Un manifestant montre une pancarte demandant une enquête indépendante dans l'affaire russe, qui empoisonne la présidence de Donald Trump, le 10 mai 2017 à Washington DC © AFP/Archives JIM WATSON
Une Maison Blanche en état de siège, un procureur spécial qui fourbit ses armes, des commissions parlementaires aux révélations quotidiennes: l’affaire russe va continuer à empoisonner la présidence de Donald Trump, mais quels développements en attendre ?
– Quelles convictions ont les responsables américains du renseignement ?
Il y a eu des « interactions » en 2016 entre des responsables russes et l’équipe de campagne de Donald Trump. L’ex-directeur de la CIA John Brennan l’a encore publiquement affirmé mardi.
James Comey, l’ancien chef du FBI limogé par Trump, avait en mars confirmé que les interférences russes dans la présidentielle faisaient l’objet d’une enquête.
Par un piratage informatique sophistiqué, la Russie a jeté un discrédit sur la candidature d’Hillary Clinton, faisant très probablement pencher la balance électorale en sa défaveur. « LA » question demeure: Moscou l’a-t-il fait en concertation avec l’entourage de Trump ?
– Qui pour répondre à cette question ?
Le Congrès des Etats-Unis et la Justice enquêtent.
Côté Congrès, des commissions parlementaires concurrentes sont à l’oeuvre. Les deux principales sont les commissions du Renseignement de la Chambre des représentants et son alter ego au Sénat. Leurs membres se voient parfois reprocher d’agir de façon partisane.
Côté Justice, un procureur spécial a été nommé la semaine dernière: Robert Mueller, ancien directeur du FBI respecté, dispose d’une importante latitude d’action et d’une indépendance renforcée.
Dans une ambiance plombée par les soupçons liés à ses rencontres avec l’ambassadeur de Russie, le ministre Jeff Sessions s’est lui mis en marge.
– Quelle défense adopte Donald Trump ?
Sur le fond, le président nie en bloc. Les accusations de collusion sont selon lui un « coup monté » des démocrates pour expliquer leur défaite.
Sur la forme, Donald Trump se voit reprocher par ses adversaires de faire de l’obstruction judiciaire.
Le président aurait demandé à James Comey, selon des notes de ce dernier, de clore les investigations sur son ancien conseiller à la sécurité nationale Michael Flynn, pourtant central.
M. Flynn avait été contraint de démissionner, moins d’un mois après l’investiture de M. Trump, pour avoir dissimulé ses échanges avec l’ambassadeur russe Sergueï Kisliak.
D’autre part, le Washington Post a affirmé lundi que M. Trump avait demandé à Mike Rogers, le directeur de l’agence d’espionnage NSA, et au coordonnateur du renseignement américain, Dan Coats, de nier publiquement qu’il existait des preuves de collusion entre son équipe et la Russie.
M. Coats a refusé mardi de confirmer la réalité d’une telle demande.
Le président va par ailleurs s’entourer d’une équipe juridique extérieure au gouvernement. Selon la presse, M. Trump a choisi Marc Kasowitz, un ténor du barreau de New York, pour la diriger.
– Quelles prochaines étapes d’enquête attendre ?
L’audition au Sénat de James Comey promet d’être un moment fort, à une date restant à fixer à partir de mardi prochain.
L’ex-patron policier évincé, qualifié de « cinglé » par M. Trump, provoquerait une déflagration s’il confirmait publiquement avoir subi des pressions du président.
Toujours côté Congrès, on peut s’attendre à des mois de bras de fer entre les commissions et certains collaborateurs de Donald Trump peu désireux de témoigner.
Les parlementaires peuvent adresser des citations à comparaître et lancer des injonctions pour obtenir des documents confidentiels utiles à l’enquête. Les personnes visées peuvent invoquer un droit constitutionnel au silence sur des déclarations qui pourraient être retenues pénalement à leur encontre.
C’est ce qu’a fait lundi M. Flynn, pour éviter de remettre des documents réclamés par le Congrès.
Face à une telle attitude, les élus peuvent émettre de nouvelles injonctions ou lancer une procédure plus solennelle sanctionnant une désobéissance.
Quant au procureur spécial Mueller, il a obtenu mardi le feu vert final pour son enquête, de la part de la commission d’éthique du ministère de la Justice. Il dispose d’un budget et de locaux à Washington pour son équipe d’investigateurs.
M. Mueller peut donc rapidement commencer à interroger les protagonistes de l’affaire, parmi lesquels M. Comey, d’une façon plus discrète que le Congrès.
– Trump risque-t-il d’être destitué ?
C’est une possibilité théorique mais peu plausible en l’état actuel des choses.
Elle supposerait que la Chambre des représentants, actuellement à majorité républicaine, vote une procédure de mise en accusation (« impeachment ») fondée sur des faits graves. Puis que le Sénat condamne Donald Trump à une majorité de deux-tiers.
Jamais dans l’histoire américaine un président n’a été destitué.
LNT avec Afp