
PLF-2023 : Séance plénière des deux Chambres du Parlement
Par Afifa Dassouli
Comme prévu, l’adoption du PLF 2023 touche à sa fin avec son adoption à la majorité ce lundi par la Chambre des Conseillers. Une adoption qui fait suite, à la présentation par Mme Nadia Fettah Alaoui, ministre de l’Économie et des finances, devant les Conseillers, des principaux amendements apportés au PLF n°50.22 de l’année budgétaire 2023, soit plus de soixante amendements.
A cette occasion, elle a mis l’accent sur la date du 1er décembre, la qualifiant d’historique pour les quelque 4 millions de familles marocaines, soit 10 millions de citoyens, qui ont acquis le droit d’accès à l’assurance maladie au même titre que les salariés du public et du privé. Pour ce faire, la ministre de l’Économie et des finances a assuré qu’au titre de l’année 2023, l’Etat prend en charge de ce fait leurs cotisations à la CNSS, soit 1,5 MMDH. A cette date du premier décembre dernier, le Gouvernement a également adopté 5 projets de lois à même d’accompagner ce chantier de la couverture sociale générale, comme a été actée l’entrée en vigueur de la décision d’augmentation de 5% au profit des retraités du secteur privé.
En effet, ces précisions sont de taille car elles sont prioritairement prises en compte dans le projet de loi de finances 2023, qui se proclame plus que sa précédente, sociale. C’est la première loi de finances à prioriser dans son budget le financement des mesures sociales et celle de l’assurance maladie en premier.
Pour ce qui concerne le PLF 2023, Mme Fettah a précisé devant les Conseillers que 60 amendements ont été retenus, ce qui reflète la volonté du gouvernement de travailler et d’interagir positivement avec l’institution législative.
Parmi ces derniers, il y a l’augmentation du nombre de postes budgétaires consacrés à l’Instance Nationale de la Probité, de la Prévention et de la Lutte contre la Corruption, avec la création de 90 nouveaux postes, pour permettre à cette instance de remplir pleinement ses missions constitutionnelles et procéder à l’assainissement de toutes les instances du pays.
Sur le plan économique, les amendements les plus notables sont :
– La prolongation de la période d’application de l’exonération de l’impôt sur le revenu (IR) au titre des salaires versés pour un premier emploi jusqu’au 31 décembre 2026.
– L’encouragement de l’épargne dans les contrats d’assurance retraite en réduisant l’âge requis de l’assuré de 50 à 45 ans et la retenue à la source appliquée à un remboursement de cotisations et primes pour les contrats d’assurance retraite de 30% à 15%. Rappelons à ce titre que les produits d’épargne retraite bénéficiaient d’une disposition fiscale favorable, celle pour les personnes physiques de pouvoir constituer une épargne retraite auprès d’une compagnie d’assurance, à hauteur de 50% du salaire net imposable annuel, en totale exonération de l’IR. Cet avantage étant doublement conditionné d’une part par l’obligation de ne reprendre son capital qu’après 8 ans de placement, et d’autre part de n’en disposer qu’au-delà de l’âge de 50 ans. C’est quand ces deux conditions sont réunies, que le bénéficiaire profitait d’un abattement de 40% sur le capital constitué et revalorisé, et ne payait l’impôt sur le revenu que sur les 60% restants. Avec en plus, la possibilité d’étaler le paiement du montant de l’impôt dû sur 4 ans, afin de bénéficier du taux de l’IR le moins élevé possible.
– La durée pendant laquelle l’acquéreur d’un logement doit affecter le logement à son habitation principale passe de 6 à 5 ans, pour bénéficier de l’exonération de l’IR sur les profits fonciers.
– L’exonération de la TVA sur les aliments de bétail à l’import à partir du 1er janvier jusqu’au 31 décembre 2023.
– La TIC, taxe intérieure à la consommation, sera appliquée aux produits sucrés comme les barres chocolatées, chocolats en tablettes et en poudre ayant une teneur en sucre ajouté de 50g.
– Les droits de douane sont fixés à 17,5% pour les composants en plastique utilisés dans l’automobile.
– L’intégration de l’apiculture parmi les revenus agricoles afin d’encourager la production du miel.
– Le régime fiscal des avocats bénéficie de la réduction de l’avance sur l’IR à verser pour chaque dossier de 300 DH à 100 DH, de la prolongation de la durée d’exonération au profit des nouveaux avocats de 3 ans à 5 ans, et de la suppression de l’obligation de présenter l’identifiant national professionnel.
– Le taux d’imposition de 35% appliqué aux sociétés dont le montant du bénéfice net est supérieur ou égal à 100 MDH, n’inclura pas les sociétés de service ayant acquis le statut CFC ou bénéficiant du régime spécifié, et les entreprises exerçant dans les zones d’accélération industrielle.
Cette mesure concerne également les entreprises engagées à investir un montant minimum de 1.5 MMDH durant la période allant du 1ier janvier 2023 au 30 décembre 2026. Pour les sociétés installées dans les zones d’accélération industrielle ou ayant acquis le statut CFC, le plafonnement du taux de l’IS est fixé à 20%.
– Au niveau de l’IR, différentes dispositions sont concernées, dont :
1) L’exonération de 36 mois de l’IR pour les nouvelles recrues en CDI ayant moins de 35 ans jusqu’au 31 décembre 2026 ;
2) L’exonération des dons versés directement aux bénéficiaires, sans l’intervention de l’employeur, de l’impôt sur le revenu (IR) ;
3) La réduction de l’avance sur l’IR par les avocats de 300 DHS à 100 DHS, avec le prolongement de la durée de l’exonération au profit des nouveaux avocats des avances de 3 ans à 5 ans.
4) Pour ce qui est de la RAS (Retenue à la Source), les amendements apportés concernent la révision à la baisse du taux de l’impôt retenu à la source pour les personnes morales de 20% (proposé initialement) à 5 % en limitant cette retenue aux revenus payés par l’État, les Établissements et Entreprises publics.
Idem pour la retenue à la source libératoire pour les rémunérations des enseignants non salariés des établissements scolaires et les médecins non soumis à la taxe professionnelle,
Ceci s’applique également pour la baisse de la retenue à la source pour les contrats d’assurance épargne retraite de 30 à 15 %.
Concernant l’Auto-entrepreneur, l’Augmentation du chiffre d’affaires annuel au titre des prestations de service réalisées par l’auto-entrepreneur ou le contribuable soumis au régime de la contribution professionnelle unique, pour le compte d’un même client, et dont le surplus est soumis à l’impôt sur le revenu par voie de retenue à la source, de 50.000 DHS à 80.000 DHS.
En revenant au PLF dans son ensemble, Madame la ministre a affirmé que celui-ci incarne la touche politique du gouvernement actuel, reflétant sa vision politique, ses différents défis qui s’articulent autour de trois grands axes.
Le premier consacre les bases de l’État social, à travers la réforme du système de soutien et l’orientation vers le chantier de généralisation de la protection sociale, la qualification du secteur de la santé, de l’éducation et de la formation de tous les niveaux.
Le second porte sur le renforcement de l’investissement productif pour le développement et l’emploi, tout en se focalisant sur les secteurs stratégiques, renforçant la sécurité énergétique et alimentaire du Royaume face aux crises sanitaire, géostratégique, et climatique.
Le troisième axe porte sur la réforme du système fiscal pour maitriser les équilibres macroéconomiques et pérenniser les réformes sociétales et de développement initiées.
Mme Nadia Fettah, dans sa conclusion, a expliqué que le Royaume a réussi la gestion de ses finances publiques malgré la succession des crises, comme en témoignent le maintien du Maroc de sa notation attribuée par Standard & Poor’s Global Ratings et le FMI dans ses rapports. Elle a précisé également le renforcement de la confiance dans la durabilité des équilibres financiers du Maroc, malgré le contexte international difficile. Par ailleurs, elle a fait savoir que le Maroc étudie actuellement avec le FMI la possibilité de l’usage d’une ligne de crédit modulable en tant que garantie contre les chocs internationaux, ajoutant que ce mécanisme de prévention dédié principalement aux pays en voie de développement ayant des bases macroéconomiques solides et une capacité à mener des politiques économiques et financières saines.
De fait, l’accès à cette ligne de crédit modulable permet certes de renforcer la confiance des partenaires étrangers et investisseurs dans les perspectives économiques du Maroc et surtout de faciliter l’accès aux marchés financiers internationaux dans de meilleures conditions, sous la condition de parfaire les différents programmes de réformes entamés par le Royaume.
Parce que sans financement international, il sera difficile de mener à bien toutes les réformes coûteuses sur lesquelles le Maroc compte.
Afifa Dassouli