BAB AL MAKINA : Hommage au Sultanat d'Oman. Crédits photo : Ahmed Boussarhane/LNT
La ville de Fès vient de vivre au rythme de son festival des Musiques Sacrées du Monde tenu du 09 au 12 juin. Le succès a été, de nouveau, au rendez-vous. D’ailleurs, celles et ceux qui ont pu assister aux festivités de cette édition vous diront qu’ils ont vécu des moments de fortes émotions et de plaisir. Mais il est aussi important de souligner que la canicule qui a marqué la météo de Fès les jours du festival, n’a pas empêché les Fassis et les hôtes de la ville d’affluer sur Bab El Makina, Jnan S’bil, Dar Adiyel ou encore la Synagogue Aben Danan. Et comme d’ailleurs les précédentes éditions, l’édition 2022 a été marquée par une programmation riche et une organisation professionnelle. Idem pour les débats du Forum du Festival ou encore les concerts animés par une brochette exceptionnelle d’artistes et de formations dans des sites uniques et rares qui célèbrent le patrimoine de la capitale spirituelle.
Le programme de cette édition, axée autour de la thématique « L’architecture et le sacré », a connu la présence de troupes artistiques en provenance de plus de 15 pays, dont le Sultanat d’Oman, le Kazakhstan, l’Inde, la France, l’Italie ou encore le Sénégal.
Après trois jours de festivités, vient le dimanche, dernier épisode de ‘’Fès Festival’’. Dernière ligne droite vers l’ineffable… Dernière chance de rendre grâce à l’émouvante synagogue-musée Aben Danan, pour (re)voir le cycle « Espenbaum » de Michaël Levinas avec la soprano Marion Grange. Pour ce compositeur, fils de philosophe, de retour à la source marocaine : « La langue de Celan [qu’il habille de ses mélodies], pleure toujours. Elle crie, elle tremble. ». Toujours à Fès ce dimanche, les palmiers et les bambous de Jnan Sbil ont tremblé avec « l’Ensemble La Tempête », tel le vent de l’histoire qui balaye des millénaires de civilisation et se joue des géographies monothéistes. Aussi et lors de cette dernière journée et de Fès à Jérusalem, a fini de convaincre le festivalier œcuménique que « Chaque chant entre en résonance avec une toute infime partie de l’édifice que nous habitons, mais aussi avec nos propres sentiments, fruits de nos éducations diverses…Toujours aussi élégant, le manoir d’Adiyel, a prêté son architecture ciselée aux architectures polyphoniques des confréries de Sardaigne, voix mâles, âpres, rugueuses, voluptueuses ,et parfois angéliques, qui plongent leurs racines dans la terre de leur île méditerranéenne et en sont comme l’émanation.
Restera au festivalier fassi ou résident, lorsque les citadins pressés des capitales côtières auront repris la route, à se livrer entièrement au « Samâa » avec les frères de l’Ensemble Al Zawiya d’Oman qui ont passé le relais de l’ascension céleste à l’Orchestre de Fès et aux Chantres de Meknès, sous la direction de Mohamed Briouel. Musiciens et « monchidines », vocalistes du sacré, tracent une voie escarpée et lumineuse « entre transitions modulantes et contrastes rythmiques ». Et en fin de soirée, aux Méridines, la Tariqa Wazaniya a réussi à entraîner le festivalier repu sur la voie de purification. C’est ainsi que sur ces rythmes souffis d’exception que la 26 ème édition du Festival de Fès des Musiques Sacrées du Monde a pris fin. Un franc succès à mettre à l’actif de la Fondation Esprit de Fès qui veille depuis maintenant plus de 20 ans sur la promotion d’une Fès mythique, fédératrice des cultures et civilisations du monde et davantage ouverte sur l’art et les différentes formes d’expressions et de créativité modernes en parfaite symbiose avec son patrimoine séculaire.
Abderrafia Zouiten, Président de la Fondation Esprit de Fès, ne cache pas sa satisfaction : ‘’ Quelle joie de pouvoir à nouveau accueillir les amis de Fès. Ces retrouvailles ont été rendues possibles grâce au succès de la campagne de vaccination et à la mobilisation de tous. Je tiens particulièrement à rendre hommage aux autorités et acteurs institutionnels qui ont œuvré sans relâche pendant cette crise sans précédent’’. Et de préciser que malgré les délais très courts, les équipes de la Fondation se sont attelées à relever ce défi, mues par leur volonté de ne pas laisser une autre année passer sans relancer la destination de Fès et de répondre à l’attente des milliers de festivaliers. On apprend également que des compromis ont été bel et bien nécessaires, mais à vrai dire, l’esprit de Fès Festival a été fort présent. Un pari réussi.
H.Z