Abdelhakim Agoumi, Directeur du pôle Services à la Clientèle et Canaux Alternatifs à CIH Bank
Abdelhakim Agoumi, est Directeur du Pôle Services à la Clientèle et Canaux Alternatifs au sein de CIH BANK. Le pôle supervise l’ensemble des Back Office de la banque et accompagne la filiale « Lana Cash » pour le développement de solutions innovantes dans la gestion des flux Cash et autour de l’écosystème du paiement mobile.
La Nouvelle Tribune : Quels efforts ont été consentis par CIH BANK pour s’assurer de sa transformation digitale ?
Abdelhakim Agoumi : La transformation digitale est un axe stratégique de développement de CIH BANK. Cette volonté a été accompagnée par une forte mutation de notre Système d’information et aussi au niveau de notre organisation afin d’introduire plus d’agilité.
Cette agilité organisationnelle se retrouve au niveau de l’ensemble des métiers de la banque, et non pas uniquement au niveau du développement informatique, et ce dans l’objectif d’accompagner notre nouvelle vision de la relation Client/Banque, et répondre à la contrainte majeure du temps réels et l’instantanéité des transactions.
CIH BANK, grâce à cette transformation a mis en œuvre des solutions pour permettre à nos clients de consommer la banque là où ils se trouvent. Ainsi, le canal mobile au vu de son taux de pénétration au Maroc, s’est imposé naturellement comme le canal prioritaire, tout en assurant à nos clients la même qualité et le degré de digitalisation sur les autres canaux de distribution.
CIH BANK a très tôt misé sur une cible jeune afin de porter sa vitrine digitale. Quelles en sont les raisons ?
Notre pays a connu ces dernières années une forte mutation sur l’ensemble des secteurs (Infrastructures autoroutières, Télécom et bien d’autres).
Les besoins et les attentes des jeunes marocains vis-à-vis des produits financiers a suivi la même tendance.
Les jeunes demandent plus d’instantanéité et de plus en plus d’indépendance. C’est pourquoi nous avons tout de suite pris le pari de mieux servir ce segment de la population en développant une offre dédiée « CODE 30 », offre gratuite et évolutive qui nous permet d’accompagner les Jeunes tout au long de leur vie.
Cette stratégie d’accompagnement ne s’est pas limitée aux jeunes, puisque, nous avons développé sur la même base, des offres dédiées aux femmes « Offre Sayidati », aux fonctionnaires, aux professions libérales ….
Comment définissez-vous les étapes successives de la digitalisation ?
La transformation digitale est avant tout un processus de changement continu et permanent. Elle est enclenchée soit par la veille technologique soit par l’écoute et l’anticipation des besoins de la clientèle.
A titre d’exemple, l’entrée en relation en ligne s’est appuyée, d’abord sur un besoin client, et on a pu la développer et la mettre en place grâce à l’évolution de la technologie et le du cadre réglementaire.
Aujourd’hui, ce processus peut évoluer encore avec la possibilité de lire et/ou récupérer automatiquement les données des clients à partir des CIN biométriques.
Pour résumer, la digitalisation de processus et/ou services est un mix entre besoin, technologie et réglementation.
Quel rôle joue le régulateur dans votre démarche de digitalisation ?
La réglementation est un axe important dans la digitalisation des services. Ainsi, les régulateurs des services financiers ont un double rôle. Des fois, ils peuvent initier des réflexions de place comme pour le projet de paiement mobile ou le projet du virement instantané interbancaire, et d’autres fois ils jouent le rôle de conseillers et accompagnateurs des banques pour mettre en place de nouveaux produits et/ou processus, dont le projet CIH Pay (Tokénisation des cartes monétiques) qui est un parfait exemple.
Il faut noter que l’ensemble des régulateurs accompagnent cette démarche de digitalisation.
Comment CIH BANK aborde-t-il le monde des Fintechs ?
Nous avons très tôt compris que le développement d’un écosystème de Fintechs au Maroc serait un accélérateur pour la digitalisation des processus ou services financiers.
Ainsi, nous avons lancé le premier Hackathon, et aujourd’hui nous avons construit une organisation dédiée aux développements des Fintechs qui s’appuie sur la mise en œuvre :
D’un socle technique basé essentiellement sur la mise en place d’une architecture basée sur une couche d’APIs et sur le développement d’un Sand Box, qui permet aux Fintechs partenaires de développer et tester rapidement leur concept ;
D’une cellule d’accompagnement fonctionnelle qui couvre les problématiques réglementaires et procédurales avec un focus fort sur l’expérience client ;
D’un espace dédié pour héberger les promoteurs et leurs assurer un cadre de travail agréable et complet ;
De données du marché afin de construire et stresser leur Business plan.
A terme, CIH BANK ambitionne d’être la banque partenaire des FinTechs au Maroc.
Quelles sont d’après vous les contraintes inhérentes au Maroc auxquelles ces Fintechs sont confrontées ? En quoi le benchmark international est utile ?
La contrainte majeure du marché Marocain est sa taille. Certains investissements et/ou solutions induisent des coûts d’investissement difficiles à rentabiliser uniquement sur notre marché.
Les promoteurs doivent donc absolument veiller à la « Scalabilité » de leurs solutions afin d’attaquer d’autres marchés et essentiellement des marchés voisins mais aussi dans les pays où notre communauté MDM est importante.
Cependant, cette contrainte devient une force, pour nos promoteurs, lorsqu’ils souhaitent réaliser des POC « Proof Of Concept » car au vu de la taille du marché, l’impact reste maitrisable.
Quelles sont selon vous les nouvelles lames de fond qui émergent pour les années à venir et auxquelles il faut s’intéresser ?
La gestion de la données et la connaissance client est sont un axe majeur des années à venir. C’est pourquoi à CIH BANK, nous nous sommes dotés d’un DATALAB pour la structuration des données et d’une équipe ANALYIQUE pour l’exploitation de cette donnée, et ce dans le respect de la réglementation, sur les trois volets : commercial, risque et fraude.
La Blockchain est aussi un axe de développement et/ou de digitalisation des processus dans les années à venir. C’est une technologie qui doit apporter une refonte profonde des processus impliquant des tiers certificateurs, à titre d’exemple : Les processus d’achat de biens immobiliers et/ou mobiliers.
Enfin, les NFTs, dont on entend beaucoup parler, sont simplement de nouvelles formes d’expression artistique. L’Art étant l’unicité, les NFTs sont dans leur rôle. C’est un nouveau marché de l’art pour acquérir des choses uniques.
En conclusion, à travers votre expérience et vos responsabilités, pensez-vous que le Maroc avance dans la bonne direction ?
Je suis optimiste de nature mais je le suis d’autant plus lorsque je mesure le chemin parcouru en quelques années et je ne vois pas de raison pour que le Maroc ne continue pas à accentuer son avancée dans certains domaines et à rattraper son retard dans d’autres.
Peut-être que le plus grand chantier est de réussir à faire revenir les compétences marocaines qui sont déployées à l’étranger ou à retenir les talents qui sont ici.
Propos recueillis par Zouhair Yata