Vous pensiez peut-être qu’un cessez-le-feu était conclu pour être respecté ou même éventuellement dénoncé avant d’être rompu ? Peut-être même qu’en plus de l’espoir qu’a généré le cessez-le-feu en vigueur, vous pensiez que le mois sacré de Ramadan garantissait une certaine forme de protection et de respect minimal ? Vous pensiez que les femmes, les enfants, les infrastructures civiles (celles encore debout), ne seraient plus pris pour cible, et que l’horreur de la guerre à Gaza était derrière nous ? Plus de 400 morts palestiniens en une seule nuit, dont une majorité de femmes et d’enfants, une des journées les plus meurtrières depuis le début du conflit en 2023, sonnent le glas de toutes ces espérances.
Et, quel sang-froid de Benyamin Netanyahou, quel détachement face à la valeur d’une vie humaine. Ce n’est « qu’un début » annonce-t-il et on le croit malgré l’effroi que cela provoque. Le « timing » d’ailleurs de cette nouvelle escalade unilatérale de la violence du côté israélien interroge à double titre. D’abord, la presse internationale relève par exemple la concomitance avec les affaires judiciaires du premier ministre dont les audiences ont été annulées le jour même, et sa propension à manipuler le calendrier à ses fins personnelles.
Ensuite, les États-Unis semblent être un des bénéficiaires indirects de cette nouvelle phase de la guerre menée par Israël. Le bras de fer que mène Trump avec Poutine, Zelensky et les Européens sur la guerre en Ukraine n’a pas eu l’effet souhaité par le Président américain. Sa cote de popularité est en baisse dans son propre camp, et ses amis comme ses ennemis ne semblent pas prêts de céder si facilement à sa technique d’intimidation autocratique systématique. La reprise de la violence à Gaza est donc tout à fait justifiée pour l’administration américaine qui impute toute la responsabilité de ces morts parmi les civils au Hamas, avec la même rengaine, il utilise des infrastructures civiles, refuse les propositions de prolongation du cessez-le-feu et la libération des otages. Comme si maintenant le Hamas allait se plier aux exigences, libérer les otages et s’auto-démanteler. Lorsqu’on pointe du doigt la lune, l’idiot regarde le doigt et c’est exactement ce que souhaitent Trump, Netanyahou et consorts.
Mais, la communauté internationale n’est pas un bloc uniforme et encore moins du côté occidental où la confiance et les bonnes manières s’érodent à chaque coup porté par Trump à ses alliés. Si la Russie d’abord, puis la Chine, pèsent d’un poids crucial dans tout règlement éventuel de la conflictualité israélo-palestinienne en tant que membres du Conseil de Sécurité de l’ONU notamment, les Européens sont plus directement concernés ne serait-ce que par proximité historique, mémorielle, géographique. Et le moins qu’on puisse dire c’est que ces derniers semblent avoir changé enfin de paradigme quant au poids politique que doit jouer un ensemble de 27 pays coalisés dans le monde d’aujourd’hui.
Or, les Européens ont au moins condamné les attaques israéliennes, la France en tête, et cette dissonance dans le discours occidental est porteuse d’espoir. Parce que pour espérer voir la fin de l’impunité et du blanc-seing de l’Amérique à Israël, il faut des contre-poids qui pèsent. En attendant, les Palestiniens de Gaza attendent entre la vie et la mort que leur sort soit décidé ailleurs.
Zouhair Yata