Le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un à la gare de Vladivostok, en Russie, le 24 avril 2019 © AFP Kirill KUDRYAVTSEV
Le dirigeant nord-coréen Kim Jong Un est arrivé mercredi à Vladivostok, en Extrême Orient russe, pour son premier sommet avec Vladimir Poutine, qu’il a espéré « utile » au moment où Pyongyang cherche des appuis en pleine impasse diplomatique avec Washington sur le nucléaire.
Sa rencontre prévue jeudi avec le dirigeant russe sera pour M. Kim sa première entrevue avec un chef d’Etat étranger depuis son retour de Hanoï, théâtre en février d’un fiasco diplomatique retentissant avec le président américain Donald Trump.
Le train vert olive du dirigeant nord-coréen s’est immobilisé peu après 08H00 GMT dans la gare de Vladivostok, des hommes en costume se précipitant pour astiquer la porte de son wagon avant l’arrêt du convoi. Tout vêtu de noir, chapeau sur la tête, il a suivi un tapis rouge déroulé sur le quai.
A l’issue d’une brève cérémonie militaire, il est parti dans une limousine noire encadrée de gardes du corps courant de chaque côté sous les notes d’une chanson populaire soviétique, Katioucha, jouée par un orchestre militaire.
« J’espère que cette visite sera couronnée de succès et utile », a déclaré le dirigeant nord-coréen. Il a assuré vouloir « évoquer de manière concrète le règlement de la situation sur la péninsule coréenne », dans ses propos à la télévision russe lors d’un arrêt dans la ville frontalière russe de Khassan, où des femmes en costume folklorique l’ont accueilli avec du pain et du sel comme le veut la tradition.
Drapeaux russes et nord-coréens ont déjà été accrochés sur les lampadaires de l’Île Rousski, en face du port de Vladivostok, où devrait se tenir le sommet. Selon le Kremlin, il débutera par une rencontre entre MM. Kim et Poutine avant qu’il ne prenne « un format élargi », sans plus de détails. Ni communiqué commun ni signature d’accords ne sont prévus.
Selon des experts, M. Kim vient chercher un soutien dans son bras de fer avec Washington sur le nucléaire et un certain rééquilibrage entre Pékin, son plus proche soutien, et Moscou, son ancien allié de la Guerre froide.
Pour la Russie, il s’agit de se faire une place dans la grande offensive diplomatique lancée l’an dernier par Kim Jong Un, invité plusieurs fois en Russie sans succès jusqu’à présent.
– Allègement des sanctions –
Après des années de montée des tensions en raison des programmes nucléaire et balistique de Pyongyang, M. Kim a rencontré depuis mars 2018 quatre fois le président chinois Xi Jinping, trois fois le président sud-coréen Moon Jae-in et deux fois M. Trump.
A Hanoï, la Corée du Nord avait cherché à obtenir un allègement immédiat des sanctions internationales décidées pour la contraindre de renoncer à ses armes atomiques. Mais les discussions avaient été écourtées en raison de désaccords profonds avec Washington, notamment sur les concessions que Pyongyang était prêt à faire.
Signe de la dégradation observée depuis, Pyongyang s’est fendu la semaine dernière d’une attaque d’une rare violence contre Mike Pompeo, en demandant que le secrétaire d’Etat américain ne participe plus aux discussions sur la dénucléarisation. Quelques heures plus tôt, les Nord-Coréens avaient revendiqué l’essai d’une nouvelle arme.
Moscou prône un dialogue avec Pyongyang sur la base d’une feuille de route définie par la Chine et la Russie. Cette dernière a déjà demandé la levée des sanctions internationales, tandis que les Etats-Unis l’ont accusée d’aider Pyongyang à les contourner.
Pékin a estimé que le sommet de Vladivostok, entre deux « voisins amicaux de la Chine », allaient « contribuer à la paix et la stabilité sur la péninsule (coréenne) et dans la région ».
– Rivalité sino-soviétique –
Les relations entre Pyongyang et Moscou remontent à l’ère soviétique: l’URSS a placé le grand-père de Kim Jong Un et fondateur de la République populaire démocratique de Corée (RPDC), Kim Il Sung, au pouvoir et lui a apporté un soutien crucial durant la Guerre froide.
Les relations furent cependant en dents de scie au cours de cette période, notamment parce que Kim Il Sung excellait dans l’art de jouer sur la rivalité sino-soviétique pour obtenir des concessions de ses deux puissants voisins.
Peu après sa première élection à la présidence russe, Vladimir Poutine chercha à normaliser ces relations et rencontra trois fois Kim Jong Il, père et prédécesseur de l’actuel leader, la première fois à Pyongyang en 2000. Il fut alors le premier dirigeant russe à se rendre en Corée du Nord.
La dernière rencontre à ce niveau remonte à 2011, quand Kim Jong Il avait affirmé à l’ex-président Dmitri Medvedev qu’il était prêt à renoncer aux essais nucléaires. L’ex-dirigeant nord-coréen était mort trois mois plus tard.
Kim Jong Un a depuis présidé à quatre essais nucléaires dont, potentiellement, celui d’une bombe à hydrogène en 2017, et au lancement de missiles intercontinentaux capables d’atteindre l’ensemble du territoire continental américain.
LNT avec Afp