Une élève est interrogée par la police dans le quartier de Sai Wan Ho après des manifestations pro-démocratie à Hong Kong, le 12 novembre 2019 © AFP DALE DE LA REY
Des affrontements à Hong Kong entre les manifestants pro-démocratie et la police ont éclaté mardi dans le quartier des affaires de la mégapole et sur différents campus universitaires, au lendemain d’une des journées les plus violentes en cinq mois de mobilisation.
Lundi, un manifestant a été blessé par balle par un policier et un homme a été transformé en torche humaine, au moment où les transports de la ville étaient paralysés par de multiples actions.
« L’Etat de droit à Hong Kong a été poussé au bord de l’effondrement total », a déclaré mardi après-midi lors d’un point presse le porte-parole de la police, Kong Wing-cheung, qui a dénoncé ces actes violents.
Mardi midi, dans le quartier de Central qui abrite nombre de grandes entreprises étrangères et de boutiques de luxe, des milliers d’employés de bureau ont occupé pendant des heures les rues, en scandant: « Battez-vous pour la liberté, soutenez Hong Kong! ».
Des centaines de protestataires radicaux, vêtus d’un t-shirt noir et le visage couvert d’un masque, ont bloqué avec un autobus la circulation sur l’une des grandes artères de ce quartier.
Ils ont ensuite jeté des pavés et divers objets avant l’intervention de la police anti-émeutes qui a tiré des gaz lacrymogènes.
Ces scènes illustrent la manière dont des personnes aux opinions politiques modérées continuent de soutenir le mouvement en faveur de la démocratie alors que les manifestants les plus radicaux recourent à des méthodes violentes.
Les campus universitaires sont devenus, pour la première fois, le nouveau théâtre d’affrontements.
A l’Université chinoise de Hong Kong, la police a tiré des gaz lacrymogènes et des balles en caoutchouc sur des centaines de manifestants qui avaient érigé des barricades.
Les manifestants ont lancé des pavés et des cocktails Molotov alors qu’un véhicule, utilisé pour construire la barricade, a été incendié.
A l’Université municipale de Hong Kong (City University), des manifestants ont jeté des briques sur la police à partir d’une passerelle.
Des protestataires radicaux, portant un masque sur le visage, ont dressé des barricades et bloqué des routes à l’université de Hong Kong (HKU). A l’Université Polytechnique, des affrontements ont eu lieu alors que la police tentait d’interpeller une étudiante.
La circulation des bus et des métros dans tout le territoire a été sérieusement perturbée mardi matin par les manifestants, pour la deuxième journée consécutive.
Les journaux d’Etat chinois ont déclaré mardi que l’Armée populaire de libération (APL), qui possède une garnison à Hong Kong, était sur place afin de soutenir, si nécessaire, la police hongkongaise dont ils ont salué « la retenue ».
Hong Kong a connu lundi une des journées les plus violentes et chaotiques en 24 semaines de mobilisation.
– « Arrière-pensées » –
Après l’émotion suscitée par le décès vendredi d’un étudiant, Alex Chow, tombé d’un parking à étages lors d’affrontements le week-end précédent entre police et manifestants, les contestataires ont notamment réagi au tir à balle réelle reçu lundi par un manifestant de 21 ans.
Tout au long de la journée, des manifestants ont mis à sac des stations du métro – qui est généralement d’une remarquable efficacité – et érigé des barricades à certains carrefours. Ils s’en sont également pris à des commerces accusées d’être favorables aux autorités pro-Pékin.
Les manifestants semblent avoir été particulièrement choqués par la vidéo, diffusée en direct sur Facebook, montrant un policier ouvrir le feu sur un protestataire masqué.
Cette vidéo, vite devenue virale, a poussé de nombreux habitants, déjà très remontés contre la police, à descendre dans les rues pour manifester leur colère.
Un peu plus tard, une vidéo a circulé montrant un homme en noir arrosant sa victime avec un liquide inflammable, avant de le transformer en torche humaine.
L’homme qui a été grièvement brûlé et celui a été blessé par balle se trouvaient toujours mardi dans un état critique, selon les autorités hospitalières.
Cette journée de violences a incité les puissances occidentales à exhorter la cheffe de l’exécutif hongkongais, Carrie Lam, à trouver un compromis avec les manifestants.
« Nous condamnons la violence de toutes les parties (…) et appelons toutes les parties – police et protestataires – à faire preuve de retenue », a déclaré un porte-parole du département d’Etat américain, qui a fait part de sa « grave préoccupation ».
Le ministère britannique des Affaires étrangères a jugé « profondément troublantes » les violences survenues lundi.
« Les manifestants devraient éviter la violence et la police ne pas répondre de façon disproportionnée », a déclaré le porte-parole de la diplomatie britannique.
Interrogée sur ces critiques, la diplomatie chinoise a rejeté les « arrière-pensées » de Londres et Washington et soutenu le policier qui a ouvert le feu.
« Comme on peut le voir sur la vidéo, l’émeutier a attaqué le policier en premier et ce dernier a réagi en conformité totale avec la loi », a déclaré le porte-parole du ministère des Affaires étrangères, Geng Shuang.
Hong Kong, rétrocédé à la Chine par le Royaume-Uni en 1997, est une région semi-autonome dirigée sous le principe « Un pays, deux systèmes ». Le territoire jouit à ce titre de libertés inconnues dans le reste de la Chine et ce jusqu’en 2047.
Mais les militants pro-démocratie accusent Pékin de s’asseoir sur ses promesses en augmentant son emprise politique.
LNT avec Afp