L’arrivée de nouveau papier sur la place casablancaise, qui n’est pas un fait courant, est toujours une excellente nouvelle pour un marché financier en manque de liquidité. C’est pourquoi l’annonce du feu vert de l’AMMC quant à l’IPO d’Immorente Invest (cf encadré n°1) n’a pas manqué de faire la Une de la presse économique marocaine. Pour rappel, la dernière entrée en bourse sur le marché marocain remontait à 2016, avec Marsa Maroc.
Dans la foulée de cette annonce, le top management d’Immorente Invest, avec à sa tête Mme Oumaya Tazi, PDG, a reçu la presse à la Bourse de Casablanca, pour présenter la société, ainsi que les détails de l’IPO (cf encadré n°2).
Un nouveau type d’actif
L’activité d’Immorente Invest, foncière dédiée à l’immobilier professionnel locatif, la place à part dans le cortège des sociétés cotées marocaines. Elle offre un nouveau type d’actif aux investisseurs, la “pierre papier”. La société possède, ou développe, des actifs immobiliers professionnels destinés à la location, et elle offre à ses actionnaires “un rendement immobilier régulier issu des loyers perçus”, selon Mme Tazi.
A propos d’Immorente Invest
La société a été créée en 2011 à l’initiative de CFG Bank, et sa gestion est confiée à CFG Capital. Son conseil d’administration regroupe des institutionnels comme AXA Assurance Maroc, un comité d’audit présidé par un administrateur indépendant et un comité d’investissement.
Sa stratégie est d’acquérir des actifs de choix, situés dans des emplacements de qualité, et dont les locataires présentent des fondamentaux solides. On citera par exemple le siège de First Rest International, master franchise des restaurants McDonald’s au Maroc, ou encore le futur site industriel de Faurecia, équipementier automobile français.
A ce jour, la société a réalisé des investissements de l’ordre de 275 MDH, pour des rendements de 6,3% en 2016 et 6,5% en 2017. L’IPO actuelle vise à lever les fonds nécessaires à la poursuite de son programme d’investissement pour atteindre environ 700 MDH d’actifs en portefeuille à l’horizon 2021. Ainsi, les fonds levés permettront de finaliser le financement d’acquisitions déjà identifiées et sécurisées, pour un montant global de 295 MDH : l’usine de Faurecia pour 127 MDH, l’acquisition de 67 MDH de bureaux à la Marina de Casablanca, loués à Huawei, et une prise de participation minoritaire de 100 MDH dans le projet I-Dune, sur le boulevard Massira Al Khadra à Casablanca. Le reliquat sera alloué à un investissement supplémentaire en 2019, non encore identifié. Ainsi, avec l’introduction en bourse d’Immorente Invest et un complément de dette obligataire de 100 MDH prévu en 2020, le portefeuille de la société sera ventilé comme suit : 32% de commerces et showrooms, 21% de sites industriels, 15% de bureaux, 6% dans l’hôtellerie, et 26% non encore identifiés.
Les arguments du management d’Immorente Invest pour attirer de futurs actionnaires sont nombreux : la stabilité, car les locations professionnelles sont sur de longues durées, avec peu de problème de vacance des locaux, accès à l’immobilier professionnel locatif pour les petits investisseurs, la liquidité, les loyers étant du cash, la tranquilité, à travers la gestion déléguée de la location, un rendement récurrent de 6 à 8%, selon les performances de la société depuis sa création, et la diversification, à travers l’exposition à un ensemble d’actifs et de locataires. Le management affiche également sa conviction qu’avec l’arrivée des décrets d’applications de la loi concernant les OPCI, “la structuration de l’Immobilier Professionnel Locatif fera émerger ce marché au Maroc”. Notons à ce propos que ce même management ne juge pas antinomique l’IPO du jour d’une éventuelle transformation future de la société en OPCI.
Un rendement solide peu touché par le risque
Si les rendements affichés par Immorente Invest restent inférieurs à ceux de la promotion immobilière ou du marché des actions, cela s’explique par le faible risque encouru. En effet, contrairement à la promotion, pas de risque de commercialisation ou de promotion, la société acquiert des locaux déjà loués, ou les faisant développer clé en main pour des clients déjà identifiés. Ce type d’actif affiche donc des rendements se situant entre l’obligation et le marché actions, ce qui intéressera notamment les investisseurs souhaitant se lancer sur le marché boursier, sans trop s’exposer. Notons que vis-à-vis de la comptabilité particulière de ce genre d’entité, pour avoir une idée de ce rendement, il faut aller voir du côté de la capacité d’autofinancement, plutôt que du résultat, celui-ci étant tronqué par des amortissements importants, liés à la pierre détenue.
Les détails de l’IPO
L’opération, qui porte sur une augmentation de capital de 400 MDH à un tarif unitaire de 100 dh par action, se fera en trois tranches. La première, pour un montant de 100 MDH, concerne les personnes physiques résidentes ou non, de toute nationalité, et les personnes morales « non qualifiées ». Il n’y a pas de minimum de souscription, mais un plafond de 40 MDH, soit 400 000 actions. Au niveau des modalités d’allocation, on notera que celle-ci se fera par itération jusqu’à 150 actions, puis au prorata au-delà. La deuxième tranche, qui concerne un montant de 200 MDH, est réservée aux investisseurs qualifiés. Il n’y a aucun minimum de souscription, et le plafond est également de 40 MDH. L’allocation se fera au prorata. Enfin, la troisième tranche, de 100 MDH, est réservée aux caisses de pension et retraite, aux entreprises d’assurance et de réassurance, ainsi qu’à la CDG. Notons que ces investisseurs devront faire partie du Groupe d’Actionnaires Stables. Le minimum est de 30 MDH, pour un maximum de 40 MDH, et l’allocation se fera au prorata.
Concernant le prix de l’action, qui est le même que celui payé à la création de la société, il est à noter qu’Upline Corporate Finance, à travers deux méthodes de calcul, a évalué la valeur par action à 112,2 dh et 121,8 dh, pour des décotes de -10,8% et 17,9%, selon la méthode employée.
Selim Benabdelkhalek