![](https://lnt.ma/wp-content/uploads/2024/05/925x430-925x430.jpg)
L’annonce faite par le gouvernement de la décompensation de la subvention du gaz butane à partir du 20 mai dernier a été très mal accueillie par la population marocaine. Et, la réaction de nos compatriotes est symptomatique d’une dualité frappante de la situation économique et sociale que connait notre pays.
Dans les faits, de nombreux voyants sont au vert, des comptes publics aux agrégats nationaux, avec le satisfecit des institutions internationales telles que le FMI, pourtant bien informées, qui félicitent le Maroc pour sa désormais légendaire « résilience ».
D’autre part, le Gouvernement qui a fait l’exercice récemment de dresser son bilan à mi-mandat, se targue également de progrès notables dans l’avancement des réformes sociales entamées, comme la généralisation de l’AMO ou l’aide sociale directe.
Pourquoi donc la majorité de nos concitoyens sont complètement décontenancés par l’augmentation de 10 dirhams de la bonbonne de gaz qui orne les cuisines de tous les ménages du pays ? En réalité, beaucoup de nos compatriotes peinent à joindre les deux bouts, certains malgré deux salaires, d’autres par absence de revenus réguliers et a fortiori suffisants.
Alors, les réformes sont bel et bien réelles, mais leurs effets ne se feront certainement pas ressentir à court terme, d’autant que le pouvoir d’achat des Marocains est rongé par l’inflation, mais surtout l’augmentation globale du coût de la vie. Car c’est à ce prix que le pays se développe aussi, en se modernisant, l’éducation, la santé, même la restauration, coûtent désormais plus cher et isolent un peu plus certaines couches de la population les plus démunies.
La communication aussi est à double tranchant. L’annonce d’une aide directe sociale a été comprise par beaucoup de nos compatriotes comme un effort touchant le plus grand nombre, or les critères réels en ont déçu plus d’un. Dans cette lignée, l’augmentation de 10 dhs sur la bonbonne de 12 kg est vécue comme une injustice, et de surcroit au timing mal calculé à quelques encablures de l’Aid El Kebir dans lequel les Marocains investissent déjà beaucoup.
Le Maroc n’est certes pas seul à subir des difficultés économiques, le monde s’étant habitué à une stagflation qui ne suffit plus à couvrir tous les besoins. La résilience du Royaume tient justement à sa capacité à maintenir le cap de réformes structurelles, seules à même de faire décoller réellement le revenu moyen par habitant.
En attendant, la gronde sociale doit être adressée parce que les Marocains doivent continuer d’adhérer à la projection de ce que le pays veut devenir. Des quick-wins pourraient être mis en œuvre pour alléger le portefeuille de certains, ou l’augmenter comme avec l’accord récent du 1er mai qui accorde une augmentation nette de 1 000 dhs aux fonctionnaires.
Mais, il faut surtout et avant tout préserver la dignité de tous. Car que vaut un Maroc qui se développe s’il laisse se creuser des inégalités sociales et économiques déjà bien trop profondes ? Le retour de bâton serait inévitable et le prix réel de l’augmentation de la bonbonne…
Zouhair Yata