La course mondiale à l’innovation technologique est une lame de fond depuis quelques décennies déjà, mais aujourd’hui comme jamais, l’iceberg remonte à la surface et tout le monde, des États aux entreprises, cherche à tirer son épingle du jeu durablement, tant les enjeux sont stratégiques. Si l’ère est aujourd’hui à la technologie, demain le sera d’autant plus, et les challenges se multiplient en conséquence de manière exponentielle. Aussi, les tergiversations autour de l’Intelligence Artificielle, qui rappellent le scepticisme qui a longtemps accompagné l’éclosion d’internet, et le sommet « Choose France » qui a permis de lever quelque 13 milliards d’euros d’investissements, participent à la même tendance de fond, celle d’un nouvel échiquier mondial de la Tech.
Dans ce contexte, tous les attributs de la puissance étatique sont mis à contribution pour se tailler une part du gâteau. Le Maroc ne déroge pas à cette tendance et s’offre une plateforme de premier choix avec l’organisation du GITEX, messe mondiale de la Tech et de l’innovation, dans sa première édition africaine, à Marrakech. Le Royaume, qui excelle dans l’organisation d’événements internationaux d’envergure, grâce à ses valeurs d’hospitalité, la mobilisation des pouvoirs publics et l’infrastructure hôtelière de la ville ocre, use ainsi de tout son Soft Power pour se faire le porte-voix et le catalyseur du continent africain. En effet, le Maroc ajoute une brique à l’édifice de son positionnement de hub africain, souvent déclamé et dont la promesse se concrétise un peu plus à chaque événement de ce type. D’autant que le sujet exige par essence une approche large et inclusive parce que dans le domaine de la Tech, du startupper aux investisseurs les plus aguerris, il est communément admis que la « scalabilité » est un prérequis indispensable. En somme, si le Maroc devait organiser un événement de cette ampleur pour adresser le marché marocain uniquement, les organisateurs ne pourraient se targuer d’accueillir 900 entreprises de quelque 100 nationalités, 30 délégations gouvernementales, ou 250 investisseurs internationaux.
En revanche, l’un dans l’autre, le Maroc va pouvoir faire de cet événement très suivi, une vitrine de ses propres accomplissements et ambitions. En effet, depuis la pandémie de la Covid-19, le pays a fait quelques « leapfrogs » indéniables, notamment sur la digitalisation des services publics ou encore la sécurité informatique à travers la biométrie par exemple. De même, comme en témoigne la fuite continue des cerveaux du Maroc vers l’étranger, le pays dispose de ressources compétentes et même prisées, mais manque de moyens pour les retenir faute d’investissements suffisants et de débouchés. Le royaume commence aussi à récolter les fruits de pôles d’excellence comme l’UM6P, et l’écosystème de startups et d’innovateurs s’est densifié ces dernières années avec l’arrivée de structures dédiées à l’accompagnement, aux levées de fonds et aux business angels. Reste à arrimer durablement tout ce beau monde à une dynamique durable, dont l’Afrique est l’opportunité la plus prometteuse et évidente.
Au-delà des aspects stratégiques voire géopolitiques, il s’agit aussi et surtout, à travers la tenue du GITEX Africa Morocco, d’ouvrir la voie à une croissance économique nouvelle, par la création de valeur et d’emplois, dont l’écrasante majorité proviendrait de la jeunesse. C’est donc avec l’espoir de voir ces perspectives s’améliorer pour l’avenir qu’il faut appréhender cet événement. Un mirage qui pourrait enfin commencer à se dissiper à Marrakech !
Zouhair Yata