La Maison Blanche confirme avoir frappé deux fois un même bateau soupçonné de narcotrafic
La Maison Blanche a confirmé lundi qu’un amiral américain avait ordonné une seconde frappe sur un bateau soupçonné de narcotrafic en mer des Caraïbes, visant cette fois les survivants du premier tir. La décision, prise sous l’autorité du ministre de la Défense Pete Hegseth, soulève de vives interrogations sur sa légalité, alors que les tensions entre Washington et Caracas atteignent un nouveau pic.
Depuis août, les États-Unis ont considérablement renforcé leur présence militaire dans la région, justifiant cette intensification par la lutte contre le trafic de drogue. Le président Donald Trump accuse le Venezuela de diriger un vaste cartel. Caracas dément et dénonce des « exécutions extrajudiciaires », attribuant plutôt à Washington la volonté de renverser Nicolas Maduro pour s’emparer des ressources pétrolières du pays.
Début septembre, une double frappe américaine dans les eaux internationales a causé la mort de 11 personnes sur un bateau présenté comme transportant des stupéfiants. Il s’agissait de la première d’une série d’une vingtaine d’opérations qui ont, au total, fait 83 morts.
La polémique a toutefois éclaté fin novembre, après les révélations du Washington Post. Selon le quotidien, deux survivants accrochés à l’épave en feu après la première frappe auraient été tués dans une seconde salve, autorisée personnellement par le ministre de la Défense. Le Pentagone avait d’abord démenti, avant que la Maison Blanche ne confirme l’information.
La porte-parole Karoline Leavitt a assuré que l’amiral Frank Bradley, alors à la tête des opérations spéciales, avait agi « dans le cadre de ses fonctions » et conformément aux procédures destinées à garantir « la destruction du bateau ». Pete Hegseth a pour sa part exprimé son soutien total à l’amiral, saluant « un héros américain ».
La confirmation de cette décision a provoqué une onde de choc au sein même des milieux militaires et républicains. Plusieurs responsables dénoncent la volonté d’utiliser l’amiral Bradley comme « fusible » pour protéger le ministre, s’inquiétant d’un flou entretenu autour de la chaîne de commandement.
Des élus des deux camps réclament désormais la transparence. Le sénateur républicain Roger Wicker, président de la Commission des forces armées, a annoncé l’ouverture d’une enquête. Des préoccupations également relayées par des experts et par le Haut-Commissariat aux droits de l’homme de l’ONU, qui avait déjà évoqué début novembre la possibilité « d’exécutions extrajudiciaires ».
De son côté, le sénateur démocrate Chris Murphy a estimé que l’affaire révélait « un acte illégal et profondément immoral », tandis que son collègue Mark Kelly a demandé une enquête du Congrès, rappelant que le manuel du Pentagone interdit clairement de tirer sur des naufragés.
L’affaire intervient alors que l’administration Trump est régulièrement accusée de s’affranchir du cadre légal dans plusieurs opérations sensibles. Jeudi, Donald Trump avait même évoqué la possibilité d’opérations terrestres contre des « trafiquants ».
À Caracas, Nicolas Maduro a réagi vigoureusement, dénonçant les pressions américaines et martelant devant ses partisans que le Venezuela « ne se laissera pas intimider ». « Nous voulons la paix, mais une paix avec souveraineté et liberté, pas la paix des colonies », a-t-il lancé.
Alors que les enquêtes s’ouvrent à Washington et que la crise politique avec Caracas s’intensifie, cette double frappe risque de devenir un nouveau point de rupture dans les relations déjà tendues entre les deux pays.
LNT avec AFP
