Le président de la Fifa Gianni Infantino, le 28 avril 2017 à Santo Domingo © afp/AFP Erika SANTELICES
Le président Gianni Infantino poursuit la refonte à marche forcée d’une Fifa encore convalescente et les 211 fédérations membres devraient lui accorder un large vote de confiance jeudi lors du 67e congrès à Bahreïn.
Pour le successeur de Sepp Blatter, élu en février 2016 et déjà en campagne pour sa réélection en 2019, le changement n’attend pas, peu importent les réactions parfois hostiles.
Dernier coup d’éclat: le non-renouvellement mardi des deux chefs de la Commission d’éthique, qui épaulent les justices américaine et suisse dans l’éradication difficile de la corruption dans le football.
Le Suisse Cornel Borbély et l’Allemand Hans-Joachim Eckert sont à l’origine des exclusions de Sepp Blatter et Michel Platini, sanctionnés pour un paiement controversé de 1,8 M EUR du premier au second.
La même instance avait ouvert en 2016 une enquête préliminaire -finalement classée sans suite- à l’encontre de M. Infantino, notamment pour l’usage d’avions privés. Les deux lanceurs d’alerte qui avaient communiqué avec la commission ont été aussitôt limogés.
Jeudi, Infantino demandera aux membres de la Fifa d’entériner la nomination de la magistrate colombienne Maria Claudia Rojas à la place de M. Borbély à la présidence de la chambre d’instruction et du Grec Vassilios Skuris, ancien président de la Cour européenne de justice, pour succéder à M. Eckert à la présidence de la chambre de jugement.
L’éviction des deux patrons de ce tribunal interne est « un revers dans la lutte contre la corruption », a asséné mercredi M. Borbély, qui assure l’avoir appris par la presse.
« Le travail de la commission d’éthique ne convenait pas à certains responsables de la Fifa », a ajouté l’ex-procureur du canton de Zurich qui, en raison de « l’absence de transition » entre l’actuelle et la nouvelle équipe, s’inquiète de la suite qui sera donnée « à des centaines de cas encore en instruction ».
Selon une source proche de la Fifa, les membres du Conseil, en particulier l’UEFA, estimaient que la Fifa et la Commission d’éthique « avaient besoin d’air frais ». « Leur mandat de quatre ans arrivait à échéance et ils semblent oublier qu’ils n’occupent pas des positions à vie », ajoute cette source pour qui Borbély et Eckert « incarnent également l’ère Blatter ».
Certains à la Fifa s’étonnent ainsi que la commission d’éthique ait attendu l’intervention du FBI en 2015 pour agir. D’autres rappellent qu’Eckert était opposé à la publication du rapport Garcia…
– Le ménage continue
Depuis son arrivée, Infantino a fait le ménage en interne, avec plus de 80 départs, parfois assez brutaux, « pour asseoir son autorité et mieux contrôler », selon un cadre.
L’expérimenté chef de la lutte antidopage, le neurologue Tchèque Jiri Dvorak, a ainsi été congédié. Comme Stefan Jost, le directeur du musée de la Fifa créé en février 2016 par Blatter.
Plus largement, Infantino a adoubé les nouveaux patrons des confédérations continentales, ou milité, dans l’ombre, en leur faveur. Il est ainsi soupçonné d’ingérence dans l’élection du Malgache Ahmad Ahmad qui a mis fin aux 29 ans de règne d’Issa Hayatou en Afrique.
La Commission d’éthique assure qu’aucune procédure formelle n’a été ouverte contre Infantino, ce qui n’exclut pas une possible enquête préliminaire.
Au sein du Conseil, le gouvernement de la Fifa, Infantino a également oeuvré pour réduire l’opposition. En janvier, lors du vote sur l’extension du Mondial de 32 à 48 équipes dès 2026, l’UEFA a ainsi admis avoir été contrainte de suivre l’avis des autres confédérations qui soutenaient cette réforme pour obtenir plus d’équipes qualifiées.
Pour donner des gages de transparence, Infantino, sous la pression d’un membre de l’UEFA, de la CAF et de la Conmnebol, a été obligé d’élargir le processus de candidature du Mondial-2026, même si l’on voit mal quelle fédération pourrait aller contre le ticket commun USA/Canada/Mexique, immense favori. Alors qu’il comptait accorder un an d’exclusivité aux Nord-Américains pour boucler leur dossier.
Jeudi, le congrès validera également un bilan financier 2016 dans le rouge -336,7 M EUR de pertes- en raison notamment des frais de justice, du retard dans la signature de contrats de droits marketing et de télévision et des aides accrues versées aux fédérations.
« En dépit de ce que certaines personnes essaient d’écrire ou de dire, les finances de la Fifa sont extrêmement solides », assure Infantino.
LNT avec AFP