Que faire lorsque votre conscience, votre vécu, vos convictions se heurtent aux dures réalités sociales et sociétales, surtout quand elles concernent la Femme ?
Cette question a bien longtemps taraudé Mme Zahra Zaoui, juriste de formation et avocate à Oujda. Jusqu’au moment où deux déclics se déclenchent. L’un matérialisé par la visite dans l’Oriental du Roi Mohammed VI au lendemain de son intronisation, l’autre par la prise en charge d’une malheureuse, répudiée et abandonnée de tous au lendemain même de ses noces.
Aujourd’hui, Mme Zahra Zaoui, par ailleurs présidente de la Commission sociale du Conseil Economique, Social et Environnemental, peut exciper d’un bilan fort brillant de ses activités de présidente et d’animatrice d’une association parmi les plus performantes de notre société civile. « Oujda Aïn Ghazal 2000 » se targue en effet, de la création et de la gestion d’un Centre de Protection Sociale qui accueille, écoute, oriente et réconforte des femmes célibataires, divorcées, maltraitées, et toutes les victimes de la violence faite aux femmes dans la région d’Oujda.
Une action aussi méritoire que pérenne, faite avec humilité et courage et qui, notamment, permet de comprendre que cette violence basée sur le genre constitue le principal obstacle au développement de la démocratie participative, mais surtout à l’application et l’effectivité des droits fondamentaux que la Constitution garantit à la Femme marocaine.
Des droits proclamés, certes, mais qui ne profitent pas vraiment à la moitié de la population de notre pays !
FY
La Nouvelle Tribune : Vous avez fondé il y a plusieurs années de cela l’association Ain Ghazal. Pour quelles raisons et quels objectifs ?
Mme Zahra Zaoui : L’association s’appelle «Oujda Aïn Ghazal 2000» et le nom indique bien déjà la date de sa création, en l’an 2000, à peu près au moment de l’intronisation de SM Mohammed VI. L’avènement du nouveau Souverain était pour moi porteur d’un message d’espoir, de progrès, d’évolutions sociales et sociétales. J’ai eu à ce moment-là la conviction que le moment était venu de m’investir dans ma région où sévissaient cruellement des lacunes en termes d’accompagnement social et d’aides aux défavorisés, afin de contribuer à alléger et à réduire les difficultés amères qui frappent les individus et, surtout, les femmes.
Cette année-là donc, nous avons réuni plusieurs personnes de bonne volonté, Et c’est ainsi que l’association Oujda Aïn Ghazal a été fondée.
Pourquoi Aïn Ghazal ?
Il y a longtemps, l’Oriental était une région où vivait, au sud, la gazelle. J’ai voulu que celle-ci revienne, parce qu’elle évoque la beauté, la grâce, la féminité. Le retour de la gazelle, dans mon esprit, signifiait des projets de développement, notamment pour la Femme marocaine et notamment dans l’Oriental et qu’elle soit présente dans cette ère nouvelle et cet environnement porteur qui s’annonçait avec l’intronisation de SM Mohammed VI.
L’un de ses premiers déplacements en tant que Souverain avait été pour notre région et à l’occasion d’une réunion avec toutes les forces vives, chacun avait compris qu’il y avait la volonté de mise en place d’un nouveau contrat social.
La société civile avait été interpellée par le Roi et je m’étais sentie concernée, visée en quelque sorte, parce que le Roi faisait appel à toutes les bonnes volontés. J’ai compris à ce moment qu’il fallait que je m’implique dans le tissu associatif qui devait répondre à cet appel royal.
Mais pourquoi le tissu associatif ? A l’origine, vous êtes juriste, avocate ?
Il y a eu à ce moment effectivement un autre déclic, parce qu’en tant qu’avocate, je recevais les demandes sociales et en une occasion, j’avais reçu une jeune fille, arrivée de Beni Mellal et qui venait d’être répudiée la nuit même de ses noces à Oujda. Employée en tant que «petite bonne» auparavant dès l’âge de neuf ans, elle avait été abusée par l’employeur, gardant le silence pendant longtemps. Mise à la porte la nuit de son mariage par son époux, elle m’avait été adressée le lendemain matin afin que je l’accompagne chez le juge pour prononcer son divorce.
Sous la raison de non-virginité de la jeune épouse, le juge prononça ipso facto la séparation du couple, laissant cette pauvre femme complètement seule, abandonnée, ignorante de ses droits, avec une très maigre «consolation» pécuniaire !
Après l’avoir réconfortée, accueillie chez moi, aidée, j’ai pleinement mesuré le drame social profond que pouvait constituer, pour des femmes dans ce type de situation terrible, l’absence de toute structure de prise en charge et d’accueil dans une ville comme Oujda, voire dans l’Oriental en son entier !
Et c’est ainsi que le premier projet enregistré dans la banque de projets de l’Association Oujda Aïn Ghazal a été celui de mettre en place un centre d’hébergement pour femmes divorcées ou célibataires, démunies, seules, victimes de mauvais traitements, et sans ressources ni soutiens familiaux.
Cela parce que pour ce genre de cas sociaux, l’Etat était absent, et les mécanismes de prise en charge de ce type de problèmes faisaient cruellement défaut. Voilà pourquoi j’ai songé et voulu que l’Association Oujda Aïn Ghazal mette en place un «dispositif d’urgence pour femmes en situation difficile».
Cette idée a eu beaucoup de mal à être acceptée, y compris par les autres membres de l’Association qui doutaient de sa faisabilité, redoutaient la réaction des milieux réactionnaires et conservateurs, voire même supposaient que les autorités locales ne verraient pas d’un bon œil un tel projet de centre d’hébergement. Mais, pour ma part, je considérais qu’il m’importait de réagir pour accomplir ce devoir de citoyenne en refusant de laisser dans la rue, mère de toutes les audaces, des femmes abandonnées, isolées, sans moyens, ignorantes de leurs droits fondamentaux.
Dans ces conditions, comment avez-vous réussi à concrétiser votre projet porté, il est vrai, par votre forte détermination ?
Cela n’a guère été facile et l’opposition de mes amis et autres membres de l’association n’a été levée qu’à partir du moment où j’ai compris qu’il fallait réduire la portée du projet, en installant d’abord un centre d’écoute avant de songer à un centre d’hébergement.
Ce centre d’écoute avait pour objectif de traiter la demande sociale et de déterminer la nature des problèmes vécus par ces femmes. Parallèlement, j’avais mis au point une proposition de réalisation d’un dispositif d’urgence pour femmes en situation difficile, laquelle a été envoyée à la quasi-totalité des ambassades étrangères à Rabat, dans l’espoir de trouver une assistance et un financement internationaux pour la réalisation de ce centre d’hébergement. Mais il n’y a eu aucun retour de la part des légations étrangères dans notre pays. Mais, deux années après, Sa Majesté effectue une visite dans l’Oriental, alors que le centre d’écoute avait été ouvert.
Vous aviez donc des résultats concrets et positifs avec ce centre ?
Certes, mais les femmes nous disaient, d’accord, vous nous écoutez, mais ce dont nous avons besoin c’est d’un abri, d’un lieu sécurisé, d’un espace pour réfléchir et penser à notre situation en toute quiétude et solitude.
Cette réclamation et ces revendications redondantes de ces femmes qui réclamaient avec insistance et à juste titre, un lieu d’accueil, avait permis de faire prendre conscience à tous les membres de l’association, six mois après l’ouverture du centre d’écoute, que la seconde partie du projet, à savoir un centre d’hébergement, était impérativement nécessaire et urgente à réaliser.
Nous avons donc ce Centre d’accueil, d’écoute et d’orientation, que j’avais appelé «OSES» pour Orientation, Soutien, Ecoute Spécialisée, afin d’inciter les femmes à parler, à venir vers nous.
Donc, pour en revenir à l’allusion que vous avez faite sur la visite royale dans l’Oriental ?
Oui, effectivement, deux années après la mise en place de ce centre OSES, le Souverain est venu dans l’Oriental, en 2003, dans le cadre de ce contrat social qu’il avait souhaité lancer lors de sa première visite, en invitant les forces vives de la société civile à s’engager, alors que l’Etat se mettait en charge de réaliser les projets structurants.
En cette occasion, on m’annonça que le Roi avait décidé la construction de ce centre d’hébergement pour femmes en situation difficile, ce projet qui n’avait pas eu le moindre retour de la part des ambassades étrangères à Rabat.
Et l’on me demanda, au niveau de la Wilaya d’Oujda, si je me sentais la force et la volonté de m’occuper de ce centre d’hébergement, de sa construction à sa gestion quotidienne et à compter de ce jour-là je fus étroitement associée à toutes les étapes de la réalisation de ce centre d’hébergement.
Mais vous saviez exactement comment organiser la distribution spatiale de ce type d’établissement ?
Oui, par mes recherches, mon expérience acquise avec des femmes en souffrance sociale, je savais ce qu’il fallait pour ce centre, c’est-à-dire un espace d’accueil, une salle d’écoute spécialisée, des salles de réunion pour l’association Oujda Aïn Ghazal qui devait déménager dans ce local, dix chambres de trois lits chacune pour accueillir et loger les femmes, etc. Il s’agissait d’un projet pilote, de taille relativement modeste donc pour cette première expérience, d’une superficie au sol de 80 mètres carrés, mais sur trois niveaux, d’une capacité d’accueil et d’hébergement totale de 30 adultes et dix enfants en bas-âge, sachant que nous accueillions les mères célibataires. Et en mars 2004, une année à peine après la décision de création de ce centre, le Souverain revient dans l’Oriental et inaugure le centre.
Mais qui avait financé la réalisation du centre d’hébergement, l’Etat, le privé, une fondation, une ambassade étrangère ?
Et si nombre de projets sociaux de l’Oriental relevaient des activités et budgets de la Fondation Mohammed V pour la Solidarité, je me dois de préciser que le centre d’hébergement a été réalisé grâce aux moyens propres de Sa Majesté Mohammed VI. Ce qui a constitué pour nous, un motif de fierté légitime et la volonté encore plus forte de mener à bien la mission et les objectifs que j’avais eu l’honneur et le privilège d’exposer à notre Souverain à l’occasion de l’inauguration et de la visite royales du centre d’hébergement.
Quel a été le champ opérationnel de ce centre d’hébergement ?
Nous avons été essentiellement préoccupé de la prise en charge de femmes célibataires, d’autres victimes de violences conjugales, des jeunes filles abandonnées par leurs familles d’accueil, etc.
Comment avez-vous appelé ce centre ?
C’est Sa Majesté le Roi, qui a d’ailleurs fait un suivi personnel de cette infrastructure durant les trois premières années de son existence, qui lui a donné son nom, le Centre social pour la Femme.
Un nom généraliste et généreux !
Exactement ! Puis, en 2010, un arrêté gouvernemental lui confère le statut d’un centre de protection sociale. Donc pour récapituler, nous avons commencé par une association, un centre d’écoute OSES, un centre d’hébergement, un Centre Social pour la Femme et, enfin, un Centre de protection sociale.
Quelles sont les prestations fournies par le Centre en question ?
Il y a d’abord l’accueil, l’écoute spécialisée. En effet, nous avons formé des personnes afin d’ouvrir à ces femmes des prestations de qualité et donc une formation adaptée de nos personnels et c’est un grand psychologue et psychiatre, M. Abderrahim Hajji, qui avait pris en charge leur formation. D’ailleurs, à partir de cette expérience, nous avons compris qu’il fallait impérativement partager ce savoir-faire, cette capacité d’écoute et ces compétences. Nous avons donc créé une chaîne d’écoute afin de donner à nos femmes l’accueil et les attentions que méritait leur triste situation.
Ainsi, la chaîne a été constituée d’abord de sages-femmes dans les services de maternité d’Oujda, pour une prise en charge correcte et juste des femmes célibataires qui partaient accoucher. Leur formation avait également été assurée par le Dr Hajji, afin de renforcer les capacités et les compétences au sein de l’hôpital. De même, cette écoute spécialisée a été assurée au niveau de la Justice, car il s’agit de techniques précises d’écoute et de communication et les juges avaient besoin de disposer de cette aptitude pour traiter de manière satisfaisante le cas de ces justiciables jusque-là laissées à leur sort.
Pour écouter, communiquer, sentir ce que la femme en situation de détresse éprouve et l’amener à parler, il faut disposer de conditions particulières. Au centre, par exemple, nous avons mis en place une salle d’écoute qui comporte une chaise pour l’écoutante et un fauteuil pour la patiente, une bouteille d’eau et un verre. Rien d’autre. L’écoutante ne doit ni porter de montre, ni utiliser son téléphone portable afin d’être entièrement à l’écoute de la femme qui demande cette prise en charge et expose ses souffrances et malheurs.
On accueille, on écoute, puis on oriente vers les services spécialisés qui, dans cette prise en charge personnalisée, permettent à ces femmes en souffrance de retrouver leur dignité et leur qualité d’êtres humains qui méritent, comme tout un chacun respect et considération.
Mais dans quel objectif entreprenez-vous cette démarche ?
Notre propos est, au-delà de l’accueil stricto sensu, d’apporter une écoute attentive et intelligente, qui engage la femme victime de maltraitances diverses ou de situations dramatiques, d’abord à réfléchir sur elle-même et sa situation, en lui garantissant les conditions matérielles, morales et psychologiques, de cet examen personnel. Ensuite, il s’agit de lui montrer qu’elle n’est pas seule dans sa galère et que nous sommes à ses côtés pour comprendre les raisons qui l’ont amenée à cette situation et lui ouvrir de nouvelles perspectives de vie. Et en ce sens, notre centre et l’association Oujda Aïn Ghazal 2000 sont des outils précieux de collecte de l’information de la situation sociale des femmes. Et, à partir des données recueillies, on est en mesure de les orienter et de les conseiller dans le cadre d’un programme appelé « Tamkin » et qui met en oeuvre l’autonomisation de ces femmes.
Mais comment avez-vous pris conscience de ces objectifs et des moyens de les atteindre ?
Cette démarche n’est pas née de nulle part ou fortuite. En effet, à partir de l’an 2000, j’ai personnellement participé, en me déplaçant chaque fois à Rabat, à toutes les rencontres, séminaires, colloques et autres manifestations sociales ou scientifiques dédiés à l’étude de la problématique de la violence faite aux femmes.
En effet, la question cruciale qui se pose d’ailleurs encore aujourd’hui, ce qu’à partir d’Oujda, notamment, l’information n’est pas disponible sur les problématiques sociales, de genres, etc. Beaucoup d’actions, de mesures, de programmes mêmes existent ou sont mis en œuvre, mais la diffusion de l’information n’est pas assurée au niveau d’une grande partie du territoire national.
Et dès 2004, j’ai voulu implémenter au niveau local la problématique de cette violence faite aux femmes qui était jusque-là réservée à l’échelle nationale, notamment grâce à l’action de la ministre Mme Nezha Chekrouni qui l’avait portée à partir de l’année 2000. Car l’obstacle majeur à la participation politique, économique, sociale de la Femme, c’est la violence faite aux femmes.
Comment, par exemple, demander à une femme cloîtrée, qui ne voit pas la rue, de participer à des élections communales ou législatives ou de postuler à des fonctions ou responsabilités pour défendre les femmes ? Impossible !
C’est donc la violence faite aux femmes qui a constitué le fondement de la démarche de Aïn Ghazal ?
Oui, incontestablement, mais à partir d’interrogations et de questionnements personnels, qui m’ont poussé à chercher pourquoi, comment et où s’exerçaient ces violences vécues par les femmes marocaines.
Et celles-ci se matérialisent principalement dans le cadre familial.
Un excellent exemple de cette situation déplorable peut être donné, celui du sud de l’Oriental où vivent des nomades. Il n’y a dans cette région aucune prise en charge de ces groupes, aucune institution ne prend en considération leurs besoins. Les familles sont livrées à elles-mêmes et c’est ainsi que des fillettes de 9 ou 10 ans sont données en mariage !
Personne ne va les voir, les écouter, les prendre en charge. Livrés à eux-mêmes, ces groupes sociaux ont construit leur monde en dehors de tous les droits humains, sociaux, etc. Et, bien évidemment, c’est la femme qui en paie le prix, le plus fort, quel que soit son âge. Pour ces populations, une jeune fille de quinze non mariée est considérée comme une «vieille fille».
Pas de politique de développement du monde rural, pas de démarche spécifique aux zones oasiennes, voilà ce qu’on constate dans cette région, ce qui me fait dire qu’il y a aujourd’hui plusieurs Maroc et dans certaines parties du pays, c’est quasiment le Moyen Âge…
Mais pourquoi en êtes-vous venue à vous intéresser à ce groupe de nomades ?
A Oujda, nous sommes loin de ces familles, mais nous avons monté au sein de l’association plusieurs centres d’écoute dans toutes les provinces. Et cette démarche de systématisation a commencé en 2004 lorsque nous avions organisé avec l’aide de l’ACDI canadienne une rencontre dédiée à la violence faite aux femmes. Car même à ce moment-là, les gens, y compris au niveau officiel, ne comprenaient pas vraiment ce qui constituait cette violence, l’assimilant seulement, par exemple, à une simple gifle. Or, la violence peut être, bien sûr, physique, mais aussi psychologique, sexuelle également, mais peu évoquée par les victimes, économique et, enfin, institutionnelle, lorsque une femme se trouve en face de représentants de l’autorité, des forces de l’ordre, de la Justice, etc.
Quelles sont les causes de cette violence ?
Elles sont évidemment diverses, mais souvent liées aux pratiques traditionnelles, discriminantes, culturelles, sociales, ancrées dans les us et les coutumes, comme on a pu le constater notamment pour ces nomades de Bou Arfa et Béni M’thar, avec des spécificités propres à chaque région, chaque partie du pays.
Quelles sont les principales réalisations de l’association Oujda Aïn Ghazal 2000 ?
Il y a eu chronologiquement l’association elle-même, le centre d’écoute OSES, le Centre Social pour la Femme et enfin le Centre de Protection Sociale. Et, à ce niveau, nous avons mis en place une chaîne pénale parce que nous ne travaillons pas seuls. En effet, en ce qui concerne la problématique de la violence faite aux femmes, nous avons appliqué la stratégie nationale et tous les départements ministériels concernés sont partenaires. C’est ainsi qu’au niveau décentralisé, il a été créé une cellule d’écoute spécialisée dans chaque délégation de chacun des ministères. C’est au tribunal que se trouve la cellule-mère, l’association Aïn Ghazal dispose d’une cellule d’accueil, d’écoute et d’orientation vers la cellule-mère. Le Département de la Santé, celui de l’Education Nationale, la Justice, la Sûreté Nationale, la Gendarmerie Royale disposent également de la même structure et ainsi nous avons constitué cette chaîne pénale au niveau de l’Oriental, sachant que cette démarche relève d’un programme implémenté à l’échelle nationale.
A l’échelle nationale peut-être, mais qui le connaît ?
Ce programme s’appelle Tamkin, et il a été mis en place lorsque Mme Nouzha Skalli dirigeait le département de la Famille et de la Solidarité. Et l’appellation de Tamkin a été choisie parmi d’autres propositions d’associations de la société civile. Notre fierté est de préciser que Tamkin avait été le nom présenté par Aïn Ghazal !
Ce nom répond à une évidence, celle de la nécessité de travailler à l’autonomisation sociale et économique de la Femme, sans lesquelles on ne saurait parler de changement et de développement. Et il est primordial de l’ériger en priorité indiscutable. Et notre espoir, en ce sens, est que la régionalisation donne toute la mesure nécessaire à une telle priorité afin que les associations locales jouent leur rôle de forces de propositions, mais aussi de levier d’interpellation des autorités locales et régionales afin d’intégrer cette autonomisation sociale et économique des femmes dans leurs ordres du jour, sachant que désormais, la réddition des comptes fait partie des moyens donnés à la société civile, notamment, pour évaluer le travail accompli par les élus et responsables régionaux au niveau de la gouvernance locale.
En conclusion, après 17 années d’existence, comment appréhendez-vous le rôle de l’association Aïn Ghazal ?
Au-delà d’un bilan probant au niveau de la mise en place et du suivi quotidien par des structures dédiées performantes et spécialisées des femmes en situation de grave détresse personnelle, familiale ou sociale, notre association, à travers son action d’émanation de la société civile, a essentiellement cherché à faire avancer au niveau local et régional la problématique de la lutte contre la violence faite aux femmes, sous toutes ses formes.
Il s’agit d’un point essentiel parce que notre devoir est de tout mettre en œuvre pour parvenir à une société cohésive qui garantisse d’abord les droits fondamentaux des citoyens et spécifiquement ceux des femmes. A partir de cette évidente nécessité, c’est toute la question de la démocratie participative qui est posée, dans le sens d’une réelle prise en compte du point de vue des citoyens en tant que condition essentielle de l’instauration de cette confiance sans laquelle l’Etat, sous toutes ses expressions et à tous les échelons demeure étranger aux attentes et revendications des citoyens, de la société globalement appréhendée.
Aïn Ghazal, sans interférer dans le champ politique, sans occuper la place de représentation de l’élu se veut donc le porte-voix des sans-voix.