La Caisse Nationale de Sécurité Sociale va prendre une place de plus en plus importante avec la nouvelle politique sociale du Maroc.
Déjà, elle a démontré pendant la crise de la pandémie de la Covid 19, une réelle réactivité en jouant un grand rôle sur plusieurs plans. Le premier a été, bien sûr, celui d’opérer la continuité de ses prestations en assurant, d’une part, son recouvrement et, d’autre part, ses liens avec les entreprises qui sont restées en activité.
Bien sûr, elle a dû prendre les dispositions nécessaires pour assurer la continuité de ses services tout en respectant les directives de l’État en matière de précaution contre la Covid pour lutter contre l’expansion de la pandémie tout en permettant aux assurés de continuer à déposer leurs demandes, se faire rembourser et bénéficier de ses prestations, afin d’éviter toute perte de droits.
A cet effet, la Caisse a mené des campagnes de communication pour inciter les citoyens à utiliser d’autres canaux comme le digital, sachant qu’elle n’a pu rouvrir ses bureaux qu’à partir du 3 juillet 2020.
D’un autre côté, la CNSS a mis à disposition des wilayas et régions des unités sanitaires et médicales que sont ses polycliniques, notamment à Casablanca, Tanger et Marrakech.
Il s’agit là d’un apport important, qui a permis aux autorités locales de prendre en charge des malades du COVID. Cette option a permis à plusieurs citoyens atteints d’être pris en charge et soignés.
En parallèle, la CNSS a mis en place une politique d’accompagnement des entreprises en difficultés, en leur offrant l’avantage de pouvoir surseoir au paiement de leurs cotisations, pendant la période difficile, au terme de laquelle, elles pouvaient procéder à un paiement étalé dans le temps de leurs cotisations sans aucune pénalité.
Mais surtout, la CNSS a été utilisée par l’État, notamment après la mise en place du Comité de Veille Économique, pour mettre en pratique certaines mesures, au profit des salariés nationaux affiliés à la Caisse.
Et aussi, en faveur des citoyens démunis ou qui travaillent dans l’informel. A ce titre, la CNSS a assumé un rôle très important qui ne cessera d’ailleurs de prendre de l’ampleur dans le cadre de la nouvelle politique sociale du pays.
C’est ainsi que, notamment, elle a assuré le service de la distribution d’une indemnité forfaitaire à tous les salariés du secteur privé immatriculés à la CNSS et déclarés au titre du mois de février 2020, pour un montant mensuel de 2000 dirhams par personne, pour la période de mars à juin 2020. Cette action a été financée par le Fonds Covid-19, mis en place sur hautes instructions de SM le Roi.
La CNSS s’est acquittée de cette tâche de distribution de cette indemnité dans les meilleures conditions de réussite.
Du fait que l’État a étendu cette indemnité aux personnes travaillant dans l’informel, ainsi qu’aux démunis et aux vulnérables, le rôle de la Caisse s’est avéré central !
Pour ce faire, un système digitalisé a donc été mis en œuvre avec un portail ouvert à tous les employeurs et leurs employés, leur permettant de bénéficier des aides prévues par l’État.
Les premiers touchés par l’arrêt de leur activité, ont pu déclarer leur situation. Des secteurs entiers qui ne pouvaient reprendre leurs activités, comme le tourisme, la culture, l’événementiel, etc., ont pu continuer à bénéficier du soutien de l’État de mars à juin 2020 dans un premier temps voire pour certains à juin 2021.
La CNSS a pu servir plus d’un million cent mille assurés, en leur versant pas moins de 5,5 milliards de dirhams d’indemnités.
Aujourd’hui, la CNSS continue à occuper une place importante dans la mise en œuvre des mesures sociales dont la plus importante de par son ampleur et sa durée dans le temps, est la généralisation de la couverture médicale. Rappelons que sa mise en œuvre, s’est concrétisée à travers les dispositions des lois votées et promulguées à cet effet. Le processus a été initié dès l’adoption des lois 98-15 et 99-15 en 2017.
Avec la publication des décrets nécessaires à leur application, des groupes ou sous-groupes de professions en ont bénéficié, à savoir les adouls, les sages-femmes, les kinésithérapeutes, les guides touristiques, les traducteurs-copistes, les architectes, etc.
Et l’extension de l’assurance maladie n’est pas terminée, d’autres décrets d’application sont en cours d’adoption par le gouvernement notamment pour les professionnels de santé, les agriculteurs, les commerçants, les artisans, etc.
Autant de professions qui ont en plus souscrit à la contribution professionnelle unifiée, qui leur permet de payer un seul impôt en remplacement de trois ou quatre autres comme la taxe professionnelle, la taxe d’habitation, d’enseigne, etc…
Pour accélérer la cadence d’intégration des populations et respecter les dispositions légales prévues par la Loi-cadre 09-21, il était nécessaire d’amender les lois 98-15 et 99-15 de 2017 en désynchronisant leur entrée en vigueur.
Tout particulièrement, un amendement essentiel a permis de rendre facultative la retraite pour toutes les populations concernées, c’est-à-dire les travailleurs non-salariés, les professions libérales, etc., et donner à l’AMO la priorité tout en s’appuyant sur son caractère obligatoire.
Même s’il reste conseillé aux travailleurs non salariés et aux personnes exerçant une profession libérale de souscrire à un régime de retraite afin de continuer à bénéficier de l’AMO après la cessation de l’activité professionnelle.
Concernant les personnes démunies ou vulnérables, la loi cadre 0921 a prévu leur la couverture médicale.
Aujourd’hui, elles sont concernées et couvertes par un système d’assistance, le RAMED, régime d’assistance médicale aux personnes démunies et vulnérables. Mais, ce système va se transformer d’un système assistenciel vers un système assurentiel.
En conséquence, les bénéficiaires en question seront à partir de 2022, délai prévu dans la loi-cadre, pris en charge par l’AMO, l’Assurance Maladie Obligatoire.
A priori et après recensement qui est facilité par le fait qu’il s’agit de personnes déjà ramédistes, le transfert d’un statut à l’autre sera opéré sans trop de difficultés.
Cette nouvelle architecture confiée à la CNSS implique de grandes évolutions infrastructurelles et informationnelles en interne de la Caisse même si l’actuel système d’informations de la CNSS dont l’infrastructure permet notamment une implantation aux niveau local et régional, va permettre à la Caisse d’être au plus proche des nouvelles populations affiliées, que ce soient les travailleurs non-salariés, les professions libérales ou autres.
Les structures de la CNSS peuvent accueillir, dans les meilleures conditions, ces nouvelles populations. Mais, il faut quand même opérer les investissements nécessaires pour les mettre à niveau au profit du réseau physique et du personnel de cette nouvelle institution sociale.
D’ailleurs, M. Hassan Boubrik, le nouveau Directeur général de la Caisse Nationale de Sécurité Social a déjà mis en place un plan d’actions adéquat. Ce dernier se doit de prendre en compte l’évolution des effectifs attendus qui vont passer de 9 à 10 millions de travailleurs salariés avec leurs familles, couverts aujourd’hui à beaucoup plus !
Après l’intégration de ces derniers, on passera d’ici à la fin de l’année à 18 ou 20 millions de personnes. Ce qui exprime un doublement de la capacité d’accueil de la CNSS en moins d’une année !
La CNSS a, du coup, projeté d’ouvrir des agences dans plusieurs villes du pays, sachant qu’aujourd’hui, elle est présente à travers cent quatre représentations et agences dans le pays.
D’autant que compte tenu des caractéristiques des nouvelles populations qu’elle intègre, la CNSS se doit d’être présente partout dans le Maroc.
Ainsi, durant l’année 2021, une cinquantaine de nouveaux points seront ouverts en procédant au recrutement du personnel nécessaire.
D’un autre côté, la digitalisation devra jouer un rôle prépondérant dans la prise en charge, l’enregistrement, l’inscription, la déclaration de la famille, à la CNSS, mais aussi au niveau du traitement des demandes de remboursement.
Déjà, une première étape essentielle a été concrétisée par la mise en ligne d’un portail dédié aux travailleurs non-salariés pour leur permettre de s’inscrire, en s’identifiant en tant qu’adhérents eux et leurs familles.
De même, le système d’information dédié à l’AMO doit être mis à niveau en migrant d’un système papier à un système digital.
Dans les mois à venir sera déployé un système qui sera accessible par l’ensemble des prestataires de soins, qui pourra identifier l’assuré à travers un identifiant et permettra de générer à la fois son ordonnance, sa feuille de soins électronique, ce qui lui donnera droit au remboursement des frais engagés. Ce qui ressemblerait à la Carte Vital des régimes publics d’assurance maladie dans les pays développés.
Cela augmentera de façon significative la productivité du système.
Aujourd’hui, pour les 10 millions de bénéficiaires, la Caisse est à 25 000 dossiers par jour.
Demain, avec le doublement de la population couverte, d’ici la fin de l’année, elle passera à environ 50 000 ou 60 000 dossiers/jour, en gardant la qualité de service au niveau de l’assurance, avec le souci de rembourser le plus rapidement possible les frais engagés par l’assuré.
Et, en 2022, si les onze millions de «ramédistes» entraient dans le système géré par la CNSS, on arriverait à 80 000 dossiers/jour à traiter, ce qui impliquerait de pouvoir déployer tous ces nouveaux systèmes.
Pour accélérer sa transformation, la CNSS a développé des partenariats avec des sociétés de services de proximité, Wafa Cash, Barid Cash, etc., implantées au niveau local, pour l’aider en lui facilitant les inscriptions et immatriculations des travailleurs non-salariés. De même qu’ultérieurement, avec la montée en charge des dépôts des demandes de remboursement de l’assurance-maladie, ils pourront recevoir les dossiers en se constituant comme des collecteurs pour la CNSS….
Afifa Dassouli
Retrouvez le sommaire de notre Spécial Été : Maroc, l’urgence sociale