projection artistique intitulée « Machahid » (Des scènes) exposant en image les murailles de la « Kasbah des Oudayas », en guise de contribution à la célébration du projet de Rabat, ville des lumières, a annoncé Lahjomri.
Le but de ces initiatives étant de souligner que l’action menée par l’Académie du Royaume en vue de mettre le savoir et la connaissance à la portée de tous, passe par un partenariat scientifique avec des institutions chargées de la promotion de la culture, la recherche et la science, a, en outre, mis en avant le Secrétaire perpétuel de l’Académie du Royaume.
Pour sa part, Mme Anne Cheng a indiqué, dans son allocution, que ce qu’on peut retenir de l’approche orientaliste de la Chine est généralement « le mythe de la Chine philosophique, construit par la médiation des missionnaires jésuites, et popularisé au 17ème et 18 ème siècle par des philosophes européens du siècle des Lumières, tels que Voltaire et Leibniz ».
D’après la chercheuse, ce mythe a été substitué, à partir du milieu du 18-ème siècle par celui du « despotisme oriental », introduit par Montesquieu et renforcé par la révolution française, tandis que « le mythe de la Chine philosophique a été rejeté de la philosophie définie par Hegel comme le propre exclusif de l’Europe. »
Mme Cheng a, par ailleurs, expliqué que « le mythe de la Chine comme autre radical de l’Europe, se trouve encore aujourd’hui non seulement dans nombre de discours orientalistes, mais aussi dans l’idéologie officielle de la Chine actuelle », faisant savoir que le but de cette rencontre scientifique est de « retracer les déplacements successifs de l’objet ‘Chine’ sur l’échiquier de la géographie intellectuelle ainsi que ses difficultés à se constituer comme sujet agissant de sa propre modernité ».
Née à Paris de parents chinois et ancienne élève de l’Ecole normale supérieure, Anne Cheng a mené des recherches et son enseignement depuis près de 40 ans au CNRS, puis à l’INALCO et à l’IUF.
Elle est aujourd’hui titulaire de la Chaire d’Histoire intellectuelle de la Chine au Collège de France. Elle s’intéresse à l’histoire des idées, et plus particulièrement du confucianisme, en Chine et dans les cultures voisines. Parmi ses nombreuses publications dans ce domaine figurent notamment une traduction des Entretiens de Confucius et une Histoire de la pensée chinoise, toutes deux publiées aux Editions du Seuil.
C’est depuis 2010 qu’elle co-dirige aux Belles Lettres la collection bilingue « Bibliothèque chinoise », déjà forte de près d’une trentaine de volumes parus.
I.Jirrari