Ces dernières années, le Maroc s’est imposé en Afrique en tant qu’acteur majeur des investissements. En effet, la politique d’ouverture envers l’Afrique encouragée par le Roi Mohammed VI et adopté par le Royaume a poussé de grands groupes marocains (banques, assurances, promoteurs immobiliers) à se tourner vers le continent africain dans une optique gagnant-gagnant.
La Chambre de Commerce Britannique au Maroc a organisé, jeudi 9 novembre, une conférence débat sous le thème « L’Afrique : la nouvelle dimension des entreprises marocaines ».
Présent à cet événement, Vincent Castel, économiste pays en chef à la BAD a analysé, le contexte africain actuel et les défis à relever pour le manager marocain, en Afrique.
Selon lui, entre 2016 et 2017, le continent a rencontré beaucoup de défis : la baisse du prix des matières premières, excès de production, baisse de la demande, etc. Cependant, ce contexte est amené à s’améliorer durant la période 2018-2020. « On prévoit des perspectives plus positives sur cette période où l’on s’attend à une croissance d’environ 3,7% », a-t-il expliqué.
Ce qui rend le spécialiste optimiste, c’est la remontée des prix du pétrole, observée ces derniers jours, et qui a amené à la reprise de la production dans certains pays, mais aussi la fin de la sécheresse qui avait eu un impact très important sur les économies.
Pour M. Castel, le continent est progressivement en train de passer d’une situation de fournisseur de ressources à celle de marché cible. Une tendance qui s’explique par 2 phénomènes d’après lui : l’évolution des facteurs de contribution à la croissance notamment l’augmentation de l’urbanisation et de la classe moyenne et l’évolution de la structure relative des flux financiers. « La part relative de l’aide publique aux gouvernements est en train de diminuer et ce fait au profit des transferts de fond mais surtout des investissements de portefeuille et des investissements directs étrangers », souligne l’économiste.
Selon le dernier rapport « Perspectives économiques en Afrique » réalisé par la BAD en partenariat avec le Centre de développement de l’organisation de coopération et de développement économiques (OCDE) et le Programme des Nations unies pour le développement (PNUD), le Maroc est le 1er investisseur africain en Afrique avec un montant des IDE estimé à 4 milliards de dollars en 2016.
Selon M. Castel, le Maroc est géographiquement aux portes d’une population de la taille de la Chine, qui s’urbanise, qui consomme plus, etc. Une urbanisation qui pose une grande problématique, celle de savoir si l’Afrique va continuer à importer ce qu’elle consomme. « La nécessité de produire localement, s’impose puisque de nouveaux besoins surgissent notamment en termes de transport, de planification de l’urbanisme, de l’éducation, de la santé, de la télécommunication », souligne-t-il. Et d’ajouter : « Il y a une classe moyenne qui est en explosion en Afrique… Pour que le Maroc soit un hub de production il y a besoin d’un certain nombre de choses : l’appui politique, que le cadre réglementaire au Maroc et dans le pays hôte soit favorable, il y a besoin des infrastructures de l’appui aux entreprises, que les entreprises publiques embrellent les entreprises privées en elles et entrainent avec elle l’écosystème PME… ».
L’intégration du Maroc à l’Union africaine, l’adhésion à la Cedeao, les accords bilatéraux signés avec plusieurs pays… Toutes ces démarches ne pourraient qu’être bénéfiques pour les entreprises marocaines qui investissent en Afrique et devraient dynamiser le commerce intra-africain.
Cependant, d’après Vincent Castel, le Maroc ne produit pas toujours ce dont l’Afrique a besoin, d’où l’importance de diversifier les chaines de valeur, produire différemment, essayer de comprendre ce dont les partenaires africains ont besoin pour pouvoir échanger avec eux et s’assurer un partenariat est gagnant-gagnant. « Le pays où l’on va investir doit comprendre ce qu’il a à gagner avec notre investissement. Si le Maroc veut se positionner en tant que hub, il faut qu’il travaille à une meilleure intégration de l’Afrique dans les chaines de valeur mondiales », conclut-il.
A. Loudni