
Il est établi de longue date que l’agriculture est l’un des principaux moteurs de l’économie marocaine, et l’un des garants de sa stabilité sociale, à travers notamment l’emploi et la sécurité alimentaire. Le secteur a donc toujours été fait l’objet d’une grande attention auprès des pouvoirs publics.
L’agriculture est également l’un des secteurs les plus vulnérables au changement climatique, et le préparer, ainsi que ses acteurs, à faire face à ce phénomène est de la plus grande importance. C’est pourquoi le Plan Maroc Vert, lancé en 2008, et Génération Green, son successeur lancé en 2018, accordent une place majeure aux considérations environnementales.
Le Royaume particulièrement vulnérable
Le Maroc compte parmi les pays qui connaitraient le plus d’impacts négatifs sur le rendement dû au changement climatique, selon un rapport sur le développement mondial datant de 2010. Particulièrement, les sécheresses sont très coûteuses. À titre d’exemple, la sécheresse de 1994/95 a engendré un recul du PIB agricole de 45% et du PIB national de 8%. De plus, selon un rapport de l’Agence de Développement Agricole, les petits exploitants sont particulièrement vulnérables au changement climatique, et il est difficile d’atténuer cette vulnérabilité, du fait d’un faible niveau d’éducation, et de ressources financières limitées.
Ainsi, la dimension de développement durable et du changement climatique faisait l’objet du 6ème fondement du PMV, à travers l’adoption de mesures d’intervention adaptative efficaces et économiques tout en accordant une attention particulière à la sauvegarde des ressources naturelles pour une agriculture durable. Elle est articulée autour de 9 principaux leviers à travers lesquels le Plan Maroc Vert intègre la dimension du changement climatique et du développement durable, et par là la promotion d’une agriculture résiliente des impacts des changements climatiques et faiblement carbonée. Le PMV a également impulsé d’autres grands programmes à dimension environnementale, par exemple le Programme National d’Économie d’Eau en Irrigation, qui visait la reconversion de près de 555 000 ha de terres irriguées, ou encore le Programme de résorption du retard accumulé en matière d’aménagement hydroagricole.
Les considérations environnementales du PMV et de Génération Green ont donc pour objectif principal, en s’appuyant sur des principes écologiques, modernes et durables, de fournir au Maroc et à ses agriculteurs les moyens de moins subir les aléas climatiques, afin de permettre un développement pérenne et maîtrisé de leurs activités, qui ne serait pas brusquement freiner par de mauvaises précipitations.
Les 10 années qu’a duré le PMV ont clairement vu de grandes avancées au niveau environnemental. Au cœur de la maîtrise de l’eau d’irrigation, sa rationalisation et sa valorisation, des programmes structurants d’aménagements hydro-agricoles ont abouti à des réalisations importantes, à savoir 560000 Ha équipés en goutte à goutte à fin 2018, l’extension de l’irrigation sur 82000 Ha dont 33200 Ha achevés, la réhabilitation de 150000 Ha de PMH et la mobilisation et l’exploitation en cours des eaux de surface et eaux non conventionnelles pour pallier les risques climatiques. Ces programmes ont permis, à fin 2018, d’économiser et de valoriser plus de 2 milliards de m3 d’eau d’irrigation annuellement, tout en contribuant à l’amélioration de la productivité agricole, à la diversification des assolements et à l’augmentation des revenus des agriculteurs. Par ailleurs, un programme de reconversion et d’intensification de l’arboriculture fruitière a été mis en place, visant à reconvertir les cultures céréalières sensibles à la variabilité climatique par des cultures plus résiliantes et plus valorisantes de la terre notamment les plantations fruitières. Sur le terrain, les pratiques des agriculteurs montrent, selon un rapport de 2018 du ministère, que ce sont les systèmes de production qui ont évolué pour associer arboriculture et céréales comme culture intercalaire. De plus, les programmes d’intensification qui consistent à moderniser et entretenir les plantations existantes ont permis d’améliorer la production, à travers la modernisation des infrastructures d’irrigation, l’amélioration des pratiques culturales, la valorisation de la production, ou encore la mécanisation.
Dans la lignée de son aîné, le programme Génération Green donne une grande importance aux considérations environnementales, avec un accent supplémentaire sur la modernisation. En effet, les investissements en recherche & développement doivent être multipliés par 1,5 voire 2 pour une meilleure diffusion des innovations et des percepts de l’agri-tech. Les services digitaux de l’agriculture devraient couvrir les domaines de la traçabilité, du conseil, de la commercialisation, du paiement mobile et de l’assurance agricole, afin que les exploitants intègrent pleinement l’Agri 4.0. Le programme vise également le renforcement de l’éco-efficience de l’agriculture nationale. La nouvelle stratégie aspire à doubler l’efficacité hydrique (valeur ajoutée par m3 d’eau) à travers la mise en œuvre du volet irrigation du programme national d’approvisionnement en eau potable et d’irrigation, la poursuite des programmes d’irrigation et d’aménagement de l’espace agricole ainsi que la mobilisation des ressources en eau non conventionnelles.
Le développement du secteur agricole à travers le Plan Maroc Vert et Génération Green est clairement un exemple de l’impulsion donnée par une grande politique publique aux acteurs du terrain, en leur donnant les incitations et moyens nécessaires à l’introduction des considérations environnementales dans leurs activités. D’autres secteurs devraient s’en inspirer !
SB