Au Maroc, comme certainement ailleurs, les magistrats du Parquet Général se veulent des serviteurs de la loi et de l’intérêt général. Leur métier consiste essentiellement en la protection de l’arsenal juridique.
Chez nous, cette institution vit depuis plus de huit mois une nouvelle ère, celle de l’indépendance à l’égard de l’Exécutif. En effet, le vendredi 6 octobre 2017 est une date qui restera sans aucun doute dans les annales judiciaires du Royaume. Le Parquet est devenu alors une composante judiciaire à part entière.
Huit mois après seulement l’entrée en vigueur de la ‘‘libération’’ du Parquet, on est impatient apparemment, du côté de la présidence du Parquet Général, de lister les premières réalisations. Idem pour les contraintes et autres problématiques.
Mohamed Abdennabaoui, Procureur Général du Roi près la Cour de Cassation, Président du Ministère Public, est un fin connaisseur de l’appareil judiciaire du Royaume. Depuis de longues années dans les arcanes juridico-judiciaires, Abdennabaoui souhaite apparemment redorer rapidement le blason d’un appareil aux enjeux de taille. Avec le Président de la Cour de Cassation, Mostafa Farès, lui aussi un vieux de la vieille des tribunaux du Royaume, président du Conseil Supérieur du Pouvoir Judiciaire, il partage l’ambition de mener à bon port la réforme tant attendue de la Justice. Certainement loin des rouages politiques.
En attendant, Abdennabaoui annonce la couleur. Longtemps discret au sein du système judiciaire, le procureur général est aujourd’hui une institution qui se donne une nouvelle image. Celle de son temps.
Dans le rapport annuel sur la mise en œuvre de la politique pénale et l’amélioration du rendement du ministère public au titre de l’année 2017, Abdennabaoui vient de le démontrer… chiffres à l’appui.
Ainsi, selon le rapport annuel sur la mise en œuvre de la politique pénale et l’amélioration du rendement du ministère public au titre de l’année 2017, quelque 2.764.660 affaires ont été enregistrées en 2017 devant les juridictions du Royaume, tandis que 2.846.192 affaires ont été jugées, contre 570.885 restées en instance. Les affaires enregistrées se répartissent entre les tribunaux de première instance, avec 2.269.484, les cours d’appel (264.677), les tribunaux de commerce (132.968), les tribunaux administratifs (28.332), les Cours d’appel de commerce (11.027) et les cours d’appel administratives (10.515).
Au niveau des tribunaux de première instance, le nombre des affaires jugées a atteint 2.346.576, contre 275.484 pour les cours d’appel, souligne le rapport. Ces affaires se répartissent, selon leur nature, entre le civil, avec 1.412.554 dossiers enregistrés et 1.459.707 jugés, et le pénal, avec 1.169.264 affaires enregistrées et 1.202.008 dossiers jugés.
En outre, le rapport fait état de 444.601 plaintes enregistrées sur le plan national, soit une moyenne annuelle de 458 plaintes pour chaque magistrat du ministère public exerçant auprès des différentes juridictions du Royaume.
Ces plaintes sont réparties entre les tribunaux de première instance, avec 424.460, soit une moyenne de 633 plaintes pour chaque magistrat, et les cours d’appel, avec 20.141 plaintes, soit 78 plaintes pour chaque magistrat du ministère public.
Le nombre de procès-verbaux examinés au niveau national s’élève à 1.346.753, soit une moyenne annuelle de 1.451 procès-verbaux pour chaque magistrat.
Parmi ces procès-verbaux, 579.377 ont été dressés par la police judiciaire et portent sur l’arrestation de 541.140 personnes, dont 162.597 faisant l’objet d’avis de recherche nationaux.
De son côté, la Gendarmerie Royale a dressé plus de 592.000 procès-verbaux, soit une hausse par rapport à 2016.
Le rapport relève aussi qu’un total de 23.335 affaires liées à la sûreté et l’ordre public a été enregistré au cours de l’année 2017, contre 16.268 entre 2002 et 2011. Ces affaires concernent l’outrage à fonctionnaire (5.759 affaires), détournement de fonds et dilapidation (166), corruption (7.506), concussion (8), mendicité (4.776), vagabondage (1.456), désobéissance (958), outrage aux constantes (19), association de malfaiteurs (2.504), évasion du lieu de détention (100), trafic d’influence (20) et dilapidation des fonds publics (63).
Selon des données statistiques, les affaires liées à la sûreté et l’ordre public ont connu une augmentation significative entre 2012 et 2017, en passant de 20.231 affaires en 2012 à 23.335 en 2017, souligne le rapport, faisant savoir que le nombre de personnes poursuivies dans ces affaires au titre de l’année 2017 a atteint 27.518, contre 23.526 en 2012.
Le même rapport relève qu’un total de 94.000 affaires financières a été enregistré au cours de l’année 2017, contre une moyenne annuelle n’ayant pas dépassé 67.000 entre 2002 et 2012. Il rapporte que le nombre de personnes poursuivies dans ces affaires, au titre de la même année, a dépassé 104.000, avec 28.500 crimes de vol qui arrivent en tête du classement de ces affaires.
Les autres affaires financières concernent l’émission de chèque sans provision (23.485), acceptation d’un chèque de garantie (211), escroquerie (8.804), abus de confiance (5.465), recel d’objets volés (2.746), détournement d’objets saisis (365), vol qualifié (9.949), vol (28.531), spoliation foncière (12.658), destruction (123), non-exécution d’un contrat (566), incendie de propriétés (548), détérioration (781), outre les affaires relatives aux systèmes de traitement automatisé des données (125).
Le rapport a également fait savoir que ces crimes n’ont cessé d’augmenter depuis 2012 quand 81.532 affaires ont été enregistrées et dans lesquelles 94.472 personnes ont été poursuivies, alors qu’en 2016 le nombre a atteint 95.362 affaires impliquant 107.974 personnes.
Par ailleurs, le nombre des personnes poursuivies en état de liberté s’élève à 637.293, soit une moyenne de 686 cas pour chaque magistrat du ministère public près les tribunaux de première instance et les cours d’appel, a souligné la même source, notant que 615.306 personnes ont comparu devant le parquet, soit 663 personnes par magistrat.
De même, 92.999 personnes ont été placés en détention en 2017, soit 15% des 615.306 personnes déférées en total devant le parquet, affirme le rapport, ajoutant que plus de 35.470 personnes ont été mises en détention provisoire jusqu’à fin octobre 2017, soit 42,5% de la population carcérale, qui a dépassé 83.470 détenus.
Toutefois, le procureur du Roi près la Cour de Cassation, Mohamed Abdennabaoui, a soulevé le manque de moyens informatiques, logistiques et humains à même de perfectionner les tâches du parquet.
A noter qu’au Maroc, le nombre de procureurs s’élève à 997 dont 159 sont des femmes, soit 24% des magistrats du Royaume.
Hassan Zaatit
Le sort des rapports de Driss Jettou…
En 2017, quelques 115 dossiers de la Cour des Comptes ont fini par atterrir dans les tribunaux. Sur ce total, 36 affaires sont en cours, 24 en phase d’enquête, 21 en jugement. Sur cet ensemble, 23 dossiers ont été jugés de manière définitive.
La spoliation foncière en 2017…
Durant cette période, la présidence du parquet général a enregistré un total de 61 affaires en rapport avec la spoliation foncière. Celles en phase de recherche sont au nombre de 16 et celles en enquête sont au nombre de 16. 4 affaires sont en Première Instance, 14 sont en Appel et 11 sont en Cour de Cassation. Certaines associations ne citent pas moins de 1000 cas de spoliation foncière. La réponse d’Abdennabaoui est catégorique : ‘‘Nous n’avons rien reçu et si ces associations ont des cas, je me demande pourquoi ne pas suivre la procédure légale en vigueur’’.